Réclusion préventive généralisée

Quelle surprise ! Nous revoilà confinés presque totalement pour trois ou quatre semaines. Ce qui veut dire, dans le langage de nos autorités politiques et sanitaires, probablement pour trois ou quatre mois, et peut-être davantage. Et en plus nous avons droit, cette fois-ci, à un couvre-feu de 20 heures à 5 heures du matin. C’est que nous avons la chance de vivre dans un pays où nos chefs, d’une bienveillance sans limites, ont pour priorité absolue de protéger notre santé et de nous sauver du Virus – tout comme les citoyens français, anglais, allemands, belges, italiens, espagnols, suisses et australiens, qui ont eux aussi tous la chance d’être gouvernés par des politiciens qui ont pour seule préoccupation leur santé ! Et quand on est persuadé d’agir comme une maman ou un papa qui doit prendre soin de quelques millions de grands enfants qui ne sauraient pas ce qui est bon pour eux, et qui seraient trop souvent égoïstes, désobéissants, indisciplinés et même récalcitrants, il faut être prêt à prendre les moyens qui s’imposent, pense-t-on. Car maman ou papa sait ce qui est bon pour ses ados : ils doivent être rentrés à la maison avant 20 heures, sans quoi ils pourraient faire des bêtises dont les conséquences seraient dramatiques.

Suffit ! Laissons à leurs enfantillages ces grands enfants que nous avons comme chefs politiques, et qui s’imaginent que gouverner un pays ou une province, c’est comme « gérer » ses enfants – à supposer qu’on puisse éduquer des enfants en s’inspirant des techniques en vigueur dans les milieux de travail pour gérer les employés. Mais ça, c’est une autre histoire.

Examinons plutôt le contexte dans lequel on nous impose maintenant un couvre-feu, et les raisons qu’on utilise pour le justifier. Peut-être que cette nouvelle mesure depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire nous permettra de comprendre des aspects des autres mesures qui nous auraient échappés jusqu’à maintenant. Peut-être que cela nous permettra même de voir sous un nouvel angle la manière dont on nous gouvernait en temps normal, avant la déclaration de l’état d’urgence sanitaire.

 

Application irrégulière et arbitraire des mesures sanitaires

Plusieurs des mesures sanitaires qui nous sont imposées depuis presque un an sont difficiles à faire appliquer par les forces de l’ordre. Il n’y a pas assez de policiers pour se poster dans chaque rue dans le but de vérifier que chaque personne qui entre dans un domicile est bien autorisée à le faire, selon la réglementation en perpétuel changement. Comment peuvent-ils savoir que telle personne qui sonne à la porte d’une maison ou d’un immeuble à logement ne vient pas rendre visite à une personne qui habite seule et qui a donc le droit de recevoir un invité. Il n’est pas davantage possible pour eux de vérifier que chaque petit groupe de personnes rassemblées à l’extérieur habitent à la même adresse. Celui qu’ils prennent pour un père ou une mère pourrait être en réalité un oncle ou une tante. Celui qui semble être un conjoint pourrait être un ami. À l’inverse, deux hommes qui se promènent ensemble leur paraissent peut-être suspects, alors qu’ils pourraient être un couple homosexuel.

Le mieux que les policiers puissent donc faire, généralement, c’est d’intervenir dans les cas où il est évident que les rassemblements intérieurs ou extérieurs ne respectent pas les consignes sanitaires. Par exemple, il est excessivement rare qu’une dizaine de personnes habitent à la même adresse. Et les autorités politiques et sanitaires, si elles s’y entendaient en matière de législation ou de réglementation et avaient tenu compte de l’applicabilité de leurs mesures, auraient décidé de faire porter ces dernières sur des cas où il y a très peu de place au doute. Autrement les mesures sanitaires sont appliquées de manière irrégulière, aléatoire et même arbitraire. Si telle personne qui ne respecte pas les consignes sans les défier trop ouvertement écope d’une amende, alors qu’une autre s’en tire sans problème, c’est qu’elle n’a pas eu de chance, ou c’est qu’elle a des voisins qui sont portés à la délation ou qui ont une dent contre elle et qui en profitent pour régler leurs comptes. Et pour que cette amende ait un effet dissuasif notable, il faut qu’elle soit assez élevée : celui qui la paie doit aussi payer pour tous ceux qui n’ont pas davantage respecté les consignes et qui ne se sont pas fait prendre, ainsi que pour tous ceux qui ont ou pourraient avoir envie d’agir de la même manière. Il s’agit de faire peur à tout ce beau monde. En d’autres termes, il s’agit d’un châtiment exemplaire : on doit punir d’autant plus sévèrement ceux que les policiers attrapent, qu’on soupçonne les coupables qu’on n’attrape pas d’être nombreux, de même que ceux qui pourraient vouloir agir de manière répréhensible. Ce qui revient à rendre encore plus irrégulière et arbitraire l’application d’une loi ou d’une règle justement parce que cette loi ou cette règle est déjà irrégulière et arbitraire dans son application. On a déjà vu plus équitable et plus rigoureux en matière d’application de la loi ou de la réglementation.

