Sortes de sous-traitance

Nos politiciens et nos bureaucrates considèrent depuis longtemps déjà l’État comme une sorte d’entreprise qui doit fournir des services publics aux contribuables en échange des taxes et des impôts qu’ils paient, et les organismes publics comme des entreprises qui doivent fournir des services ou du soutien à d’autres organismes publics. Et pour fournir ces services, le gouvernement et les organismes publics ont assez souvent recours aux services d’entreprises privées quand ils ne disposent pas de la main-d’œuvre, de l’expertise et des moyens techniques requis. Cette pratique est appelée sous-traitance quand ce sont des entreprises privées qui ont recours aux services d’autres entreprises pour fournir des services à leurs clients et respecter les engagements pris vis-à-vis eux. Je ne vois pas pourquoi il faudrait employer un autre nom quand c’est l’État, que ses représentants considèrent comme une entreprise, qui a recours aux services d’entreprises privées pour fournir à leurs clients (des contribuables ou d’autres organismes publics ou parties d’un organisme public) les services qu’ils demandent ou qu’on leur a promis. De la même manière que de grandes compagnies de téléphonie sous-traitent le service à la clientèle, que des entrepreneurs en construction sous-traitent le transport de gravier et que des laboratoires pharmaceutiques sous-traitent les essais cliniques, le système de santé public sous-traite les soins infirmiers en faisant travailler dans les centres hospitaliers des employés de firmes privées, le ministère des Transports et les municipalités ont recours à l’expertise de firmes de génie civil pour préparer les plans et les devis des routes et des ponts et pour surveiller les travaux, le ministère du Numérique et de la Cybersécurité faire gérer par une corporation informatique l’infonuagique gouvernementale, le Conseil exécutif accorde des contrats très lucratifs à une firme de relations publiques pour l’aider à faire la promotion des mesures soi-disant sanitaires et de la vaccination de masse, etc. Pourquoi ne pas parler de sous-traitance dans ces cas ? Et comment ne pas nous inquiéter des conséquences de cette pratique très courante, qui permet au secteur privé de s’ingérer dans les affaires publiques, qui contribue à faire perdre à l’État l’expertise requise pour s’occuper intelligemment des affaires publiques, et qui le rend encore plus dépendant des entreprises avec lequel il contracte pour faire faire de plus en plus de choses qui devraient relever directement de lui ou dont il devrait à tout le moins être le maître d’œuvre ?

Le secteur privé est tellement présent ou imbriqué dans le secteur public, le secteur public est tellement dépendant de lui, et les grandes corporations sont tellement puissantes et riches, que nous pouvons nous demander dans quelle mesure la pratique de la sous-traitance est renversée et quelle ampleur ce renversement pourrait prendre au cours des prochaines années ou décennies. Je veux dire par là que, selon l’angle à partir duquel on considère la situation, ce serait plutôt le gouvernement et les organismes publics qui seraient les sous-traitants des grandes corporations et qui leur offriraient des services nécessaires ou utiles pour atteindre leurs objectifs financiers ou autres.

