Sur un algorithme du Règlement sanitaire international de l’OMS (2)

Dans mon billet du 10 juin 2022, j’ai analysé l’algorithme ci-dessous, utilisé par les États membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour évaluer les événements qui pourraient constituer des urgences de santé publique de portée nationale, et par le directeur général de l’OMS pour déterminer si les événements notifiés sont de telles urgences, le tout conformément à la troisième édition du Règlement sanitaire international en vigueur depuis 2005, et auquel l’OMS cherche à donner des dents grâce au « traité pandémie », sous prétexte d’améliorer la surveillance et la notification de ces événements et de contraindre les États membres à se conformer aux recommandations et aux obligations dictées par l’OMS.

Je pense avoir montré, par l’analyse des différentes combinaisons de réponses aux questions, que cet algorithme a été conçu pour générer artificiellement des urgences de santé publique de portée nationale, et qu’il ne s’agit pas d’un instrument de décision scientifique, mais d’un dispositif bureaucratique servant à justifier l’expansion de l’influence, du pouvoir et du financement des organisations bureaucratiques et des bureaucrates spécialisés en santé publique, à l’échelle nationale et à l’échelle internationale. Le « traité pandémie » en cours de préparation est justement une manifestation de cet expansionnisme bureaucratique, qui profite de la multiplication des urgences sanitaires notifiées à l’OMS et confirmées par l’OMS, ainsi que de la menace de telles urgences qu’on cherche à faire peser sur nous.

Comme nous l’avons déjà dit dans le billet précédent, il suffit de répondre positivement à deux des quatre questions posées dans cet algorithme pour qu’un événement doive être déclaré à l’OMS, et pour que l’OMS soit en droit de confirmer son statut d’urgence de portée internationale. Il est indifférent que les événements en question n’impliquent pas un risque de propagation internationale si on a répondu positivement à deux des trois autres questions : les événements devront alors être notifiés à l’OMS pour évaluation. Ainsi il est possible de notifier comme une urgence sanitaire de portée internationale des événements qui, à défaut d’un risque important de propagation internationale, devraient tout au plus être considérés comme des problèmes nationaux. Et nous avons vu d’autres cas problématiques, notamment quand la deuxième réponse positive obtenue résulte du fait qu’on peut considérer qu’il y a un risque important de restrictions aux voyages internationaux et au commerce internationale même quand les événements évalués n’ont pas de répercussions graves « sur la santé publique » ou quand il n’y a pas de risques de propagation internationale ?

Il semble donc assez facile d’obtenir deux réponses positives en utilisant cet algorithme. Mais il se peut que les critères à partir desquels on répond aux quatre questions amplifient ou atténuent la facilité avec laquelle on peut notifier à l’OMS des événements susceptibles de constituer des urgences sanitaires de portée internationale. C’est pourquoi il est important d’analyser les sous-questions et les exemples qui accompagnent l’algorithme et qui servent à la prise de décision.


Voici quelles sont les sous-questions et les exemples de circonstances à prendre en compte quand on répond à la question I : « Les répercussions de l’événement sur la santé publique sont-elles graves ? »

Il est écrit, en bas de l’encadré, qu’il suffit d’avoir répondu positivement à l’une des sous-questions pour pouvoir répondre positivement à la question I (le même principe s’applique aux trois autres questions, comme nous verrons). Voilà qui renforce la tendance à augmenter artificiellement la fréquence des événements à notifier à l’OMS

Il est facile de répondre « oui » à la sous-question 1, étant donné qu’il n’est pas nécessaire que le nombre de décès soit plus élevé qu’attendu, et qu’un nombre de « cas » plus élevé qu’attendu suffit. À cela s’ajoute le fait qu’on peut considérer comme des « cas » des personnes asymptomatiques qui ont obtenu un résultat positif à la suite d’un test de dépistage. Il est aussi important de signaler qu’on ne précise pas ce qu’on entend par « plus élevé », ce qui introduit une grande part d’arbitraire dans l’évaluation des événements. S’agit de 110 %, de 120 %, de 150 %, de 200 %, de 500 % ou de 1 000 % de ce qui est attendu ? Et ce seuil diffère-t-il pour les décès, pour les cas symptomatiques graves, pour les cas symptomatiques légers et pour les cas asymptomatiques, car les répercussions ne sont assurément pas les mêmes dans tous ces cas ? Et comment tient-on compte du fait que la surveillance des événements susceptibles de constituer une urgence sanitaire entraîne une augmentation de la fréquence de dépistage et, du même coup, une augmentation des « cas » et des décès attribués à la maladie en question ? Voilà tant de questions auxquelles on ne répond pas ici. Voilà qui dispose les utilisateurs de l’algorithme à répondre positivement à cette sous-question et, du même coup, à la question I.

