Transposition des techniques de manipulation sanitaires dans le domaine de la sécurité

Pour les gouvernements occidentaux, tous les prétextes sont bons pour accroître la surveillance et le contrôle des citoyens. Nous l’avons bien vu avec les mesures soi-disant sanitaires mises en place au printemps 2020, auxquelles on a en grande partie mis fin deux ans plus tard, mais qu’on pourrait réactiver sous une forme plus ou moins abusive, puisque les organisations de santé publique internationales et nationales n’ont toujours pas déclaré la fin de la fameuse pandémie et ne daignent pas nous dire ce qu’il faudrait pour qu’on puisse enfin considérer qu’elle est terminée, puisqu’elles peuvent annoncer l’apparition d’un nouveau variant préoccupant pour essayer de nous reconfiner, de nous obliger à nouveau à porter un masque dans les lieux publics et de réimposer l’usage du passeport vaccinal. Ces mesures soi-disant sanitaires sont un prolongement des mesures sécuritaires imposées à la suite des attentats du World Trade Center en 2001, lesquelles ont depuis proliféré, chaque attentat ou chaque massacre qu’on n’a pas réussi à empêcher grâce aux dispositifs sécuritaires déjà en place étant une opportunité pour imposer plus de dispositifs de la même espèce. Dans le cas des mesures soi-disant sanitaires, chaque nouvelle « vague » et même la crainte d’une nouvelle « vague » ont servi de prétextes pour prolonger ou radicaliser les mesures soi-disant sanitaires. Les autorités politiques et sanitaires se sont bien gardées de remettre en question l’efficacité de ces mesures. Pour venir à bout du méchant virus que les mesures soi-disant sanitaires et les miraculeux vaccins n’ont pas encore réussi à vaincre, il faudrait encore plus de mesures sanitaires et de miraculeux vaccins. Il est donc clair qu’on s’est inspiré jusqu’à un certain point du recours aux mesures strictement sécuritaires quand on a eu recours aux mesures soi-disant sanitaires. C’est le même esprit.

Dès 2020, plusieurs critiques des mesures soi-disant sanitaires ont compris qu’elles étaient le prolongement des dispositifs sécuritaires mis en place depuis une vingtaine d’années, et que les autorités politiques et sanitaires et les médias de masse ont repris et adaptés des techniques de manipulation de l’opinion déjà utilisées pour imposer ces dispositifs sécuritaires. Depuis, cette idée s’est répandue et est connue de presque tous ceux qui s’opposent avec fermeté et cohérence aux mesures soi-disant sanitaires. Ce qui est moins fréquent, c’est d’examiner de quelle manière ce qui est caractéristique des techniques de manipulation sanitaires pourrait être en retour utilisé pour imposer de nouveaux dispositifs sécuritaires. Les récentes avancées dans la conception, l’utilisation et la légalisation des technologies de surveillance automatisée seront probablement le terrain sur lequel se fera cette transposition.

Pour ne pas trop m’étendre en parlant de dispositifs sécuritaires différents, je m’en tiendrai ici à la vidéosurveillance algorithmique (VSA), dont l’utilisation vient d’être approuvée par l’Assemblée nationale française, dans le cadre des Jeux olympiques de 2024, qui se dérouleront à Paris et qui sont vraisemblablement une sorte de « projet pilote » pour l’implantation généralisée de cette technologie.

Je précise d’emblée que je ne veux pas décrire ici le fonctionnement de la vidéosurveillance algorithmique. Ce n’est pas ce qui m’intéresse dans ce billet, et je n’ai pas les connaissances techniques pour en parler intelligemment. Il faudrait que je m’en remette à l’expertise de personnes beaucoup plus compétentes que moi dans le domaine, et je me retrouverais à résumer plus ou moins maladroitement ce qu’elles expliquent mieux elles-mêmes. Je ne vois pas ce que les lecteurs de ce blogue y gagneraient, puisqu’ils sont capables de lire de ce qu’écrivent ces personnes aussi bien que moi. Pour tout ce qui concerne le fonctionnement de la vidéosurveillance algorithmique, je renvoie au dossier de la Quadrature du Net qui a été présenté aux parlementaires français, lesquels n’ont pas compris pas de quoi il est question, ou ne s’en soucient pas le moins du monde. Je prendrai pour ma part seulement les grands principes de la vidéosurveillance algorithmique comme point de départ de ma réflexion.