Depuis 2020, les autorités sanitaires, les membres de nos gouvernements et les organismes publics se sont transformés en véritables agences de marketing pour les marchands de vaccins. En plus de campagnes publicitaires qui vantaient et qui continuent de vanter l’efficacité et l’innocuité des merveilleux vaccins, nos gouvernements ont usé de moyens de coercition comme les confinements, le passeport vaccinal, la ségrégation des personnes non vaccinées et l’interdiction de voyager et d’exercer leur profession pour obtenir l’injection de plusieurs doses par personne et justifier la signature de contrats très lucratifs pour l’industrie pharmaceutique. Ce sont aussi nos gouvernements qui ont organisé les campagnes de vaccination de masse, en utilisant les fonds publics pour distribuer et administrer les vaccins et rémunérer la petite armée de vaccinateurs qui a été maintenue en campagne pendant plus d’une année. Il est vrai que l’industrie pharmaceutique n’a généralement pas donné directement de l’argent aux gouvernements eux-mêmes pour faire d’eux leurs sous-traitants, puisqu’il s’agit au contraire de leur soutirer autant d’argent que possible. Mais c’est vraisemblablement autre chose quand il s’agit des bureaucrates qui dirigent les agences de santé, des chercheurs, des experts et des médecins rémunérés par l’État, des politiciens et de l’entourage de tout ce beau monde, auxquels l’industrie pharmaceutique peut donner des pots-de-vin ou une part du gâteau, payer des voyages luxueux sous prétexte de participation à des congrès, financer leurs recherches, embaucher à des postes bien rémunérés, etc. C’est un secret de polichinelle que les autorités sanitaires des pays occidentaux entretiennent souvent des relations de copinage avec l’industrie pharmaceutique, ce qui facilite l’approbation de leurs nouveaux produits, leur inscription sur la liste des produits couverts par l’assurance-médicament publique et l’adoption de protocoles médicaux qui en encouragent ou en imposent l’utilisation et qui découragent ou interdisent l’utilisation d’autres produits moins coûteux, plus efficaces et moins dangereux. Donc, même si l’argent dépensé par l’industrie pharmaceutique ne se retrouve pas dans les coffres de l’État mais profitent plutôt aux personnes qui occupent des positions d’autorité dans les institutions gouvernementales, ces institutions n’en deviennent pas moins des sous-traitants qui offrent des services spécialisés aux marchands de vaccins et à l’industrie pharmaceutique en général, lesquels leur permettent de maximiser leurs profits et de minimiser leurs dépenses (en maximisant les dépenses publiques), et de ne pas être sérieusement inquiétés en cas de fausse représentation et d’arnaque ou si un scandale en vient à éclater à propos des effets secondaires de ces produits, ou primaires s’ils ne font même pas ce qu’ils sont censés faire.

J’ai l’impression que quelque chose d’assez semblable se produit pour la grande transition énergétique et l’électrification des transports qu’on prépare sous prétexte de lutte contre les changements climatiques. Les corporations et la haute finance qui investissent et qui s’investissent dans ces transformations économiques et technologiques ont vraisemblablement dans leurs poches plusieurs des ministres, des grands bureaucrates et des experts du gouvernement qui déterminent les orientations gouvernementales en matière d’environnement, d’énergie, d’économie et de transports et qui transforment les ministères, les instituts de recherche publics, les universités et les écoles primaires et secondaires qui se retrouvent à devenir des organisations où on fait de la sous-traitance pour ceux à qui profiteront ces transformations, qu’il s’agisse de planifier la construction de parcs éoliens et le remplacement des voitures à essence par des voitures électriques, de justifier ces politiques grâce à des études, de former les futurs experts qui pourront produire ces études et d’enseigner dogmatiquement aux enfants la vulgate climatique et les préparer à accepter les mesures de lutte contre les changements climatiques et les conséquences de leur application, comme l’appauvrissement, la surveillance de masse et le contrôle social. Sans les services qui sont offerts en sous-traitance à l’industrie de la transition énergétique par les gouvernements occidentaux, cette transition pourrait difficilement être vendue ou imposée aux peuples pour lesquels elle est désavantageuse et même nuisible, les importants profits visés par elle et ses investisseurs pourraient difficilement être réalisés, et d’éventuels dispositifs de surveillance et de contrôle des émissions de gaz à effet de serre et de la consommation énergétique des entreprises et des particuliers pourraient difficilement être mis en place.

Il ne faut pas nous étonner que ce reversement ait pu se produire et que nos gouvernements, nos organismes publics et l’État lui-même soient devenus des sous-traitances de puissances étrangères privées. (voir le billet du 15 octobre 2023). N’avons-nous pas délégué la quasi-totalité du pouvoir politique à des partis politiques et à leurs représentants, que nous rémunérons généreusement et qui deviennent en quelque sorte des sous-traitants spécialisés dans les services politiques ? N’avons-nous pas aussi confié l’entièreté de l’administration des affaires publiques à des corps de bureaucrates de carrière, que nous rémunérons aussi généreusement et qui deviennent pour leur part des sous-traitants spécialisés dans les services bureaucratiques ? N’est-il pas normal qu’étant habitués de pratiquer la sous-traitance, ils n’hésitent pas à devenir aussi les sous-traitants de puissances étrangères non étatiques quand cela leur est avantageux, c’est-à-dire quand celles-ci font des promesses ou des cadeaux alléchants, soutiennent grâce aux médias de masse les gouvernements au pouvoir et les partis politiques en campagne électorale, financent légalement ou illégalement ces partis et fournit des moyens qui facilitent la prolifération de la bureaucratie et qui accroît son emprise sur la société et les individus ? Cela n’expliquerait-il pas pourquoi, dans les lois et les orientations adoptées par la classe politique et les services publics, on prend presque toujours en considération les intérêts des grandes corporations et des oligarques qui les contrôlent, au détriment des nôtres ?

