Effets moraux de la campagne de vaccination massive – partie 2

Je continue ici la réflexion commencée dans un billet précédent à propos des effets moraux de la vaccination massive. Je rappelle qu’il s’agit d’analyser des effets moraux de la campagne de vaccination massive, qui sont favorisés par des sentiments déjà présents avant la « crise sanitaire » et cette campagne, qui renforcent ces sentiments ou qui se combinent avec eux. Et contrairement à ce que laissent entendre les discours moralisateurs grâce auxquels on fait la promotion de la vaccination de toute la population, les changements moraux que produit cette campagne ne sont pas bénéfiques pour les individus et pour la société

 

Altruisme non réfléchi et culpabilisation de bas étage

L’une des manières d’obtenir que les jeunes adultes et les adolescents consentent à être vaccinés consiste à faire la promotion de la vaccination dite altruiste. Il ne s’agit pas, pour toutes ces personnes, de se faire vacciner pour se protéger contre le virus. Ou du moins ce n’est pas la principale raison puisqu’elles sont peu à risque d’avoir des complications et de mourir en cas d’infection. Non, il s’agit de se faire vacciner pour protéger les personnes à risque, même si elles sont vaccinées dans une forte proportion et même si on dit que les vaccins sont très efficaces pour elles. Cet appel à la gentillesse dispense de tenir compte du fait que l’on reconnaît ne pas savoir si le vaccin a un effet sur la propagation du virus et de vérifier s’il est scientifiquement prouvé que les personnes asymptomatiques, plus particulièrement les jeunes, sont responsables d’une partie significative de la propagation du virus. En fait, c’est qu’on se soucie assez peu des effets véritables de la vaccination pour les autres personnes. Il ne s’agit pas d’accepter de se faire vacciner parce que cela aurait véritablement des effets souhaitables pour les autres, mais parce qu’on trouve que c’est gentil de le faire. Ou encore : on accepte de se faire vacciner parce que c’est gentil et que ce qui est gentil a forcément de bons effets. Ou encore : on accepte de se faire vacciner parce que l’on croit que cela a de bons effets pour les autres afin de croire que l’on est gentil quand on se fait vacciner.

À l’inverse, on essaie de nous faire sentir coupables si nous ne voulons pas nous faire vacciner par altruisme. Nous serions de méchants égoïstes qui, en refusant de se faire vacciner parce qu’ils ne sont pas des personnes à risque, mettraient en danger la santé et la vie des personnes à risque et qui pourraient provoquer une « quatrième vague ». Cela a assez peu d’importance de savoir si ce sont là des effets vraisemblables du refus de se faire vacciner. Ce qu’il faut éviter, en prenant le vaccin, c’est de passer pour une mauvaise personne aux yeux des autres et à nos propres yeux et de nous sentir coupables.

On conviendra que si nous nous laissons manipuler de cette manière, les sentiments et les attitudes morales que cela développe chez nous nous empêchent d’analyser intelligemment les avantages et les inconvénients de nos actes et des décisions qu’on prend à notre place. Nous nous faisons mener par le bout du nez comme des enfants. Ou nous nous illusionnons nous-mêmes. Ce qui ne s’applique pas seulement au cas de la vaccination contre le COVID-19, mais aussi à toutes sortes de situations qui nous concernent individuellement ou en tant que société. Ce qui est aggravé par le fait que l’on a cultivé chez nous de longue date d’autres sentiments et attitudes morales semblables, bien avant la « pandémie ».

