Une sortie de crise qui n’en est pas une

Dans son article « On s’en va dans le mur » (La Presse, 7 avril 2021), Isabelle Hachey fait un nouveau pas dans la promotion de la solution « vaccinale ». Je ne saurais dire si son article a été écrit de bonne foi, ou si elle suit simplement la ligne éditoriale de son employeur, résolument en faveur de la « vaccination » de toute la population, ou si elle suit la ligne éditoriale de son employeur en croyant de bonne foi servir la vérité et les intérêts de l’humanité. Mais je n’ai pas la prétention de sonder les cœurs. Je m’intéresserai seulement aux affirmations péremptoires faites ou rapportées par cette journaliste qui travaille depuis 23 ans à La Presse, et qui devrait bien connaître son métier.

Après s’être un peu défoulée contre le propriétaire de gym qui serait responsable de 193 cas de COVID-19 qui devrait être l’objet de tout notre mépris et de toute notre exaspération (comme l’ont fait aussi plusieurs membres de la grande confrérie des journalistes), et s’être plainte du peu d’enthousiasme des Québécois à se faire « vacciner » pendant le congé de Pâques (assurément parce qu’ils étaient trop occupés à manger du jambon, selon elle), alors qu’on nous répète « que nous nous sommes engagés dans une course contre la montre, que seul le vaccin peut nous sortir, enfin, de cette satanée épidémie (c’est certainement vrai parce qu’on nous le répète, puisqu’assurément on nous le répète parce c’est vrai), madame Hachey nous exhorte à prendre un peu de recul et à adopter une vue d’ensemble. Mais quel recul ! Mais quelle vue d’ensemble !

« Nous constaterons que ces ratés, aussi enrageants soient-ils, sont les arbres qui cachent une forêt bien plus désespérante. Le Québec ne sera pas entièrement sorti de ce bois-là quand tous les Québécois seront vaccinés, comme on le croyait.

En fait, nous ne pourrons pas vraiment reprendre nos vies là où nous les avons laissées il y a un an avant que tout le monde soit immunisé. Le monde entier, je veux dire. »

Voilà une affirmation radicale qui certes mériterait d’être appuyée sur des recherches scientifiques indépendantes et rigoureuses, et passer librement et ouvertement au crible par de nombreux scientifiques, sans que les autorités politiques et sanitaires et les journalistes n’entravent la liberté de recherche et de discussion et cherchent à imposer des vérités préétablies.

Madame Hachey nous cite plutôt le secrétaire d’État américain Tony Blinken pour étayer son propos :

« Même en vaccinant demain les 332 millions de personnes aux États-Unis, nous ne serions toujours pas totalement à l’abri du virus, a déclaré le chef de la diplomatie américaine. Pas tant qu’il se reproduira dans le monde et qu’il se transformera en variants qui pourraient facilement se propager à nouveau dans nos communautés, et pas si nous voulons rouvrir complètement notre économie et recommencer à voyager.

Cette pandémie ne s’arrêtera pas chez nous tant qu’elle ne s’arrêtera pas dans le monde entier. »

Et la journaliste de conclure en disant que c’est infiniment décourageant. Je dirais plutôt que c’est infiniment suspect.

D’abord, l’intégrité morale des secrétaires d’État américains (qu’ils soient républicains ou démocrates) est pour le moins dire fort douteuse. Assurément ils ne se soucient pas du bien-être des populations étrangères qui souffrent des invasions militaires ou des guerres civiles qu’ils provoquent, des sanctions économiques qu’ils imposent et des coups d’État qu’ils fomentent. Demandez aux Serbes, aux Afghans, aux Irakiens et aux Syriens, après la destruction de leur pays, si les beaux discours humanitaires américains ne sont pas que du vent. Quant aux citoyens américains, la politique étrangère élaborée par la classe dirigeante leur a-t-elle jamais été utile, bien qu’on prétende agir pour la sécurité nationale des États-Unis ?