Ce qui m’intéresse, c’est ce que ce que les propagandistes – des journalistes, des bureaucrates, des spécialistes du marketing, des experts à la solde du gouvernement ou des firmes de vidéosurveillance algorithmique – pourraient faire de la capacité des algorithmes à repérer des comportements ou des objets (essentiellement des personnes) considérés suspects dans les vidéos analysées en direct ou après-coup, et à déclencher des alertes pouvant résulter en des interventions policières ou à l’émission à distance, voire automatisée, de constats d’infraction quand l’identité des contrevenants pourrait être établie, par exemple grâce à la reconnaissance faciale ou à d’autres formes d’identification biométrique ou de traçage des personnes. Il est important de comprendre ce qu’on nous prépare et de nous y préparer. Néanmoins, nous devons nous montrer prudents dans notre tentative d’anticipation. Nous devons éviter de donner aux obsédés de la surveillance et du contrôle des idées qu’ils n’auraient peut-être pas déjà eues en nous montrant plus imaginatifs qu’eux. Ceci dit, nous ne pouvons pas non plus croire que ces obsédés, grassement payés pour trouver de telles idées, n’auront pas les idées que nous nous garderons d’exprimer publiquement. Le problème ne disparaîtra certainement pas parce que nous décidons de garder le silence par crainte de leur donner de mauvaises idées. Il nous faut distinguer ce que nous pouvons dire ouvertement, pour faire connaître les manigances qu’on prépare vraisemblablement et inciter le plus de personnes à s’y préparer ; et ce que nous devons seulement dire en privé, entre opposants, pour ne pas donner de mauvaises idées à ceux qui sont payés pour nous faire de sales coups.

 

La contagiosité des crimes, des délits et des comportements suspects

Ce qui a permis de justifier aux yeux de beaucoup l’imposition de mesures soi-disant sanitaires dès que le méchant virus est supposément arrivé chez nous, c’est la croyance en laquelle on pourrait ainsi empêcher ledit virus, supposément très contagieux, de se propager trop rapidement. On nous aurait confiné à répétition, fait porter des masques, interdit de participer à des rassemblements et même d’avoir des relations sociales, pour empêcher le virus de se répandre comme une traînée de poudre, d’infecter et de rendre malades trop de personnes et de déborder la capacité hospitalière. C’est pourquoi les forces policières devaient surveiller et punir les personnes qui ne respectaient pas rigoureusement ces mesures. C’est pourquoi les bons citoyens avaient le devoir de surveiller l’application de ces mesures par leurs concitoyens et de dénoncer aux forces policières les récalcitrants. C’est pourquoi les journalistes couvraient de boue les récalcitrants. C’est pourquoi les entreprises surveillaient l’application de règles strictes par leurs employés et leurs clients. C’est pourquoi le gouvernement fédéral surveillait les déplacements des Canadiens grâce à des contrats de traçage des téléphones mobiles avec une grande entreprise de téléphonie. Sans le sentiment de cette surveillance omniprésente et la crainte d’un châtiment judiciaire ou extra-judiciaire, un fort sentiment d’impunité se serait répandu dans la population, ce qui aurait entraîné une multiplication dangereuse des infractions et même des comportements délictueux ou criminels, et du même coup la propagation du méchant virus très contagieux, ce qui aurait entraîné immanquablement, nous dit-on, le débordement ou l’effondrement du système hospitalier et une hécatombe apocalyptique.

Demandons-nous maintenant comment cette propagande pourrait être adaptée afin de rendre possible une application strictement sécuritaire, le tout en rapport avec l’implantation de la vidéosurveillance algorithmique. Dans ce jeu, la vidéosurveillance algorithmique remplace les mesures soi-disant sanitaires. Sa fonction est d’endiguer une augmentation réelle ou imaginaire de la criminalité et de la délinquance. Car les actes criminels et délinquants seraient très contagieux quand la population ne se sentirait pas constamment surveillée et quand le sentiment d’impunité se propagerait. C’est pourquoi il faudrait, en plus des nombreuses caméras de vidéosurveillance installées dans les lieux publics, utiliser des algorithmes pour détecter les actes criminels et aussi les comportements ou les personnes considérés suspects. Les forces policières ne disposant pas des effectifs nécessaires pour surveiller constamment les images transmises par toutes ces caméras de surveillance, pour visionner les images enregistrées afin d’identifier des suspects ou des coupables après des actes délictueux ou criminels, et encore moins pour intervenir avant que ces actes soient commis, un sentiment d’impunité croissant se répandrait parmi les délinquants et les criminels, ce qui se solderait par une augmentation de la délinquance et de la criminalité. En quelque sorte, le sentiment d’impunité et la délinquance et la criminalité qui en résulteraient seraient contagieux. Pour éviter le débordement des forces policières et assurer le maintien de l’ordre, il faudrait que ces forces puissent compter sur la vidéosurveillance algorithmique pour mettre plus facilement la main sur les suspects ou les coupables, pour intervenir avant que les actes délictueux ou criminels soient commis, pour contrecarrer la propagation d’un sentiment d’impunité, et pour endiguer l’augmentation de la délinquance et de la criminalité qui découlerait de ce sentiment. Ça serait la seule manière, pourrait-on nous dire, d’éviter, en période d’importants troubles sociaux et économiques, que les forces policières surmenées soient littéralement débordées ou s’effondre même, ce qui ouvrirait la porte à la multiplication des délits, des crimes, des attentats terroristes et des émeutes, et pourrait ultimement aboutir dans l’apparition de mouvements insurrectionnels parfois financés par des puissances étrangères.