À cet égard, les campagnes de charité sont intéressantes. Bien qu’elles soient, depuis plusieurs décennies au Québec, principalement organisées par des organismes de bienfaisance laïcs et de grandes entreprises, ces campagnes sont sans doute le prolongement des bonnes œuvres chrétiennes pour aider les pauvres et les malades, par exemple. Prenons l’exemple des collectes de denrées organisées par les médias et les grandes chaînes de supermarchés en vue de la période des Fêtes. Quand nous allons faire nos courses, on nous sollicite avec insistance à l’entrée, aux caisses et en sortant, sans compter les affiches et les messages promotionnels, pour que nous donnions quelques dollars ou quelques boîtes de conserve pour les familles pauvres. Ça n’a pas besoin d’être grand-chose, nous dit-on : c’est l’intention qui compte. Si nous donnons quelque chose, ça va permettre aux familles pauvres de passer un bon réveillon, ça va permettre aux enfants pauvres de manger à leur faim, etc. Si nous acceptons, on nous remercie, on nous fait sentir que nous sommes de bonnes personnes et que nous avons bon cœur. Sinon, on nous regarde de travers et on se permet parfois d’insister et on joue sur notre culpabilité pour essayer de nous faire changer d’idée. Et c’est comme ça chaque fois que nous allons au supermarché, tant que dure la campagne de charité. Que nous tirions nous-mêmes le diable par la queue, par exemple parce que nous sommes un étudiant de troisième cycle sans le sou qui saute parfois des repas pour essayer de ne pas manquer d’argent jusqu’à la soutenance de sa thèse et pour ne pas avoir besoin de la charité des autres pour subsister, cela n’a pas la moindre importance. On nous travaille comme si nous étions des richards à l’abri de la pauvreté. L’important, c’est de faire une bonne action. Cette bonne action ne résoudra pas le problème de la pauvreté, mais en atténuera seulement un petit peu les symptômes. Encore une fois, ce n’est pas important. L’important, c’est le geste, c’est l’intention. C’est comme si la charité avait principalement pour effet le contentement moral des personnes qui donnent, même s’il n’en résulte pas une amélioration significative de la situation des pauvres. La charité a donc besoin de la misère. Rien d’étonnant à ce que les organisateurs de ces campagnes de charité ne fassent rien pour changer la situation, qui leur permet une fois par an d’acquérir un certain capital moral en collectant les dons des autres, alors que les propriétaires des supermarchés pourraient certainement diminuer leur marge de profit pour réduire le prix de la nourriture (ce qui améliorait significativement la qualité de vie des pauvres), alors que les propriétaires des médias pourraient utiliser les puissants moyens de communication dont ils disposent pour promouvoir la recherche d’une solution politique à la pauvreté, au lieu de saboter de telles solutions.

Revenons-en à la vaccination dite altruiste pour laquelle on fait actuellement campagne. En tirant profit du contentement moral individuel et collectif (notre gouvernement a déclaré que le Québec a de quoi être fier : il serait l’État qui a le plus haut taux de premières doses de vaccin administrées – hourra !) et en nous culpabilisant si nous sommes réticents à nous faire vacciner, on ne pense pas le moins du monde à l’utilité de la vaccination des biens-portants pour une maladie qui ne constituent pas une menace pour eux. Tout ce qui devrait compter, pour nous, c’est d’être de bonnes personnes contentes d’elles-mêmes parce qu’elles se sont fait vacciner. Tout ce qui compte, pour notre gouvernement, c’est d’atteindre les objectifs vaccinaux. Tout ce qui compte, pour l’industrie pharmaceutique, c’est de vendre le plus de doses de vaccin possible. Et on ne se soucie pas qu’en nous injectant des vaccins expérimentaux dont les effets secondaires à moyen et à long terme sont inconnus, on risque de rendre plusieurs d’entre nous gravement malades, de faire d’eux un fardeau pour la société et pour leurs proches, dans un contexte où les finances de l’État sont très mal en point, mais qu’il faudra soigner par charité, d’autant plus qu’ils se sont sacrifiés par altruisme. Ce qui permettra à nos services de santé de satisfaire leurs visées expansionnistes et à l’industrie pharmaceutique de faire d’autres profits, car seulement 1 % de 7 millions de personnes vaccinées qui auraient de sérieux problèmes de santé, c’est en fait 70 000 personnes à soigner ; 2 %, 140 000 personnes ; 5 %, 350 000 personnes ; etc.

Que ce scénario pessimiste se réalise ou non (je ne fais pas partie de ceux qui prétendent qu’il se produira nécessairement des effets secondaires catastrophiques parce qu’une nouvelle technologie est utilisée dans ces vaccins, je crois seulement que cela est possible et que nous aurions intérêt à être beaucoup plus prudents) –, cela ne change presque rien quant au renforcement de cet altruisme non réfléchi et du sentiment de culpabilité. Dans le deuxième cas, nous serons encore plus disposés à accepter facilement d’autres choses dont les bénéfices sont imaginaires pour beaucoup d’entre nous et dont les inconvénients seraient à tort jugés insignifiants, ce qui pourrait dégrader sérieusement non seulement notre santé, mais nos conditions de vie prises dans un sens large, ce qui ne comprend pas seulement notre situation économique, mais toutes nos conditions d’existence. Dans le premier cas, nos autorités et l’industrie pharmaceutique s’efforcera de minimiser les effets indésirables causés par la vaccination massive de la population bien-portante (ce n’est pas comme si cela ne s’était jamais fait pour des médicaments) et justifiera ce qui restera en le présentant comme un sacrifice altruiste nécessaire, ce qui disposera beaucoup d’entre nous à prendre de nouveau des risques inconsidérés, comme dans le deuxième cas. Bref, nous nous laisserons vraisemblablement rouler dans la farine dans les deux cas, tant cet altruisme béat nous rend incapables de défendre nos intérêts, en tant qu’individus et citoyens.