La sous-question 2 diffère de la première en ce qu’on fournit une longue liste d’exemples de circonstances dans lesquelles l’événement évalué risquerait d’avoir d’importantes répercussions sur la santé publique. Bien qu’on ne le précise pas, il semble sous-entendu qu’une seule de ces circonstances (ou d’autres qu’on pourrait trouver) suffise pour qu’on doive répondre positivement à cette sous-question et donc aussi à la question I.

Plusieurs de ces exemples de circonstances posent problème. Le premier exemple revient à contourner une réponse négative à la sous-question 1 (il n’y a pas un nombre plus élevé de cas et/ou de décès) en demandant si cela pourrait arriver à cause d’un agent pathogène qui aurait un fort potentiel épidémique, même si cela n’a pas été encore constaté par un nombre dangereusement plus élevé de cas et/ou de décès. On se garde ainsi la possibilité de dire, au nom du principe de précaution, que cela pourrait arriver.

Je ne comprends pas ce que fait le troisième exemple de circonstance dans cette liste. C’est une contradiction dans les termes. Si le nombre de cas recensés chez l’être humain est nul ou faible, comment l’événement évalué pourrait-il constituer un risque important pour la santé publique ? La seule idée qui me vient à l’esprit, c’est une maladie qui décimerait les animaux dont la viande est destinée à la consommation humaine et qui constituerait un risque pour l’approvisionnement en nourriture. Une pénurie de nourriture et une famine peuvent être considérées comme des répercussions graves pour la santé publique, en elles-mêmes et en raison de problèmes de santé qu’elles causent. Si c’est qu’on a en tête, ou si c’est autre chose qu’on a en tête, pourquoi ne pas l’avoir dit directement ?

Ce qui a été dit de la première question peut être aussi du quatrième exemple. Il ne suffit pas de dire qu’il y a des cas parmi le personnel de santé. Il est attendu qu’il y en ait, par exemple s’il s’agit d’une nouvelle forme de grippe. Il faudrait savoir de quels types de cas on parle (asymptomatiques, avec de légers symptômes ou avec de graves symptômes ?) et à partir de quand le nombre de cas détectés pose-t-il problème ?

Le cinquième exemple est circulaire en ce que l’attribut veut dire à peu près la même chose que le sujet de la phrase. Les populations à risque sont par définition particulièrement vulnérables, sans quoi on ne dirait pas qu’elles sont à risque. Pour n’importe quelle maladie, il y a des personnes à risque ou particulièrement vulnérables. Cet exemple de circonstance pourrait être pertinent seulement si on était plus précis quant au nombre de personnes ou à la proportion de personnes qui font partie des personnes à risque, ou si ces personnes s’avéraient beaucoup plus vulnérables qu’elles ne le sont normalement dans des circonstances semblables et non comparativement aux personnes qui ne sont pas à risque et qui, par définition, sont moins vulnérables qu’elles. Sans ces précisions, on se retrouvera souvent à répondre « oui » à la sous-question 2 et à la question I.

Le sixième exemple considère comme une circonstance aggravante le fait que l’événement évalué se produit dans une zone à forte densité de population. Étant donné qu’une forte proportion de la population mondiale et plus particulièrement des populations occidentales vit dans des zones urbaines densément peuplées, il faudra souvent répondre positivement à cette question, comme si c’était là une circonstance exceptionnelle et comme si la normalité était de vivre dans des zones à faible densité de population, qui se font de plus en plus rares ou qui sont difficilement inhabitables, à cause de la nature des lieux ou de la difficulté qu’on y a à trouver du travail.