Il y a aussi un autre problème qui découle des difficultés d’application de ces mesures sanitaires. Les autorités qui les ont décrétées ne sont pas capables de savoir avec quelque exactitude dans quelle mesure on les respecte. Si bien qu’elles ne peuvent pas juger en connaissance de cause de leur efficacité ou de leur inefficacité. Ce qui peut certainement convenir aux autorités, qui sont alors libres de conclure arbitrairement que c’est parce qu’on ne respecte pas suffisamment les consignes sanitaires qu’elles ne produisent pas les effets escomptés et que la contagion semble continuer de plus belle. Cela les dispense d’envisager que ces mesures sont tout simplement inefficaces, ou qu’elles ne sont pas assez efficaces pour compenser tous les effets négatifs qu’elles ont pour nous, individuellement et collectivement.

 

Imposition d’un couvre-feu pour faire respecter les mesures arbitraires et difficiles à faire appliquer

Alors qu’une grande partie du Québec est passée en « zone rouge » depuis quelques mois et que la situation – si on en croit les statistiques officielles du gouvernement qui sont reprises jusqu’à la nausée par les médias de masse – continue de « s’aggraver dangereusement », le gouvernement a décidé d’avoir recours à une nouvelle mesure arbitraire, mais plus facile à appliquer, pour faire respecter des mesures arbitraires et difficiles à appliquer qui sont déjà en vigueur. Il s’agit bien sûr du couvre-feu.

Ce qui justifierait l’imposition d’un couvre-feu, ce serait qu’il pourrait réduire la fréquence des rassemblements illégaux (intérieurs ou extérieurs) et diminuer les contacts illégaux qui auraient lieu à la faveur de la nuit, et qui seraient en partie responsables de la situation épidémiologique actuelle. En effet, personne ne croit – à part peut-être les plus superstitieux pour qui le Virus est une sorte de croque-mitaine qui effraie les grands-enfants qu’ils sont – qu’une promenade après 20 heures, seul ou avec des personnes qui habitent à la même adresse, contribue en elle-même à augmenter les contacts et à aggraver la situation épidémiologique. L’objectif est bien entendu de faciliter le travail de surveillance des policiers. Toute personne qui ne se trouve pas à son domicile pendant le couvre-feu peut être légitimement considérée comme suspecte, et peut être interpellée – qu’elle soit à pied ou en voiture – par les policiers.

Cela facilitera aussi le travail des délateurs. Leurs voisins qui quittent leur domicile ou qui reçoivent quelqu’un chez eux pourront être soupçonnés à juste titre de violer le couvre-feu, alors qu’avant les choses n’étaient pas aussi claires pour les délateurs, qui devaient parfois s’abstenir par crainte de faire une dénonciation non justifiée et de s’attirer une réprimande des policiers, débordés par l’afflux des dénonciations.

Il est vrai qu’il y a des exceptions dont les policiers devront tenir compte, « en faisant preuve de jugement » : se rendre à son travail si on fait partie des services essentiels, aller à la pharmacie, à l’hôpital ou chez le dentiste, revenir d’un cours du soir en présentiel, ou « sortir pour que son chien puisse faire ses besoins, dans un rayon maximal d’un kilomètre autour de sa résidence ou de ce qui en tient lieu », par exemple. Cet appel au jugement des policiers (à part dans le cas du travail, où une attestation peut être signée par l’employeur) ouvre grand la porte à l’arbitraire. Qu’est-ce qui fait que telle personne qui donnera aux policiers une des raisons valables de ne pas respecter le couvre-feu sera crue sur parole, devra fournir des preuves de ce qu’elle avance, ou sera considérée comme une menteuse ?