 

Esprit de troupeau

Notre gouvernement compte beaucoup sur l’esprit de troupeau pour atteindre et dépasser les objectifs vaccinaux. Et les médias, qui parlent de moins en moins de la situation épidémiologique, lui donnent sans doute un bon coup de main en diffusant quotidiennement les statistiques de vaccination. Plus on dira que les Québécois, surtout les jeunes adultes, vont se faire vacciner en masse, plus on se dit que ceux qui hésitent suivront et se feront bientôt vacciner. Et on n’a pas tort : cela fonctionne. Même ceux qui craignent les effets secondaires en viennent à aller se faire vacciner pour être normal, pour être comme les autres, pour faire partie du grand club des vaccinés et ne pas faire partie de la minorité qui résiste à la vaccination. L’esprit de troupeau est tellement fort qu’ils se disent que toutes ces personnes ne peuvent pas se tromper et que ça ne peut pas tourner mal pour elles, qui sont si nombreuses. Ou si cela arrive, ils semblent se dire confusément qu’au moins, ils seront tous dans le même bateau, c’est-à-dire qu’au moins ils seront malades ensemble ou qu’ils auront des chances de tomber malades ensemble, ce qui est une drôle de forme de solidarité. Ainsi, sous prétexte d’atteindre l’immunité « de troupeau » (herd immunity en anglais), on tire profit de l’esprit de troupeau déjà bien présent chez les Québécois et, ce faisant, on le cultive.

L’utilisation qu’on fait présentement des statistiques de vaccination s’apparente à celle qu’on fait depuis longtemps des résultats de sondages sur les intentions de vote ou sur une politique controversée, qui sont diffusés par les médias. Car le but de ces sondages n’est pas seulement ou surtout de connaître avec précision les opinions de la population, mais plutôt d’exercer une influence sur elle en divulguant avec adresse les résultats. Je ne sais pas dans quelle mesure les sondages comportent d’importants défauts de conception (volontaires ou involontaires) et dans quelle mesure les résultats sont falsifiés, mais il est plausible que cela se produise assez souvent. Quoi qu’il en soit, les médias sont libres de ne pas diffuser les résultats d’un sondage (fait par elles ou des firmes spécialisées) qui ne leur conviennent pas. Et dans le cas où les résultats peuvent servir pour influencer l’opinion dans le sens voulu, la manière de les présenter est importante pour donner l’impression que la majorité est plus grande qu’elle ne l’est en réalité (il est alors d’autant plus important de se rallier à elle), et que c’est elle qui a raison, notamment en accordant des caractéristiques positives à la majorité (ce sont des personnes bonnes et raisonnables) et des caractéristiques négatives à la minorité (ce sont des personnes violentes et stupides). Si bien qu’une partie de la minorité hésitera à exposer et à défendre ses opinions contre celles de ce qui passe pour la majorité, pour éviter la réprobation et les pressions de cette dernière. Les plus faibles en viennent parfois même à renier leurs opinions et à se joindre à la majorité, afin de se dissocier de cette minorité peu respectable. Les hésitants agissent souvent de la même manière. Et c’est ainsi qu’en utilisant l’esprit de troupeau, on peut influencer les résultats d’une élection ou faire accepter une politique du gouvernement, par exemple.

Donc, en ne cessant de répéter, dans les points de presse et dans les médias, que la population va se faire vacciner en masse et que la couverture vaccinale augmente rapidement, en minimisant l’importance statistique de la minorité qui est réticente à se faire vacciner ou qui le refuse, en affirmant qu’elle est essentiellement composée de complotistes stupides, mal informés, sous-scolarisés, édentés, à moitié fous et liés à des groupes radicaux d’extrême-droite, on use de sentiments et de techniques de manipulation déjà bien connus pour rallier une partie de la minorité à la majorité et pour marginaliser le reste. Et du même coup on renforce la cohésion de la majorité.