Ensuite pourquoi un secrétaire d’État se mêle-t-il de « vaccination » et de contrôle de la « pandémie » alors qu’il est responsable de la politique étrangère et des relations internationales des États-Unis ? En quoi cela le concerne-t-il ? Ne devrait-il pas en avoir plein les bras avec la diplomatie américaine ? À moins qu’il s’agisse de faire de la « vaccination » de la population mondiale et du contrôle de la « pandémie » à l’échelle planétaire un objectif de la politique étrangère américaine, comme l’est la lutte contre le terrorisme et contre l’influence des États-voyous, avec les résultats qu’on connaît. Ce qui ne laisserait assurément présagé rien de bon. Imaginez le gouvernement américain se mêler de la politique sanitaire des autres États, en les contraignant à accepter les « vaccins » américains ou européens et à maintenir et durcir les mesures sanitaires, sous prétexte de protéger la santé de la population américaine et aussi celle de la population mondiale. Vraiment, ça serait du joli ! Une autre manière de jouer aux gendarmes du monde sous le couvert d’une grande œuvre philanthropique…

Enfin suivent les habituelles craintes sur l’apparition de nouveaux variants plus contagieux et peut-être plus mortels contre lesquels les « vaccins » actuels ne seraient pas efficaces :

« Pour le moment, les vaccins semblent efficaces contre ces variants. Le plus grand danger, craignent les scientifiques, c’est que les futures mutations, plus coriaces, résistent à la réponse immunitaire que produisent les vaccins.

Autrement dit, accélérer la cadence de vaccination au Québec, au Canada, aux États-Unis ou en Europe risque de ne mener à rien si on laisse au virus l’occasion de muter dans de larges poches de populations non protégées. »

Aussi bien dans cet article de journal que dans l’appel urgent à l’action lancé par un groupe d’experts auquel on fait référence, la question de savoir si les « vaccins » diminuent la propagation du Virus  (en plus de réduire la fréquence des complications et des décès) et seraient donc efficaces pour empêcher l’apparition de nouveaux variants n’est pas abordée de face, même si on prétend depuis quelques semaines que des études auraient montré que c’est le cas, alors que les sociétés pharmaceutiques nous disaient initialement que ce n’était pas le cas. Mais on semble supposer que c’est le cas, puisque ces experts recommandent de rendre accessibles les « vaccins » prioritairement aux régions du monde où le Virus circule le plus pour diminuer le risque d’apparition de nouveaux variants encore plus terribles que les variants actuels, eux-mêmes plus terribles que le Virus original :

« L’accès équitable aux vaccins, à l’échelle mondiale, est elle aussi essentiel. Les pays riches devraient appuyer des mécanismes multilatéraux comme le programme COVAX, faire don de leurs excédents de vaccins aux pays moins riches et soutenir l’augmentation de la production vaccinale.

Dans le but d’empêcher l’apparition de nouveaux variants préoccupants, il sera peut-être nécessaire de prioriser les pays ou les régions avec les taux de prévalence et de transmission de la maladie les plus élevés, où les risques d’apparition de tels variants sont les plus élevés »

(« Global equity in vaccine access is vital too. High-income countries should support multilateral mechanisms such as the COVAX facility, donate excess vaccines to low- and middle- income countries, and support increased vaccine production.

However, to prevent the emergence of viral variants of concern, it may be necessary to prioritise countries or regions with the highest disease prevalence and transmission levels, where the risk of such variants emerging is greatest. »)

Cependant on ne cesse de nous rappeler que les « vaccins », qui devaient être notre planche de salut et mettre fin aux mesures sanitaires, ne sauraient suffire pour réduire au minimum la transmission du Virus et les risques d’apparition de nouveaux variants « préoccupants » :

« Pour ces raisons, la diminution de la transmission communautaire est essentielle. Aucune action ne suffit à elle seule pour empêcher la propagation du virus. Nous devons maintenir des mesures de santé publique fortes en tandem avec des campagnes de vaccination dans tous les pays. [...]

Chaque fois que le virus se réplique, une mutation peut se produire. Comme on a pu le constater partout dans le monde, les vaccins risquent d’être moins efficaces contre certains de ces variants.

C’est pourquoi nous réclamons une stratégie globale de « suppression maximum ».

Les chefs de la santé publique devraient se concentrer sur des mesures qui diminuent au maximum les taux d’infection, contribuant ainsi à prévenir l’apparition de nouvelles mutations susceptibles de devenir des variants préoccupants.

La vaccination rapide ne suffit pas à atteindre cet objectif. La perpétuation de mesures sanitaires comme le port du couvre-visage et la distanciation physique sont elles aussi essentielles. La ventilation des lieux fermés l’est aussi, laquelle est dans certains cas possible actuellement, alors que dans d’autres cas des modifications devront être apportées aux édifices. »

(« For these reasons, reducing community transmission is vital. No single action is sufficient to prevent the virus’s spread; we must maintain strong public health measures in tandem with vaccination programs in every country. [...]

Each time the virus replicates, there is an opportunity for a mutation to occur. And as we are already seeing around the world, some of the resulting variants risk eroding the effectiveness of vaccines.

That’s why we have called for a global strategy of “maximum suppression”.

