Renversements sur l’ingérence étrangère (1)

Le cas du Freedom Convoy

Peu de temps après la formation du mouvement d’opposition des camionneurs canadiens, on a essayé d’expliquer son existence par de l’ingérence étrangère. Comme si la gestion de la crise dite sanitaire de nos gouvernements étaient à ce point cohérente, raisonnable, efficace et bénéfique pour les Canadiens, qu’il était impossible qu’ils en viennent à protester vivement et à refuser d’obéir au gouvernement sans une intervention extérieure ! Une journaliste de la CBC a d’abord essayé de dire que c’était peut-être la faute de la Russie, qui fomentait des troubles pour déstabiliser le Canada et se venger de son soutien à l’Ukraine. Mais cela n’a pas pris, donc il a plutôt fallu dire que ce sont des organisations et des individus américains d’extrême-droite qui ont financé le Freedom Convoy, lesquels auraient essayé de déstabiliser le gouvernement canadien, comme ils auraient essayé d’empêcher l’investiture du président Biden en organisant l’« insurrection » du 6 janvier 2021.

Même si on parle dans les deux cas d’ingérence étrangère, il s’agit de choses assez différentes. Dans le cas de la Russie, il s’agit de l’ingérence d’une agence gouvernementale d’un autre pays, ce qui correspond à ce que nous entendons normalement par ce terme. Mais dans le cas du financement en provenance des États-Unis, il s’agit d’individus ou d’organisations privées qui sont dans un autre pays. Il est plus rare qu’on parle d’ingérence étrangère dans ce cas. Ce n’est toutefois pas une raison pour dire que ce financement, s’il a bien eu lieu, ne constitue pas une certaine forme d’ingérence étrangère. Bien au contraire, je trouve intéressante l’idée d’élargir ce qu’on entend normalement par là. Peut-être pourrons-nous ainsi repérer d’autres cas d’ingérence moins visibles, ou que nous n’avons pas l’habitude de considérer comme des cas d’ingérence.

 

Le cas de l’Organisation mondiale de la santé

Fait-il sens de dire que l’Organisation mondiale de la santé s’ingère dans les affaires des États-Nations ? En effet, c’est elle qui a déclaré l’état de pandémie, ce qui a poussé presque tous les gouvernements occidentaux à déclarer l’état d’urgence sanitaire, à imposer toutes sortes de restrictions à leurs populations respectives et à subordonner toute leur politique aux impératifs de santé et de sécurité. C’est l’OMS qui a redéfini ce qu’est une pandémie, pour la réduire à une maladie qui traversent les frontières, indépendamment de sa gravité. C’est aussi l’OMS qui a décrété que l’immunité collective pouvait seulement être atteinte grâce aux injections expérimentales, en écartant l’immunité naturelle acquise après une infection. Ce qui revient à dire qu’elle a joué un rôle important dans la décision des États d’organiser à grands frais des campagnes pour inoculer toute la population. On objectera peut-être que c’est pour le bien de la population qu’on l’a confinée et vaccinée. L’influence de l’OMS serait donc bénéfique pour les États qui ont géré la crise sanitaire en conformité avec ses prises de position. Sans compter que cette influence a été exercée sur les États membres, en vertu de la constitution de l’OMS, laquelle ne saurait être considérée comme une entité étrangère aux États membres. Il serait donc abusif de parler ici d’ingérence étrangère.

À cela je réponds que c’est supposer que ces nouvelles définitions de la pandémie, la déclaration de l’état d’urgence sanitaire et les mesures sanitaires ainsi que l’inoculation massive de la population ont été bénéfiques pour ces États et leurs citoyens, alors que cette supposition même pourrait être en partie due à l’influence de l’OMS et est remise en question par des scientifiques, par exemple Denis Rancourt (voir ses recherches sur l’inefficacité et la nocivité des politiques de confinement aux États-Unis et sur la toxicité des injections expérimentales).