En cultivant l’esprit de troupeau dans la population pour qu’elle se fasse vacciner massivement, on réduit assurément sa capacité à juger adéquatement des causes et des effets véritables de ce qui se produit dans la société, tant ce que doit sentir et penser le troupeau est fort et imprègne les idées et les sentiments. On peut s’attendre à l’aveuglement le plus têtu et le plus fou, tant les membres du troupeau ont l’impression qu’ils sont incontestablement dans le vrai et dans le juste, tant ils ont l’impression que les autres sont irrémédiablement dans l’erreur et dans l’immoralité.

Par exemple, imaginons que les vaccins expérimentaux que la majorité a accepté de se faire injecter – alors que leur efficacité et leur sécurité sont douteuses – bousillent en réalité le système immunitaire ou encore qu’ils favorisent l’apparition de nouveaux variants contre lesquels ils sont inefficaces ou contre lesquels l’industrie pharmaceutique dira qu’ils sont inefficaces pour nous vendre d’autres vaccins. Il est à craindre que la faute retombera sur les épaules des non-vaccinés. Ce seraient eux qui transmettraient le virus aux personnes vaccinées, qui parfois tombent malades et meurent. Ou encore ce serait leur organisme non immunisé qui servirait de terroir propice à l’apparition des nouveaux variants.

Et comme la crise actuelle est certainement plus politique que sanitaire, il est à craindre qu’on utilise l’esprit de troupeau – cultivé assidûment par le gouvernement et les journalistes depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire – pour censurer et réprimer les voix dissidentes en matière de politique encore plus qu’avant. C’est d’ailleurs déjà commencé. Ce qui ne laisse augurer rien de bon pour le débat public qui est une condition nécessaire de la démocratie.

 

Abandon corps et âme aux professionnels de la santé et aux autres experts

Il est impressionnant de voir avec quelle facilité la majorité de la population québécoise accepte de se prêter à cette expérience médicale à grande échelle. Car c’est ce dont il s’agit avec ces vaccins, dont l’utilisation d’urgence a été approuvée après des essais cliniques réalisés en vitesse par les sociétés pharmaceutiques, qui n’ont d’ailleurs pas rendu publiques toutes les données recueillies et qui ont été accusées d’avoir trafiqué les résultats (cela se fait régulièrement dans l’industrie pharmaceutique) par des chercheurs, aussi bien en ce qui concerne l’efficacité des vaccins que de leur sécurité. Ce n’est pas pour rien que les essais cliniques se terminent seulement en 2022, en 2023 ou 2024, selon les vaccins. Et pourtant les autorités politiques et sanitaires, les journalistes et les représentants des sociétés pharmaceutiques nous disent qu’il a déjà été prouvé scientifiquement que les vaccins sont efficaces et sécuritaires et que les bénéfices de la vaccination sont beaucoup plus grands que les risques. Et pourtant la population accepte de se faire injecter ces produits pharmaceutiques en se fiant seulement à la parole de ces personnes, dont l’intégrité est discutable. Beaucoup ne savent presque rien des nouvelles technologies qui sont utilisées dans ces vaccins. Les autres en ont une certaine idée, mais ne se demandent pas sérieusement quels risques cela peut avoir, ne sont pas assez curieux et ne se soucient pas assez de leur propre intérêt pour faire des recherches, et se contentent de croire et de répéter que les vaccins sont efficaces et sécuritaires. Leur confiance en les experts autorisés et en ceux qui reprennent leurs propos est si grande qu’ils sont convaincus qu’un vaccin expérimental est un vaccin comme les autres, et qu’une autorisation d’utilisation d’urgence est une autorisation d’utilisation comme les autres. Si au moins il s’agissait de participer en connaissance de cause à une expérience rigoureuse devant vraiment servir au progrès la médecine ! Mais non : compte tenu qu’on refuse de reconnaître que c’est bien d’une expérience qu’il s’agit, compte tenu aussi de l’importance des intérêts économiques de l’industrie pharmaceutiques, il n’est même pas juste de dire que les personnes qui se font vacciner sont les cobayes d’une expérience scientifique en bonne et due forme, puisqu’on ne saurait remettre en question l’efficacité et la sécurité des vaccins (c’est déjà prouvé), puisqu’on attribue automatiquement l’amélioration de la situation épidémiologique à l’efficacité des vaccins, puisqu’on ne se donne pas la peine d’assurer une pharmacovigilance digne de ce nom. Ce qui veut dire que les personnes vaccinées ou qui sont sur le point de l’être s’abandonnent corps et âme aux professionnels de la santé et aux experts autorisés. Ils acceptent de remettre leur vie entre leurs mains, avec une confiance puérile. Un peu comme des fidèles bien dociles s’abandonnent aux prêtres pour assurer leur salut.