La sous-question 3 diffère des autres en ce qu’elle n’a pas pour objet les caractéristiques ou les effets d’une maladie, d’un agent pathogène ou d’un agent toxique, mais porte plutôt sur l’incapacité de prendre les mesures jugées adéquates par l’OMS pour réagir correctement à l’événement évalué. L’événement devient problématique seulement parce qu’on ne dispose pas des moyens nécessaires pour évaluer et notifier ledit événement à l’OMS, notamment grâce à des analyses en laboratoire et à la mise en place d’un système de détection des nouveaux cas. Ce qui revient à dire que l’événement a de graves répercussions sur la santé publique parce qu’on ne dispose pas des moyens de santé publique pour savoir s’il a effectivement de telles répercussions, au sens des sous-questions 1 et 2. Faute de savoir, on fait comme si c’était le cas, ou comme si le fait de ne pas disposer des moyens de santé publique quand l’événement se produit constituait en soi-même une grave répercussion pour la santé publique. Celle implique qu’à défaut d’avoir ces moyens, l’événement évalué doit être, par mesure de précaution, considéré automatiquement comme ayant de graves répercussions sur la santé publique ; et ce, jusqu’à preuve du contraire, c’est-à-dire quand on disposera de ces moyens qui peut-être permettront de constater que ce n’est pas le cas.

Bref, les utilisateurs de l’algorithme ont l’embarras du choix : on leur fournit toutes sortes de raisons, pas toujours cohérentes, pertinentes et justifiées, de répondre positivement à l’une des trois sous-questions et, par le fait même, à la question I.


Voyons maintenant quelles sont les sous-questions et les exemples de circonstances à prendre en considération quand on répond à la question II : « L’événement est-il inhabituel ou inattendu ? »

Il résulte du premier exemple d’événement inhabituel pour la sous-question 4 que tout ce qui est inhabituel ou inconnu quant à l’événement évalué constitue une raison de répondre positivement à la question II. Cela est susceptible d’arriver chaque fois qu’il y aura un nouvel agent pathogène qui ne se propagera pas de la même manière que les agents pathogènes déjà connus, étant donné qu’on ne précise pas à partir de quel point une caractéristique doit s’éloigner de l’habituel et être assez fréquente pour être considérée comme inhabituelle, et qu’on ne fixe pas pour condition que ce qui est inhabituel doit constituer un danger significatif et assez fréquent pour la santé.

Dans le deuxième exemple de la sous-question 4, on demande ce qui a déjà été demandé dans la sous-question 1 de la question I et, de manière plus spéculative, dans le premier exemple de circonstance aggravante de la sous-question 2 de la question I. Le taux de morbidité étant le nombre de « cas » détectés par rapport à la population totale considérée, et le taux de létalité étant le nombre de décès répertoriés par rapport au nombre total de « cas », cela revient à peu près au même de demander si l’évolution des cas est plus grave que prévu – qu’on peut constater à cause de taux plus élevés de morbidité et de létalité – et de demander si le nombre de « cas » et/ou de décès pour ce type d’événement est plus élevé qu’il ne devrait l’être dans des circonstances semblables, ou si l’agent pathogène a un fort potentiel épidémique en raison d’une infectiosité accrue et d’un taux de létalité élevé. Grâce à ces sous-questions très semblables avec des formulations différentes, on se procure les moyens de répondre positivement aux questions I et II en raison d’une même caractéristique avérée ou supposée de l’événement évalué. Cela est d’autant plus facile qu’on ne précise pas, dans les sous-questions et les exemples des questions I et II, qu’est-ce qu’on considère comme des taux de morbidité et de létalité anormalement élevés. Le choix du taux de létalité au lieu du taux de mortalité (nombre de décès par rapport à la population totale considérée) ne me semble pas innocent et a pour effet d’accroître les chances d’avoir des raisons de répondre positivement à la sous-question et à la question. Il faudrait qu’il y ait un fort taux de morbidité et un fort taux de létalité, et non un fort taux de morbidité ou un fort taux de létalité. À défaut de quoi, on peut faire toute une affaire d’une maladie qui se propage rapidement et facilement mais qui tue une proportion très faible des personnes atteintes, et d’une maladie qui affecte un petit nombre de personnes mais qui tue une proportion élevée des personnes atteintes. Dans ces deux cas de figure, je ne vois par pourquoi il devrait s’agir d’une urgence de santé publique, à l’échelle internationale ou seulement à l’échelle nationale. Comme si cela ne suffisait pas, il est aussi possible de répondre positivement à cette sous-question quand l’évolution des « cas » s’accompagne de symptômes inhabituels, sans qu’on ne précise que ces symptômes doivent être graves et quelle doit être leur fréquence pour qu’on doive les prendre en considération quand on évalue l’événement.

