Fin prochaine des mesures sanitaires prolongées grâce à la Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire

La Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire a eu pour principal effet de prolonger des mesures adoptées par le gouvernement du Québec sous prétexte d’état d’urgence sanitaire. Autrement dit, cette loi a eu pour effet de prolonger une partie de ce qui découle l’état d’urgence sanitaire après que le gouvernement a mis fin à l’état d’urgence sanitaire par cette même loi. Ainsi cette loi aurait aussi bien pu s’appeler la Loi visant à prolonger certaines mesures d’urgence après la fin de l’urgence sanitaire.

Cette loi, adoptée le 1er juin 2022, stipule que les mesures prévues dans quatre décrets sont toujours en vigueur :

« 2. Les mesures prévues par l’arrêté du ministre de la Santé et des Services sociaux no 2022-031 du 11 mai 2022 concernant les mesures en éducation demeurent en vigueur jusqu’au 30 juin 2022.

Les mesures prévues par les arrêtés suivants du ministre demeurent en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022 :

1° l’arrêté no 2022-028 (2022, G.O. 2, 1587A) concernant les mesures opérationnelles ;

2° l’arrêté no 2022-029 (2022, G.O. 2, 1588A) concernant les mesures touchant la vaccination et le dépistage ;

3° l’arrêté no 2022-032 du 11 mai 2022 concernant les mesures sanitaires ;

4° l’arrêté no 2022-033 du 11 mai 2022 concernant les mesures de ressources humaines. »

Les dernières mesures qui concernent la population en général et qui étaient encore en vigueur quand cette loi a été adoptée sont dans l’arrêté 2022-032. Il s’agissait alors de continuer à porter un masque dans les transports en commun et dans les milieux hospitaliers. Même si l’obligation de porter un masque dans les transports en commun a été levée le 18 juin 2022, le gouvernement ne s’est pas donné la peine d’abroger officiellement l’alinéa de l’arrêté qui concerne cette obligation. Ou s’il a promulgué un décret à cet effet, il n’apparaît pas sur la page de son site présentant les décrets qui sont toujours en vigueur. L’arrêté 2022-035 apporte seulement des modifications mineures sur le port du masque dans les transports scolaires. Le cinquième et le huitième alinéas seraient, juridiquement parlant, toujours en vigueur, sauf si on considère que les déclarations publiques des politiciens et des cadres de la fonction publique ont force de loi :

« QU’il soit interdit à l’exploitant d’un service de transport collectif par autobus, minibus, métro, bateau, train ou avion d’y admettre une personne qui ne porte pas un couvre-visage ou de tolérer qu’elle se trouve dans un tel moyen de transport sans porter un couvre-visage […] ;

QU’il soit interdit à toute personne qui ne porte pas un couvre‑visage :

[…]

2° d’accéder à un autobus, un minibus, un métro, un bateau, un train ou un avion utilisé dans le cadre de l’exploitation d’un service de transport collectif ou à un véhicule automobile utilisé à des fins de transport rémunéré de personnes, sauf s’il s’agit de covoiturage, ou de se trouver dans un tel moyen de transport, à moins qu’elle soit visée par l’une des exceptions prévues au cinquième alinéa ; »

Je ne sais pas ce qu’il faut conclure de cette omission. Le gouvernement a-t-il voulu suspendre l’obligation de porter un masque dans les transports en commun, tout en se gardant la possibilité de revenir plus tard en arrière, en prétextant que ce décret serait encore en vigueur ? Ou bien faut-il y voir un signe de son mépris à l’égard de ce qui lui semble être de simples formalités, alors que tout le monde devrait savoir que sa parole aurait force de loi et serait même la Loi ? Je ne saurais dire. Chose certaine, il faut nous méfier d’un gouvernement qui ne se donne pas toujours la peine de mettre par écrit ses décisions.


Le deuxième, le troisième, le quatrième et le huitième alinéas de l’arrêté 2022-032 maintiennent aussi l’obligation de porter un masque dans les centres hospitaliers et les cliniques médicales, laquelle n’a pas été levée depuis l’adoption de la Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire :

« QU’il soit interdit à un établissement de santé et de services sociaux d’admettre dans une installation qu’il maintient où est exploité un centre hospitalier de soins généraux et spécialisés, un centre d’hébergement et de soins de longue durée ou un centre local de services communautaire, une personne qui ne porte pas un couvre-visage ou de tolérer qu’une personne qui ne porte pas un couvre-visage s’y trouve […] ;

QUE, malgré le paragraphe 5° de l’alinéa précédent, une personne qui travaille ou exerce sa profession dans un tel lieu demeure soumise aux règles applicables en matière de santé et de sécurité du travail ;

QUE les deuxième et troisième alinéas s’appliquent également, avec les adaptations nécessaires, à l’exploitant d’un cabinet privé de médecin, d’infirmière ou d’infirmière auxiliaire ;

[…]

QU’il soit interdit à toute personne qui ne porte pas un couvre‑visage :

1° d’accéder à une installation ou un cabinet visé au deuxième ou au quatrième alinéa ou de s’y trouver, à moins qu’elle soit visée par l’une des exceptions prévues au deuxième alinéa ; »

Il sera intéressant de voir si, à compter du 1er janvier 2023, le gouvernement cherchera à maintenir cette obligation, aussi bien pour les usagers de ces établissements de santé que pour le personnel qui y travaille. Dans la négative, il faudra aussi voir si les administrations et le personnel de ces établissements continueront d’exiger ou de demander arbitrairement aux usagers de porter un masque, simplement parce que cela leur semble plein de bon sens et faire partie de la nouvelle normalité.