Revenons un peu en arrière pour nous intéresser à la campagne de dépistage massif qui a précédé la campagne de vaccination massive, et qui se poursuit en parallèle, bien qu’avec un certain ralentissement depuis l’arrivée du printemps. Alors qu’un échantillon de salive aurait pu aussi bien servir pour faire les tests de dépistage, nos autorités sanitaires ont décidé qu’il faut plutôt un échantillon provenant de la fosse nasale, ce qui rend les tests de dépistage beaucoup plus invasifs. Cela n’est peut-être pas gratuit, comme ne le serait probablement pas la décision de prendre la température des malades en leur mettant un thermomètre dans le rectum plutôt que dans la bouche. Dans les deux cas, cela suppose de se laisser faire et de devenir l’objet de procédures médicales déplaisantes et même la chose du système médical. Autrement dit, cela demande une certaine soumission au personnel médical, ce qui s’avère une très bonne préparation à la campagne de vaccination massive, qui demande elle aussi la soumission au personnel médical. Que le choix d’un test de dépistage plus invasif ait été fait ou non de manière calculée, cela ne change rien à l’affaire. Les effets moraux demeurent les mêmes, quelles que soient les intentions des autorités sanitaires.

Je n’ai jamais passé de test PCR. Mais d’après ce qu’on m’a dit et d’après ce que j’ai vu sur le site du gouvernement, on ne donne pas de rapport de test quand on annonce le résultat. Pas moyen de savoir, par exemple, le nombre de cycles d’amplification. Je suppose que beaucoup de personnes testées n’en ont jamais entendu parler. Ce qui est attendu d’elles, c’est qu’elles s’en remettent au verdict du test (positif ou négatif), un point c’est tout. Peu importe ce qui motive cette manière de faire (par exemple le grand nombre de tests à faire passer et à analyser quotidiennement), elle renforce l’acceptation de l’opacité et la soumission au personnel médical ou même administratif du ministère de la Santé et des Services sociaux. Dans ce cas comme dans celui de la vaccination, c’est la passivité et même l’obéissance qui sont attendues : il faut aller se faire dépister et accepter le verdict sans poser de questions ; il faut aller se faire vacciner et croire que c’est utile et sécuritaire sans poser de questions.

Cette passivité et cette obéissance est, de manière plus générale, caractéristique de notre système de santé. Il n’est pas commun de demander aux médecins d’expliquer longuement leurs diagnostics et de montrer pourquoi les examens médicaux recommandés et les suivis annuels sont utiles pour les patients et pourquoi les médicaments prescrits ont plus de bénéfices que de risques pour eux. Les médecins devraient connaître leur métier et c’est pourquoi il faudrait remettre notre santé entre leurs mains, c’est-à-dire nous fier à eux et accepter les traitements qu’ils nous prescrivent et les examens médicaux qu’ils planifient, pas seulement pour nous faire soigner quand nous sommes malades, mais aussi pour rester en santé. Même si la soumission des « usagers » pris en charge ne s’explique pas par une recherche volontaire et explicite de cette soumission, mais plutôt par le fait qu’elle permet aux médecins de voir plus de patients, d’accomplir plus d’actes médicaux et d’être rémunérés en conséquence, cette soumission a certainement disposé la population à s’abandonner au personnel médical dans le contexte de la « crise sanitaire », et plus particulièrement à consentir presque sans réflexion à l’injection de vaccins expérimentaux dont les bénéfices sont discutables et dont effets secondaires possibles sont mal connus, surtout à moyen et à long terme.