Public health leaders should focus on efforts that maximally suppress viral infection rates, thus helping to prevent the emergence of mutations that can become new variants of concern.

Prompt vaccine rollouts alone will not be enough to achieve this; continued public health measures, such as face masks and physical distancing, will be vital too. Ventilation of indoor spaces is important, some of which is under people’s control, some of which will require adjustments to buildings. »)

Bref, la stratégie de la « suppression maximale » consiste à imposer le port du masque (où, quand, dans quelles circonstances exactement ?) et la distanciation sociale à toute l’humanité, en plus de la « vacciner », pour réduire au minimum la transmission communautaire du Virus et empêcher l’apparition de nouveaux « variants » peut-être encore plus terribles.

On peut se demander si cet objectif est atteignable. Cela reviendrait à subordonner les politiques sanitaires de tous les pays à des pays qui parviendraient à s’imposer comme des leaders internationaux en matière de lutte à mort contre le Virus, ou à les subordonner à des entités supranationales, avec la perte de souveraineté que cela implique dans les deux cas pour les États. Il faut donc s’attendre à de la résistance (à mon avis légitime) de la part de plusieurs pays. Aussi longtemps que toute la population mondiale n’est pas « vaccinée », les experts et les autorités sanitaires brandiront la menace de nouveaux variants plus contagieux et plus dangereux, contre lesquels les « vaccins » pourraient être moins efficaces ou même inefficaces. À leur sens la « pandémie » ne serait pas encore terminée même si la propagation des variants déjà existants et la fréquence des hospitalisations et des décès diminuaient radicalement dans certains pays ou régions du monde. En fixant de telles conditions pour sortir de la crise sanitaire, c’est pratiquement anéantir la possibilité d’une telle sortie de crise et s’engager à la faire dure encore longtemps ou même indéfiniment, du moins si on ne change pas les critères de sortie de crise.

Mais faisons comme si on parvenait à atteindre cet objectif très ambitieux, qui fait sans doute saliver les sociétés pharmaceutiques et les fabricants de masques. Alors que se passerait-il ? Combien de temps devrait durer cette stratégie de la « suppression maximale », combinant la distanciation sociale et l’étiquette respiratoire à des campagnes massives de « vaccination » de toutes les populations de la planète ? Si le Virus et ses variants ne disparaissaient pas définitivement, peut-être jamais. Car les experts et les autorités sanitaires pourraient continuer à nous répéter qu’il faut maintenir certaines mesures sanitaires indéfiniment pour réduire la propagation du Virus et empêcher l’apparition de nouveaux variants plus dangereux contre lesquels nous n’aurions pas d’immunité et qui pourraient provoquer une nouvelle « pandémie » si nous nous relâchons un peu. Sans compter que nous devrions peut-être être « vaccinés » une fois par an (par exemple) sous prétexte de conserver notre immunité collective et de réduire la propagation du Virus. Et c’est cet état de choses qu’il faudrait faire durer sur toute la planète, sans quoi le Virus pourrait recommencer à circuler et à se répliquer, ce qui induirait un risque accru d’apparition de nouveaux variants contre lesquels les « vaccins » ne seraient pas efficaces. Voilà la nouvelle normalité, peut-être chimérique, à laquelle devraient nous mener les actuelles campagnes de « vaccination » et la stratégie de la « suppression maximale » dans laquelle elles s’inscrivent.

Ainsi il importe de nous demander si nous voulons de cette nouvelle normalité qu’on nous présente comme une sortie de crise, mais qui est en fait une pérennisation de la crise, laquelle demanderait une vigilance soutenue de la part des populations et des autorités, afin que l’immunité « vaccinale » soit maintenue et que les mesures sanitaires soient respectées, ce qui est tout à fait compatible avec l’entrée en vigueur d’un passeport « vaccinal » pour contrôler l’état de santé et les déplacements de la population.

La solution « vaccinale » nous mènerait donc à une impasse, que ces experts disent vrai, qu’on croie qu’ils disent vrai ou qu’on fasse semblant de croire qu’ils disent vrai. D’où l’importance de réévaluer l’utilisation de traitements ciblés (peu coûteux et faciles à administrer) des personnes dès les premiers symptômes, lesquels ont été abandonnés au profit des « vaccins » censés être notre seule planche de salut, mais dont on nous dit maintenant qu’ils mettraient fin à la pandémie seulement une fois que toute l’humanité serait « vaccinée », ce qui impliquerait vraisemblablement aussi le maintien de certaines mesures sanitaires indéfiniment et la préparation d’une deuxième campagne de « vaccination » mondiale contre de nouveaux variants, voire d’une troisième, d’une quatrième, etc.