S’il n’en est pas ainsi, comment expliquer que les gouvernements et les assemblées législatives adoptent et conservent des lois et des traités qui permettent aux grandes corporations de s’enrichir indéfiniment et de se constituer en puissances étrangères non étatiques, alors que nous nous appauvrissons et devenons plus impuissants ? Comment expliquer qu’on nous fait payer de plus en plus de taxes et d’impôts et qu’on redirige une partie importante de l’argent collecté vers les coffres des grandes corporations et les oligarques grâce à des contrats publics qui sont seulement avantageux pour ces puissances étrangères privées et qui sont assez souvent nuisibles pour nous ? Comment expliquer que les bureaucrates de la justice tolèrent un système juridique tellement complexe et irrégulier que les chances de remporter un procès ou de ne pas être condamné sont proportionnelles à la capacité de dépenser de grandes sommes d’argent pour avoir de bons avocats, c’est-à-dire des avocats tordus ou même crapuleux, qui font fortune en faisant profiter leurs clients de leur expertise ? Comment expliquer que nos écoles primaires et secondaires, au lieu de favoriser le développement d’individus autonomes, dressent les futurs employés et les préparent à la discipline laborieuse et à la soumission exigées dans le monde du travail ? Comment expliquer que nos universités publiques produisent surtout des travailleurs spécialisés, bornés, obéissants et carriéristes qui seront utilisés ou exploités par les grandes corporations et qu’elles forment de moins en moins des penseurs critiques et cultivés, pourtant nécessaires dans une démocratie ? Comment expliquer que les policiers et les juges laissent trop souvent gambader les petits et les grands malfrats, mais font du zèle quand il y a des manifestations ou des révoltes contre les richards, quitte à faire de la provocation ou à inventer des histoires de toutes pièces, pour justifier une intervention policière brutale, des arrestations arbitraires, des incarcérations tout aussi arbitraires, et des poursuites judiciaires quérulentes ou aberrantes ? Comment expliquer qu’on autorise et qu’on encourage la collecte de données par de grandes corporations qui pratiquent la surveillance de masse, en ligne, dans les lieux publics, au travail et même à la maison, et qui en font le commerce ? Etc.

Les services de sous-traitance offerts aux grandes corporations et aux oligarques par ceux qui sont aussi nos sous-traitants politiques et bureaucratiques consistent donc à utiliser l’appareillage politique et bureaucratique pour procurer à nos frais toutes sortes d’avantages à leurs riches clients. Il s’agit d’argent, bien sûr. Mais il s’agit aussi de la surveillance de masse et du contrôle social toujours plus nécessaires alors que les inégalités économiques s’agrandissent et que les élites économiques essaient de nous dominer de plus en plus ouvertement et même effrontément.

Si la tendance se maintient, nos gouvernements, nos organismes publics et la classe politique et bureaucratique pourront éventuellement être considérés comme des filiales à part entièrement des grandes corporations et de l’oligarchie, dont la fonction sera de leur procurer ces services aux frais de la populace, en essayant de maintenir une certaine apparence de démocratie, en devenant la cible du mécontentement populaire, en faisant ainsi écran à leurs richissimes clients corporatifs et, au besoin, en matant les velléités de révolte.

J’écris au futur, mais nous sommes vraisemblablement dans cette situation depuis assez longtemps. Ce qui a changé au cours des dernières années, c’est que la situation devient tellement évidente qu’elle ne peut plus être ignorée par ceux qui n’ont pas été suffisamment aveuglés, abrutis, dégradés et asservis à cause des services offerts aux grandes corporations par leurs sous-traitants publics ou leurs filiales publiques, qui en viennent à se subordonner ou à s’intégrer de plus en plus à ces puissances étrangères privées.