Tests de dépistage rapides et rapport personnel avec le Virus

Même si les tests de dépistage rapides sont utilisés depuis déjà longtemps (début de l’année 2022 au Québec), je veux ici faire quelques observations à leur sujet, lesquelles me semblent toujours pertinentes malgré le relâchement estival des mesures soi-disant sanitaires, d’autant plus que l’automne et l’hiver arrivent à grands pas. Car beaucoup de nos concitoyens, dont plusieurs ne portent plus de masques nulle part depuis quelques mois, continuent d’avoir recours à ces tests quand ils ont un peu de toux et de fièvre, ou quand ils ont été en contact avec quelqu’un qui a des symptômes ou qui a obtenu un résultat positif.

Dès l’annonce de l’achat et de la distribution de ces tests par les autorités politiques et sanitaires canadiennes et québécoises, je me suis demandé où celles-ci voulaient en venir. Bien sûr, les centres de dépistage n’étaient plus capables de répondre à la demande en décembre 2021, et nos dirigeants ne pouvaient quand même pas perdre une si belle occasion d’isoler préventivement quelques millions de Canadiens et de Québécois pendant l’hiver, et devaient réagir aux demandes pressantes des journalistes zélés et des hypocondriaques qui, affolés par le variant Omicron, ont pris l’habitude de passer un, deux, trois ou quatre tests de dépistage par mois, et d’en faire autant avec leurs enfants. Il n’empêche que la Santé publique, en décidant de ne plus soumettre la population générale à des tests PCR et de lui distribuer plutôt des tests qu’elle peut s’administrer elle-même, s’est départie d’une grande partie du pouvoir qu’elle exerce sur elle : plus d’obligation de se présenter dans un centre de dépistage après avoir reçu une convocation de la Santé publique et de lui dénoncer ses contacts pour qu’ils soient eux aussi convoqués. À cause des tests rapides auto-administrés, la Santé publique perd son droit exclusif de dire qui est infecté et qui ne l’est pas, qui doit être mis en quarantaine et qui ne le doit pas. Ce n’est pas une petite affaire de perdre ce contrôle sur la population. Les récalcitrants  s’en sont réjouis : dans ces conditions, les chances de se retrouver séquestrés à domicile sont beaucoup plus faibles pour ceux qui se sont donné pour principe de ne pas utiliser des tests rapides et qui sont prêts à mentir à ce sujet, afin de ne pas être privés de leur liberté. La Santé publique ne risquait-elle pas ainsi de perdre le contrôle sur la population auquel elle tient tant ?

Cela est certainement vrai pour les récalcitrants, et peut-être pour une partie des personnes qui sont chancelantes. Mais il en va autrement pour tous les grands enfants qui croient à cette « pandémie » comme ils croyaient jadis au Bonhomme Sept Heures. Pour eux, la distribution régulière de millions de tests de dépistage rapides constitue une occasion d’exprimer leur foi sanitaire, et ce, sans avoir besoin des services des « dépisteurs » qui travaillent pour la Santé publique, de manière semblable aux protestants qui se passent des services des prêtres pour lire les Saintes Écritures et communier avec Dieu. Voilà qui leur procure un rapport direct, sans intermédiaire et personnel avec le Virus qui est ou pourrait être en eux, ce qui a pour effet une plus grande intériorisation de la foi sanitaire. C’est désormais la responsabilité des fidèles de vérifier que le Virus n’est pas en eux. Cela devient rien de moins qu’un cas de conscience pour eux.

Les autorités politiques et sanitaires, qui continuent d’exister, savent tirer profit de cette discipline sanitaire personnelle. Même sans être surveillés et sans y être contraints, beaucoup de croyants continuent de pratiquer la foi sanitaire et de proclamer à leur entourage qu’ils le font. Du même coup, ils entretiennent la foi en la « pandémie » à l’échelle de la société, même chez les croyants qui la pratiquent moins assidûment, et même pendant l’été, quand les mesures soi-disant sanitaires ont été suspendues. Le clergé sanitaire n’a même pas besoin d’intervenir. Ses ouailles, pour autant qu’on les approvisionne en tests rapides, peuvent pratiquer à domicile sans avoir à se donner le mal de prendre un rendez-vous et de se déplacer dans ces lieux de culte que sont les centres de dépistage. Le dépistage fait donc son entrée dans la vie quotidienne des fidèles et devient plus fréquent. Le mot se passe dans la communauté des croyants : le Virus continue de circuler, et ils continuent de s’auto-administrer des tests rapides, etc. Les tests rapides permettent donc d’assurer la permanence virale et « pandémique » en période d’accalmie estivale et de préparer une reprise « pandémique » l’automne ou l’hiver prochain, en cultivant ou en conservant des dispositions favorables dans la population.

Cette stratégie d’intériorisation de la foi et des pratiques religieuses, qui vise les moutons qui constituent la majorité ou qui passent pour elle, pourrait être étendue à autre chose qu’au dépistage. Des prêcheurs sanitaires ont déjà évoqué la possibilité d’envoyer par la poste des « vaccins » sous la forme de timbres qu’on pourrait s’appliquer soi-même (il faudrait voir comment ces « vaccins » pourraient être conservés sans être réfrigérés), afin que les croyants reçoivent régulièrement des doses de rappel sans avoir à se rendre dans un centre de vaccination et avoir besoin des services des « vaccinateurs ». La « vaccination » deviendrait alors l’affaire des croyants, pour eux-mêmes et pour leurs enfants, de la même manière qu’ils sont responsables de prendre et de faire prendre les médicaments prescrits pour eux et leurs enfants. S’il est vrai qu’aussi longtemps que les autorités sanitaires et religieuses ne se donneraient pas les moyens de vérifier que les « timbres-vaccins » seraient bien utilisés par les personnes auxquelles ils seraient destinés, les récalcitrants pourraient feindre la « vaccination », beaucoup d’autres pourraient néanmoins considérer que c’est un devoir absolu de s’auto-administrer ces produits ou de les administrer à leurs enfants. D’une manière ou d’une autre, ces autorités n’auraient plus besoin d’organiser des campagnes de « vaccination » de masse et pourraient augmenter la fréquence des doses de rappel, pour la COVID-19 ou pour d’autres « maladies » existantes ou encore à venir. Les grandes sociétés pharmaceutiques feraient, encore plus que maintenant, tout un magot en raison des « timbres-vaccins » (utilisés ou non par la population) achetés avec les fonds publics, en prévision d’une distribution systématique à toute la population, indépendamment de son désir de se faire « vacciner » ou non. Quant à nos concitoyens crédules et dociles – dont les plus jeunes qui n’ont pas connu la vie sans cette « vaccination » récurrente –, ils cultiveraient dorénavant un rapport personnel avec le « vaccin-sauveur », qu’ils pourraient faire pénétrer eux-mêmes dans leur corps afin d’obtenir le salut individuel et collectif conformément à la doctrine sanitaire admise, un peu comme si des prêtres envoyaient à domicile des hosties consacrées, en utilisant les puissants moyens de communication dont nous disposons pour assurer l’orthodoxie de la foi et conserver le sentiment communautaire des croyants qui communient à distance.

Le fait que « l’auto-dépistage » montrerait que la propagation du Virus continue malgré « l’auto-vaccination » et s’aggrave peut-être à cause d’elle, ne serait pas suffisant pour que beaucoup de ces croyants remettent en doute leur foi sanitaire fortement intériorisée. Au contraire, ils continueraient à « s’auto-dépister » et à « s’auto-vacciner » avec encore plus de zèle, et intérioriseraient encore plus ce circuit circulaire de croyances et de pratiques soi-disant sanitaires.