Élargissons maintenant le problème. Une telle soumission, un tel abandon de son autonomie et une telle passivité ne concernent certainement pas seulement la santé en général et plus particulièrement la « crise sanitaire » et la campagne de vaccination massive. Elle s’appuie et elle renforce une tendance semblable à se fier et à s’en remettre aveuglément aux experts dans d’autres domaines, qui nous concernent tous, individuellement et collectivement, par exemple la politique, le droit et l’économie. En effet, beaucoup d’entre nous laissent depuis longtemps les politiciens ou politologues réfléchir à leur place aux questions politiques, laissent les juristes réfléchir à leur place aux questions de droit et laissent les économistes réfléchir à leur place aux questions d’économie. Et cela risque d’être aggravé par la passivité attendue et exigée de nous présentement, ce qui contribue à la dégradation de l’esprit critique des citoyens que nous sommes ou devrions être.

Assurément toutes ces personnes peuvent acquérir une certaine expertise dans leur domaine. Mais nous ne devons pas nous en remettre aveuglément à cette expertise et les laisser décider de toutes ces questions sans intervenir. Car les experts sont comme nous des êtres humains susceptibles de se tromper. Car ils peuvent avoir des intérêts qui sont contraires aux nôtres. Il n’est pas sage de nous en remettre à eux entièrement en ces matières, et à les considérer comme plus que des conseillers dont il faut examiner soigneusement les avis. Le contraire revient à remettre notre existence entre leurs mains, sans examiner les effets des décisions qu’ils pourraient prendre et des recommandations qu’ils pourraient faire. Cela pourrait nous coûter cher, au sens propre et au sens figuré.

C’est ce qui semble se produire pour la question du passeport vaccinal, dont les enjeux sanitaires, éthiques, politiques et juridiques sont nombreux, et dont les conséquences possibles pour notre vie et notre société le sont tout autant. Pourtant la majorité d’entre nous ne discute pas cette question, ne daigne même pas y réfléchir, et préfère s’en remettre aux experts autorisés pour décider derrière des portes closes ce qu’il faut faire, pour enfin accepter passivement la décision qui aura été prise, et dont on peut craindre qu’elle soit tout sauf avantageuse pour nous, y compris pour les personnes vaccinées.

***

Il est indéniable que la campagne de vaccination massive en particulier, et la « crise sanitaire » de manière plus générale, n’ont pas seulement des effets sanitaires, mais qu’elles ont aussi de graves effets moraux, d’autant plus graves qu’ils s’appuient sur des sentiments et des attitudes morales enracinés depuis longtemps en nous et dans notre société, lesquels sont du même coup renforcés. Et ces effets moraux ne disparaîtront pas comme de la fumée quand sera terminée l’actuelle campagne de vaccination massive, et pourraient être aggravés par l’organisation d’autres campagnes de vaccination massive, l’hiver prochain pour nous injecter des doses de rappel, et peut-être les hivers suivants pour nous injecter de nouveaux vaccins contre les nouveaux variants. Il serait donc sage de compter ces effets moraux parmi les inconvénients ou les risques de la campagne de vaccination massive en cours, et de celles qui sont peut-être à venir. Ce que ne font pas les autorités politiques et sanitaires, les experts autorisés et les journalistes. Et ce qui est aussi un autre inconvénient de cette campagne de vaccination massive et des autres qui sont peut-être à venir.

Comme ces effets moraux sont certainement mauvais pour nous, comme ils nous privent de l’autonomie morale et intellectuelle nécessaire pour contrôler notre vie et ne pas être des citoyens en nom seulement, en aucun cas nous ne pouvons voir en eux une réforme morale désirable dont la pandémie serait l’occasion. Il est important de combattre ces effets, car le gouvernement, les experts et les journalistes continueront certainement à tirer profit d’eux pour que nous consentions à ce qu’ils attendent de nous et pour consolider leur pouvoir sur nous. Pour ce faire, il ne suffit pas de revenir en arrière, dans la « normalité d’avant », qu’on peut considérer comme la période préparatoire de la crise actuelle, et qui pourrait être la période préparatoire d’autres crises semblables. Ce qu’il faut viser, ce n’est donc pas une simple annulation des effets moraux de la crise actuelle et de leurs répercussions sur l’ensemble de notre vie et de notre société ; c’est plutôt de produire d’autres transformations morales capables d’avoir des effets plus désirables sur nos institutions, ce qui pourrait avoir en retour des effets moraux désirables sur nous.

Ce n’est pas facile, j’en conviens. Et le temps presse.