Le troisième exemple de la sous-question 4 continue dans la même lignée. Pourquoi faudrait-il soupçonner l’événement évalué d’être une urgence de santé publique de portée internationale simplement parce qu’il s’agirait, par exemple, d’une maladie respiratoire d’origine infectieuse très peu létale dont seraient atteintes des populations de l’hémisphère nord pendant les mois de juin, de juillet et d’août ? En quoi est-ce plus grave d’être infecté et d’avoir des symptômes pendant l’été que pendant l’hiver ? N’est-ce pas le contraire qui est vrai, en raison des comportements hivernaux (on passe beaucoup plus de temps à l’intérieur, souvent à plusieurs dans un même logement, et on fait moins souvent de l’activité physique) qui aggravent la propagation et qui affaiblissent le système immunitaire ?

On ne fait pas non plus dans le nouveau avec le seul exemple d’événement donné pour la sous-question 5. En fait, il s’agit seulement de se demander si l’événement est inattendu pour une raison précise, parce que la maladie ou l’agent pathogène aurait été éradiqué dans l’État membre concerné ou n’aurait jamais été signalé jusqu’à ce que l’événement évalué se produise. Comme si l’apparition de cas d’une maladie éradiquée dans un État membre, ou jamais signalée précédemment (partout ou dans un État membre donné ?) devait suffire pour qu’on réponde positivement à la question II et pour qu’on traite l’événement comme un « possible danger » de santé publique de portée internationale !

Voilà bien des raisons, souvent fort discutables, de répondre « oui » à la question II.


Passons maintenant aux sous-questions et aux exemples de circonstances à prendre en considération quand on répond à la question III : « Y a-t-il un risque important de propagation internationale ? »

La sous-question 6 ne précise pas de quelle nature sont ces signes de lien épidémiologique avec des événements semblables dans d’autres pays. Le danger est de conclure en l’existence d’un tel lien ou de son importance simplement parce que des événements semblables se produisent simultanément dans plusieurs pays. En pensant de cette manière, on aurait tôt fait de présumer que la propagation internationale joue un rôle déterminant dans la propagation d’infections respiratoires saisonnières. Pourtant, une fois que l’agent infectieux susceptible de causer des troubles respiratoires circule dans de nombreux pays durant le printemps, l’été et l’automne en rendant généralement assez peu de gens malades, il est fort douteux que les « vagues » épidémiques observables durant l’hiver dans ces différents pays aient pour cause la propagation de l’agent infectieux d’un pays à l’autre, et qu’elles puissent être endiguées par des restrictions aux déplacements internationaux. C’est comme si on voulait sceller hermétiquement des salles pour que l’air ne circule par d’une pièce à l’autre, alors que l’air est déjà présent dans chacune d’entre elles. En quoi la circulation de l’air d’une pièce à l’autre changerait-il quelque chose à la situation ?

Dans le cas où on ne pourrait pas établir un lien épidémique avec des événements semblables dans d’autres pays, la sous-question 7 revient à demander si cela pourrait arriver. On contourne ainsi une réponse négative à la sous-question 6 en cherchant des indicateurs qui laissent entendre que la propagation internationale significative ou déterminante est possible, même si elle n’a pas été constatée et n’est peut-être pas possible en raison des caractéristiques de l’agent pathogène. En d’autres termes, des occasions de propagation internationale suffisent pour qu’on réponde positivement à cette sous-question et à la question III. Et elles ne sont pas dures à trouver. Dans le cas où la transmission locale est observée, un voyage international d’un « cas » pendant le mois précédent ou pendant la période d’incubation, la participation par un « cas » à un événement international comme une manifestation sportive ou une conférence, ou le contact d’un « cas » avec un voyageur international ou une population très mobile.

Encore une fois, les « raisons » de répondre « oui » à la question III ne manquent pas, et elles ne sont certainement pas toujours bonnes.