 

Le dépistage massif, récurrent et préventif des crimes, des délits et des comportements suspects

Ce qui a permis de donner l’illusion d’une deuxième « vague » de COVID et d’imposer un deuxième confinement, c’est le dépistage massif, récurrent et préventif de toute la population, et l’emphase mise sur les « cas » et les « cas contacts » de COVID, et plus sur les décès attribués à tort ou à raison à cette maladie. Être malade de la COVID, c’était avoir reçu un résultat positif après avoir fait un test de dépistage, même quand on n’avait pas le moindre symptôme. Il n’en fallait pas davantage pour être considérés comme un cas qui pouvait avoir des complications, se retrouver à l’hôpital et infecter d’autres personnes qui pouvaient avoir elles aussi des complications, être hospitalisées et infecter d’autres personnes. Quant aux cas contacts, ils étaient considérés, même quand le résultat du test dépistage était négatif, comme suspects d’avoir attrapé le virus, d’avoir des complications, de se retrouver à l’hôpital et d’infecter d’autres personnes qui pouvaient avoir elles aussi des complications, être hospitalisées et infecter d’autres personnes. Bref, les « cas contacts » étaient pratiquement traités comme des « cas de COVID », qui étaient à leur tour traitées comme des personnes réellement malades de la COVID. C’est donc à force de tests de dépistage, de traçage des contacts, d’isolement préventif obligatoire et de redéfinition de la maladie qu’on est parvenu à créer l’illusion des « vagues » successives. La même chose se serait produite si on avait traité de la même manière n’importe quelle maladie inoffensive, par exemple le rhume.

La vidéosurveillance algorithmique ne consiste pas seulement à détecter les crimes et les délits commis, mais aussi les comportements suspects qui pourraient conduire à des crimes ou à des délits. Le fait d’avoir recours à elle entraînerait nécessairement une forte augmentation des comportements suspects, ceux-ci ayant échappé en grande partie à la vigilance policière avant, ou n’ayant pas été considérés comme suspects avant l’utilisation de la vidéosurveillance algorithmique. Car il est à peu près certain que le recours à cette technologie donnerait la possibilité aux forces policières de multiplier les comportements suspects à surveiller. C’est ainsi que l’emphase serait de moins en moins mise sur les crimes et les délits commis, et de plus en plus sur les comportements suspects détectés, qui exigeraient une intervention policière afin que des crimes et des délits ne soient pas commis. À la rigueur, un comportement suspect pourrait être traité comme un crime ou un délit même quand aucun crime ou délit n’aurait été commis, soit à cause de l’intervention policière préventive, soit à cause que la personne suspecte n’aurait jamais eu l’intention de commettre un crime ou un délit. Il en résulterait qu’avec la multiplication des comportements suspects détectés et susceptibles de conduire à un crime ou à un délit, et avec leur assimilation à des crimes ou à des délits, on parviendrait à créer artificiellement des « vagues » de délinquance ou de criminalité contre lesquelles il faudrait lutter en généralisant et en intensifiant la vidéosurveillance algorithmique – ce qui résulterait en une multiplication des crimes et des délits asymptomatiques détectées, qui seraient en fait seulement des comportements suspects qu’on traiterait comme des crimes ou des délits, même quand aucun crime ou délit ne serait commis, et même quand il n’y aurait aucune victime. C’est encore pire quand on se dit que ce serait des personnes suspectes qui seraient alors traitées par les forces policières comme des personnes coupables de crimes ou de délits.