Mais il y a pire en matière d’arbitraire. Comme nous l’avons dit, ce n’est pas le fait de faire une promenade à l’extérieur après 20 heures qui aggraverait la propagation du Virus. Si c’était ce que nos autorités croyaient, elles pourraient difficilement permettre de promener son chien dans un rayon d’un kilomètre de sa résidence pour qu’il fasse « ses besoins ». Le chien n’aurait qu’à faire « ses besoins » devant la résidence en question, et son propriétaire ne pourrait pas profiter de l’occasion pour faire une promenade pendant le couvre-feu. Non, ce qu’on veut, c’est rendre difficiles les rassemblements déclarés illégaux, qu’ils soient intérieurs ou extérieurs. À la suite de l’imposition du couvre-feu, on suppose, évidemment sans preuve, que toute personne qui voudrait, pendant la période visée, quitter son domicile sans raison valable le ferait pour participer à un tel rassemblement. Ce qui revient à traiter arbitrairement toute la population comme des contrevenants qu’on assigne à domicile durant le couvre-feu à la suite de ce jugement sommaire, justement pour les empêcher de commettre l’infraction dont on les juge coupables par anticipation. C’est pourquoi le couvre-feu n’est rien de moins qu’une réclusion préventive généralisée. On peut difficilement trouver plus arbitraire d’un point de vue juridique ou simplement rationnel.

C’est ainsi qu’on assimile le fait de ne pas respecter le couvre-feu au fait de participer ou de vouloir potentiellement participer (c’est tout un) à un rassemblement illégal – ce que confirment les montants des amendes (entre 1 000 $ et 6 000 $, en plus des frais administratifs de 546 $) qui sont les mêmes pour les deux infractions.

Il en résulte que le promeneur nocturne qui est interpellé par les policiers est, jusqu’à preuve du contraire, indirectement considéré comme coupable de vouloir participer à un rassemblement illégal. Ce ne sont pas les policiers qui ont le fardeau de la preuve : c’est lui qui doit prouver adéquatement qu’il a une bonne raison de ne pas respecter le couvre-feu, sans quoi c’est comme si on l’avait pris en flagrant délit de participation à un rassemblement illégal.

Toutes mes félicitations à nos autorités : comme mesure dissuasive, on pourrait difficilement trouver mieux. Non seulement elle dissuade de participer à des rassemblements illégaux que nos autorités croient responsables de la persistance de la « deuxième vague », mais elle dissuade aussi d’actions dont ces autorités reconnaissent elles-mêmes qu’elles n’ont pas d’impact significatif sur la situation épidémiologique et qui ne devraient pas être condamnables en raison de présomptions gratuites. Cela revient à assigner à domicile presque toute la population du Québec qu’on soupçonne globalement d’accomplir des actes illégaux à la faveur de la nuit, comme des condamnés en liberté conditionnelle dont on exige d’être à leur domicile pendant la nuit pour éviter qu’ils ne retombent dans le crime, et aussi pour continuer à leur appliquer une certaine discipline carcérale après leur sortie de prison, grâce à laquelle on les rééduque. Avec une telle logique ou absence de logique, on peut facilement passer à une assignation à domicile durant le jour, sous prétexte de prévenir les rassemblements illégaux et de diminuer les contacts durant cette période, et aussi de faciliter le travail de surveillance et de contrôle des policiers.

Cette nouvelle mesure est tellement arbitraire et absurde qu’elle fait grimacer toute personne qui prend au sérieux le droit, la loi et la justice. On en vient même à se dire qu’elle est incompatible avec un État de droit digne de ce nom. Ce dont nos autorités ne se soucient guère depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire. Tellement qu’on en vient à se demander si elles s’en souciaient avant.

 

Et avant la déclaration de l’état d’urgence sanitaire ?

Demandons-nous si les analyses faites sur le couvre-feu peuvent s’appliquer, en partie ou en totalité, à la manière dont nous étions gouvernés avant l’état d’urgence sanitaire, et dont nous continuons à être gouvernés et surveillés, puisque ça n’a pas changé du tout au tout.