Venons-en maintenant aux sous-questions qu’il faut se poser quand on répond à la question IV : « Y a-t-il un risque important de restrictions aux voyages ou aux échanges internationaux ? »

Je ne reviens pas ici sur le fait qu’il n’est pas pertinent, voire incohérent, de se poser la question IV alors qu’on a répondu négativement à la question III, et qu’il est absurde de répondre positivement à la question IV alors qu’on a déclaré précédemment qu’il n’y a pas de risque important de propagation internationale. J’en ai déjà suffisamment parlé dans la première partie de ces analyses et dans l’introduction de ce billet. Je rappelle seulement, à propos de la sous-question 8, qu’il est aberrant de faire de cas passés de restrictions aux échanges ou aux voyages internationaux un critère d’évaluation des événements susceptibles d’être notifiés à l’OMS, sans qu’on examine sérieusement si ces restrictions ont produit les effets escomptés, de manière générale et dans des situations semblables. Autrement on transforme de mauvaises mesures de santé publique en critères d’évaluation des événements, et on accorde de la valeur à de mauvais précédents qui serviront de points de départs pour générer d’autres précédents de la même espèce, lesquels pourront ensuite servir à leur tour à faciliter et à justifier la notification d’événements semblables à l’OMS.

La sous-question 9 me semble tout à fait pertinente. Je me dis qu’il faudrait l’appliquer aux fameux « vaccins anti-covid » qui ont été exportés et importés massivement dans beaucoup de pays, et dans lesquels des chercheurs de renommée internationale auraient détecté la présence d’oxyde de graphène et de composantes non identifiées et non déclarées, en plus du fait que la plateforme à ARN messager entraînerait un affaiblissement temporaire du système immunitaire des personnes inoculées, et du fait que le système immunitaire attaquerait les cellules et les organes où la protéine de pointe provoquant la réponse immunitaire est produite. Mais l’OMS, qui ne jure que par la vaccination, se gardera bien de répondre positivement à cette sous-question pour ne pas entraver le commerce international des vaccins, qui est si profitable à plusieurs individus et compagnies faisant partie de GAVI, l’alliance du vaccin, qui procure à l’OMS une partie importante de son financement.

La sous-question 10 revient à poser une question semblable à la sous-question 7, la différence consistant en le fait que l’événement doit s’est produit dans le cadre d’un rassemblement international, et qu’il ne suffit pas seulement d’un « cas » qui aurait participé à un rassemblement international. Je ne remets pas en question la pertinence de cette distinction. Seulement il me semble que ça ne devrait pas être une sous-question de la question IV, mais plutôt de la question III. Le classement des deux sous-questions, sous deux questions distinctes, a pour effet qu’il est assez facile, pour un même cas, de répondre positivement aux questions III et IV, et de devoir considérer l’événement concerné comme susceptible de constituer une urgence de santé publique de portée internationale, alors qu’on peut avoir répondu négativement à la question I, qui concerne les risques pour la santé des personnes et les répercussions « sur la santé publique ». Faut-il y avoir une manœuvre sournoise des concepteurs de l’algorithme ou une grossière maladresse ? Quoi qu’il en soit, l’effet est le même, et c’est ce qui importe principalement.

La sous-question 11 fait d’une simple demande d’informations un critère d’évaluation de l’événement concerné. En rien une telle demande d’informations, surtout si elle est faite par des médias étrangers qui ne détiennent aucune expertise particulière et qui profitent de l’exagération du danger, ne constitue un facteur pertinent pour déterminer si un événement est ou non une urgence de santé publique. Remarquons aussi que des déclarations inquiétantes de la part des autorités politiques et sanitaires de l’État membre où l’événement s’est produit et de la part de l’OMS suffiraient à provoquer des demandes d’informations de la part de responsables étrangers ou de médias internationaux. Pourtant l’événement, qui n’a pas changé, n’est pas plus grave et pas plus digne d’être considéré comme une urgence de santé publique de portée internationale une fois que l’inquiétude et même la panique commencent à se répandre.

Nous pouvons donc dire la même chose de la question IV que des trois questions précédentes : on fournit plusieurs « raisons » de répondre « oui » à cette question, et on semble se soucier assez peu de leur pertinence.