 

Modélisations criminostatistiques

Pour donner une apparence de scientificité à la politique de confinement qui a été imposée dans les pays occidentaux, il a fallu avoir recours à d’imposants modèles biostatistiques censés montrer scientifiquement ce qui serait arrivé sans ces mesures soi-disant sanitaires, à savoir la propagation exponentielle du virus et l’augmentation exponentielle du nombre de malades, de personnes hospitalisées et de décès. Ce qui est commode avec ces projections spéculatives, c’est qu’elles ne sont pas fondées sur des données observationnelles et ne pourront jamais l’être, puisqu’on a fait ce que réclamaient les concepteurs de ces modèles pour éviter l’apocalypse virale annoncée. Le fait que l’apocalypse prédite ne se soit pas produite serait la preuve scientifique de l’efficacité des mesures soi-disant sanitaires. Faute de pouvoir faire l’expérience de cette apocalypse, ces projections spéculatives invérifiables se substituent à la réalité et sont considérées comme des vérités indiscutables. Et ceux qui auraient aimé qu’on attende avant de croire à cette prophétie apocalyptique et d’adopter la politique de confinement censée nous sauver, question de voir si les choses se passent bien telles qu’annoncées, sont perçus comme des monstres qui ne respecteraient pas le principe de précaution et qui auraient provoqué des centaines de millions ou des milliards de morts tout simplement pour vérifier si leurs doutes étaient fondés ou non.

Rien n’empêcherait les experts en criminologie de s’inspirer de ces modèles biostatistiques et d’élaborer à partir d’eux leurs propres modèles afin de justifier l’implantation généralisée de la vidéosurveillance algorithmique, en annonçant une propagation exponentielle de la délinquance et de la criminalité si on n’a pas recours à ce dispositif sécuritaire partout ou presque partout. Ces projections seraient bien entendu spéculatives et ne seraient pas fondées sur des données spéculatives, mais il n’en faudrait pas moins accepter ou désirer le recours généralisé à la vidéosurveillance algorithmique pour éviter qu’elles ne se concrétisent. Encore une fois, ce serait le principe de précaution qui prévaudrait, lequel est très commode puisqu’il dispense de prendre la précaution de vérifier si ces spéculations ont un fondement observationnel avant d’étendre le recours à la vidéosurveillance algorithmique, et rend impossible de vérifier si l’apocalypse se serait produite si on avait pas eu recours à ce dispositif sécuritaire. Ceux qui verraient les choses d’un autre œil, et qui critiqueraient cet usage borné et aberrant du principe de précaution, seraient des méchants qui ne soucieraient pas de la lutte contre la criminalité et la délinquance et des ennemis publics capables d’ouvrir la porte à la destruction de l’ordre public à cause de leur incrédulité.

 

Combinaison et chevauchement

Il se peut donc qu’au moment d’imposer la vidéosurveillance algorithmique, on nous serve les restes de la propagande sanitaire, en les faisant réchauffer et en les faisant baigner dans de la sauce sécuritaire. Ou pire encore : on mélangera ensemble la bouillie sanitaire et la bouillie sécuritaire, pour obtenir une bouillie encore plus indigeste.

Dans ce cas, la non-application des mesures soi-disant sanitaires feraient partie des comportements suspects détectés par la vidéosurveillance algorithmique. Les vecteurs de contagion et les criminels seraient les mêmes personnes. Ce serait deux facettes de la même chose. En empêchant la prolifération des comportements suspects et des crimes et délits auxquels ils sont censés menés, on empêcherait du même coup la prolifération trop rapide du méchant virus et l’augmentation exponentielle du nombre de personnes infectées, malades et susceptibles d’être hospitalisées et de mourir. Par le dépistage et le pistage des vecteurs de contagion et des criminels potentiels, le nombre de personnes suspectes repérées par la vidéosurveillance algorithmique et traitées comme des criminels connaîtraient une forte augmentation, de même que le nombre de « cas de COVID » et de « cas contacts » détectées grâce au dépistage massif et au traçage des contacts facilités par la vidéosurveillance algorithmique. C’est ainsi qu’on pourrait créer artificiellement de doubles « vagues » de COVID et de délinquance ou de criminalité. Il serait tout aussi facile d’élaborer des modélisations crimino-bio-statistiques pour montrer la corrélation presque parfaite qui existerait entre l’augmentation exponentielle des comportements suspects, délinquants ou criminels et celle des ravages faits par la COVID (ou une autre maladie qui la remplacerait) – prophéties apocalyptiques qu’on ne pourrait bien entendu pas confronter à la réalité, puisqu’il faudrait imposer des mesures sanitaires rigoureuses et le recours généralisé à la vidéosurveillance algorithmique pour empêcher qu’elles se réalisent. Comme ça serait commode !