À cela je réponds aussi que l’OMS compte parmi ses principaux donateurs des organismes non gouvernementaux, à savoir la Fondation Bill & Melinda Gates (deuxième position en 2018-2019, pour 9,4 % du budget) et de la Gavi Alliance (quatrième position en 2018-2019, pour 6,6 %), elle-même financée par la Fondation Bill & Melinda Gates. De quel droit Bill Gates, sous prétexte qu’il est riche et pratique la philanthropie, s’ingère-t-il dans les politiques sanitaires internationales, et donc nationales, en allant même jusqu’à militer pour les politiques de confinement et les campagnes de « vaccination », alors qu’il n’a aucune expertise en science et en médecine ? Si nous en jugeons d’après son appartenance à l’« élite » économique et sa manière de faire des affaires quand il était à la tête de Microsoft, nous pouvons douter que son principal souci soit notre santé et notre bien-être. Et nous pouvons croire que, n’ayant pas coupé tous les liens avec Microsoft depuis qu’il n’est plus à la tête de cette compagnie et détenant toujours des actions, il se réjouit du déploiement des technologies nécessaires au télétravail dans les entreprises privées et les organismes gouvernementaux, en raison des confinements saisonniers.

Notons aussi que l’ancienne PDG de la Fondation (2014-2020), Sue Desmond-Hellman, a été membre du Conseil d’administration de Facebook (2013-2019), qui participe activement à la censure des positions divergentes ; qu’elle est devenue en 2020 membre du Conseil d’administration de Pfizer (peut-être une sorte de retour d’ascenseur pour ses bons services), auquel les prises de position de l’OMS sont très profitables ; et qui est devenue en 2021 conseillère du président Biden en matière de science et de technologie. Ce qui montre les liens étroits entre la Fondation, l’OMS et le milieu politique américain.

Quant à la GAVI Alliance, elle est une sorte de partenariat entre des organismes internationaux (OMS, UNICEF, Banque mondiale), des gouvernements donateurs ou participants, des centres de recherche et des sociétés pharmaceutiques, afin d’améliorer l’accès à la vaccination dans les pays en voie de développement. Cette organisation a été critiquée par Médecins Sans Frontières en 2011 pour avoir permis à GlaxoSmithKline (GSK) et à Pfizer/Wyeth de s’enrichir considérablement à l’aide d’un programme de vaccination contre les infections à pneumocoque (par exemple la pneumonie et la méningite) dans des pays africains, notamment au Kenya. Enfin le président de cette organisation est José Manuel Barroso, ancien président de la Commission européenne (2004-2014). C’est durant son règne qu’a été ratifié le Traité de Lisbonne, qui donne beaucoup de pouvoir à l’Union européenne au détriment des États membres. Ce personnage n’a pas hésité à profiter de sa position pour dépenser environ 730 000 € en frais de représentation pour la seule année 2009. Depuis 2016, il est président non exécutif du conseil d’administration de la banque Goldman Sachs, impliquée dans la crise des dettes publiques alors qu’il était lui-même président de la Commission. Notons que le Vanguard Group et BlackRock, qui sont d’importants actionnaires de Pfizer, de Moderna, d’AstraZeneca et Johnson & Johnson, sont aussi d’importants actionnaires du Goldman Sachs Group. Si bien que nous pouvons nous demander si le président de la GAVI Alliance influence les politiques de l’OMS et celles des États membres pour servir les intérêts de certains actionnaires du Goldman Sachs Group qui détiennent aussi beaucoup d’actions des principaux marchands d’injections expérimentales contre la COVID. Et nous pourrions continuer nos recherches et suivre l’argent (« Follow the money », comme disait Chrystia Freeland en parlant du sociofinancement du Freedom Convoy) pour voir combien ils détiennent d’actions des médias de masse et des Big Tech (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft), lesquels servent à imposer aux esprits la politique sanitaire de l’OMS et peuvent profiter de la situation pour accroître leurs revenus (surtout les GAFAM).

Si le financement du Freedom Convoy par des personnes et des groupes américains considérés, à tort à raison, comme de dangereux extrémistes de droite voulant déstabiliser la démocratie canadienne a suffi pour qu’on puisse parler d’ingérence étrangère, pourquoi ne pourrait-on pas parler d’ingérence étrangère quand des milliardaires et de puissants groupes d’investisseurs, sous prétexte de philanthropie, exercent ou sont susceptibles d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur l’OMS, laquelle par ses avis, ses recommandations, ses déclarations et ses programmes de financement exerce une influence sur les politiques des États membres ? Il est vrai que cette ingérence est institutionnalisée et qu’elle se produit avec la complicité des autorités politiques et sanitaires, contrairement à l’ingérence des Américains qui ont financé le Freedom Convoy. C’est pourquoi nous devons en conclure que ses effets sont encore plus nuisibles, et qu’il est encore plus important de mettre fin à cette forme d’ingérence. Pour ce faire, il faudrait que les États membres réforment radicalement l’OMS ou, encore mieux, qu’ils se retirent et qu’ils cessent de la financer.

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