À mon avis, ces analyses renforcent les conclusions du billet précédent, dans lequel je me suis seulement intéressé à l’algorithme lui-même. Il s’agit d’un dispositif bureaucratique servant, dans un premier temps, à augmenter artificiellement la fréquence des événements notifiés à l’OMS par les États membres comme susceptibles de constituer des urgences de santé publique ; et, dans un deuxième temps, à faciliter la confirmation par l’OMS du statut d’urgence sanitaire de portée internationale des événements notifiés par les États membres. Tout converge vers cette fin dans cet algorithme, dans ces questions, dans ces sous-questions et dans ces exemples de circonstances. La multiplication de ces urgences de santé publique, possibles ou confirmées par l’OMS, sert évidemment les visées expansionnistes d’une certaine classe de bureaucrates spécialisés dans la « santé publique » (qui n’en sont pas moins des bureaucrates de la pire espèce parce qu’ils disposent de diplômes en science ou en médecine) et des organisations auxquelles ils appartiennent, au niveau national et au niveau international. Il leur est alors plus facile d’obtenir des gouvernements des États membres une augmentation de leur financement, de leur influence et de leur pouvoir, notamment grâce au « traité pandémie ». Ces gouvernements ne se font d’ailleurs généralement pas prier, puisque la multiplication de ces urgences de santé publique, ainsi que le renforcement des moyens et des pouvoirs dont disposent les bureaucraties sanitaires, sont autant d’instruments qui peuvent être utilisés pour mieux contrôler les populations sur lesquelles ils règnent.

Faisons maintenant un pas supplémentaire. Rien dans l’algorithme analysé, ni dans la troisième édition du Règlement sanitaire internationale d’où il provient, ne permet de savoir avec quelque précision la manière dont on peut ou doit mettre fin à une urgence de santé publique de portée internationale qui a été déclarée par l’OMS. Sauf erreur, tout ce qu’on dit à ce sujet se trouve dans le paragraphe 5 de l’article 12 :

« Si le Directeur général, après consultation de l’Etat Partie sur le territoire duquel l’urgence de santé publique de portée internationale est survenue, considère que l’urgence de santé publique de portée internationale a pris fin, il prend une décision conformément à la procédure énoncée à l’article 49. »

(Règlement sanitaire international, troisième édition, p. 17.)

L’article 49 ne précise aucunement ce qu’il faut considérer pour mettre fin à l’urgence de santé publique de portée internationale, et de quelle manière il faut évaluer la situation. Il s’agit seulement de la procédure à laquelle le directeur général de l’OMS doit se conformer pour déclarer que cette urgence a pris fin.

À défaut d’avoir d’autres informations, nous pouvons supposer qu’une urgence sanitaire de portée internationale dure aussi longtemps qu’il est possible de répondre positivement à deux des quatre questions posées dans l’algorithme. Nous avons vu qu’il est facile d’obtenir ces deux réponses positives et donc de faire durer l’urgence sanitaire. Et cela est d’autant plus facile qu’étant donné « l’évolution de la situation épidémiologique » (une sorte de fourre-tout où les bureaucrates peuvent trouver ce dont ils ont besoin à tel moment), les questions auxquelles on répond positivement peuvent changer, de même que les raisons pour lesquelles on répond de cette manière, en fonction des sous-questions et des exemples de circonstances gracieusement mis à la disposition des utilisateurs de l’algorithme par ses concepteurs.

Nous ignorons à quelle fréquence doit être réévalué l’événement qui constitue une urgence sanitaire. Nous ignorons aussi combien de « vagues » saisonnières successives doivent se produire pour qu’on arrête de considérer l’événement comme inhabituel ou inattendu, et pour que la réponse positive à la question II devienne enfin une réponse négative. Nous ne savons pas davantage quand on en viendra à tenir compte du fait que le taux de létalité des « vagues » saisonnières les plus récentes est plus bas que ceux des premières « vagues », et changer la réponse positive donnée à la question I ou à la question II. Tout ça est laissé à l’arbitraire du directeur général de l’OMS, des bureaucrates de l’OMS et des autorités politiques et sanitaires des États membres qui collaborent avec eux. Il n’y a alors rien d’étonnant à ce que la « pandémie » qui durerait depuis presque 36 mois n’en finisse plus de finir. C’est dans l’ordre des choses. C’est le contraire qui serait étonnant.


S’il faut effectivement réviser le Règlement sanitaire international, comme le pensent les promoteurs du « traité pandémie », ce n’est certainement pas pour accroître les pouvoirs donnés à l’OMS et nous en remettre encore plus à l’arbitraire de ces escrocs. C’est précisément le contraire qu’il faudrait faire, en réduisant les pouvoirs de cette organisation et en rendant beaucoup moins facile pour les États membres et l’OMS de notifier, de déclarer et de faire durer de soi-disant urgences de santé publique de portée internationale.