Il est important de remarquer que les consignes sanitaires présentes sur le site du gouvernement sont presque toutes des recommandations et n’apparaissent pas dans les quelques décrets encore en vigueur, en vertu de la Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire. C’est le cas des consignes ci-dessous, par exemple :

« Surveillez vos symptômes

Soyez attentif à votre état de santé et à l’apparition de symptômes de maladies respiratoires infectieuses comme la fièvre, la toux, la perte du goût ou de l’odorat, les maux de gorge, les écoulements nasaux et la congestion nasale.

Si vous avez ces symptômes, posez les bons gestes pour diminuer les risques de contagion des autres personnes.

- Si vous avez de la fièvre, restez à la maison.

- Si vous avez de la toux, un mal de gorge ou de la congestion nasale, portez un masque.

Pour les 10 jours qui suivent l’apparition des symptômes :

- Gardez vos distances avec les autres, autant que possible.

- Évitez les contacts avec les personnes vulnérables, comme les personnes âgées, les personnes immunodéprimées et celles qui ont des maladies chroniques.

- Privilégiez les activités à distance, comme le télétravail.

- Évitez les évènements sociaux non essentiels.

- Avisez les personnes que vous fréquentez que vous pourriez être contagieux.

Faites un test rapide de dépistage de la COVID-19 dès l’apparition des symptômes pour vérifier s’il s’agit d’une infection à la COVID-19.

Si vous devez aller au travail, à l’école ou au service de garde, avisez le responsable de l’établissement que vous avez des symptômes d’une maladie respiratoire infectieuse et respectez les règles en vigueur dans l’établissement. »

Le gouvernement québécois aimerait bien que l’obéissance à ces consignes sanitaires rentre dans les mœurs, indépendamment de ce que les décrets et les arrêtés gouvernementaux exigent de la population, soit que cette dernière ait été dressée au point de se conformer à ces consignes de sa propre initiative, puisqu’elles seraient une sorte d’obligation morale ; soit que les employeurs et les comités de santé et de sécurité au travail (peut-être avec l’appui de la CNESST) imposent ces consignes aux employés en faisant comme si elles étaient des obligations et non des recommandations, ou en déclarant qu’elles sont des obligations dans les milieux de travail qu’ils contrôlent, en sachant très bien que, pour le gouvernement, ce sont seulement des recommandations.

En réalité, nous n’avons pas à attendre jusqu’au 1er janvier 2023 pour ne pas nous conformer à ces consignes. Elles ne s’appuient sur rien d’autre que les déclarations publiques de quelques membres du gouvernement et du directeur national de la Santé publique.


Enfin, nous devons nous demander ce que notre gouvernement nous réserve après le 31 décembre 2022. Il est probable que, comme les années précédentes, il s’agitera sous prétexte que le système hospitalier serait sur le point de s’effondrer, ce qui serait causé par les festivités de fin d’année, bien sûr.

À partir de là, que fera-t-il ? Se contentera-t-il de nous exhorter à éviter autant que possible les relations sociales et les lieux publics et à y porter un masque ? Ou essaiera-t-il de nous obliger à nouveau de porter un masque dans les lieux publics, au travail et dans les établissements d’enseignement, et peut-être aussi de nous reconfiner, tous ou seulement si notre « vaccination » n’est pas à jour ? Pour ce faire, invoquera-t-il à nouveau l’état d’urgence sanitaire pour pouvoir gouverner par décrets et arrêtés, attendant avec impatience que soit passée la date fixée par la Loi visant à mettre fin à l’état d’urgence sanitaire ? Ou bien jugera-t-il qu’il n’en a même pas besoin, la circulation élevée des virus respiratoires pour la santé de la population étant suffisante à ses yeux pour justifier l’exercice arbitraire du pouvoir dans la nouvelle normalité, en vertu de l’application normale de la Loi sur la santé publique ?

Avec les Fêtes de fin d’année qui approchent, nous devons nous montrer prudents, pas à cause des méchants virus respiratoires, mais plutôt parce que notre gouvernement est peut-être en train de nous préparer un autre sale coup, en comptant sur la complicité des rhinocéros bornés que nous avons le malheur d’avoir comme concitoyens. Ainsi devons-nous montrer ostensiblement que nous n’avons rien à faire ce que nous racontent les autorités politiques et sanitaires, nos employeurs et nos collègues intellectuellement et moralement diminués. Et surtout, nous ne devons pas aller nous faire injecter une autre dose de merveilleux vaccin, car le nombre de doses injectées est utilisé par le gouvernement comme indicateur pour évaluer notre crédulité et notre docilité (voir le billet du 10 juillet 2022).