La première chose qui me vient à l’esprit, c’est l’augmentation des contrôles de sécurité dans les aéroports et aussi dans d’autres lieux publics depuis 2001. Tout le monde qui doit se soumettre à ces contrôles est de fait considéré comme un terroriste potentiel. Et on a tout intérêt à ne pas plaisanter si on ne veut pas avoir d’ennuis.

D’après le souvenir que j’ai des quelques voyages en avion que j’ai faits dans les années 1990, les contrôles de sécurité avant l’embarquement étaient rapides et sommaires. On avait moins l’impression d’être soupçonnés d’être un terroriste ou un pirate de l’air. Et en cas de doute, les choses se réglaient de manière généralement courtoise avec les agents de sécurité, par exemple quand un bruit étrange provient du sac à dos d’un passager, lequel est simplement causé par un appareil photographique dont le film est en train de rembobiner, et non par un engin explosif improvisé. Selon l’aéroport où l’on se trouve et le zèle des agents de sécurité, un pareil incident peut maintenant mener à des complications plus ou moins graves.

Certaines compagnies aériennes poussent le zèle jusqu’à interdire de nombreux objets courants qui, selon elles, pourraient servir à commettre un attentat, à détourner un avion et à faire une prise d’otage. Par exemple les broches à tricoter. Ainsi on interdit tous les passagers d’un avion de tricoter sous prétexte qu’on les soupçonne d’être des terroristes ou des pirates de l’air.

Toujours sous prétexte de lutter contre le terrorisme, les services de renseignement nationaux et aussi étrangers surveillent ce que nous faisons sur Internet et ce que nous disons au téléphone, et collectent même systématiquement des informations sur nous, lesquelles sont conservées au cas où nous serions impliqués dans quelque affaire pas propre, nous dit-on. Si nous n’avons rien à cacher, nous dit-on toujours, nous n’avons rien à craindre. Et le seul fait de ne pas nous réjouir à l’idée d’être constamment surveillés, ou de prendre certaines précautions pour l’être moins, peut suffire à nous rendre encore plus suspects. Ce qui nous soumet tous à l’arbitraire des agences de renseignement et des forces policières, qui peuvent pour leur part agir dans l’ombre sans être soupçonnées d’avoir quelque chose à cacher.

Puis il y a l’interdiction – presque comique maintenant – de porter un masque dans les manifestations, qui était en vigueur jusqu’à ce qu’on exige de nous précisément le contraire. Outre que cela permet d’atténuer les effets des gaz lacrymogènes, on suppose que tous ceux qui portent un masque veulent faire du grabuge ou affronter les policiers sans être identifiés. C’est sous ce prétexte que les autorités ont décidé d’interdire pour tous les masques dans les manifestations. Ce qui est bien sûr un jugement sommaire et arbitraire. Il y a des photographies et des vidéos qui circulent sur Internet, dans les médias ou sur les réseaux sociaux, et qui pourraient attirer des ennuis à ceux qui participent à une manifestation sans rien faire d’illégal, surtout quand la raison de cette manifestation est controversée et quand la propagande médiatique bat son plein. Par exemple, un employeur pourrait faire des ennuis à un de ses employés parce qu’il aurait participé à une telle manifestation. Ainsi l’interdiction de porter un masque pouvait dissuader plusieurs personnes de participer à des manifestations qui, elles, n’étaient pas illégales.

La manière dont les manifestations non autorisées (dont le parcours n’a pas été fourni aux forces policières et approuvées par elles) sont dispersées est aussi fort arbitraire. Si je me souviens bien de ce qui s’est passé lors de la « crise étudiante » de 2012, les forces de l’ordre ne déclarent pas que de telles manifestations sont illégales dès leur début. C’est après quelque temps, quand elles trouvent qu’il y a trop de grabuge (quelques poubelles enflammées, quelques vitrines de commerce fracassées et quelques échauffourées entre manifestants et policiers), qu’elles se décident assez arbitrairement à les déclarer « rassemblements illégaux » et qu’elles émettent un ordre de dispersion. Toute personne qui refuse de se disperser et qui reste sur les lieux est assimilée, sans preuves, à un « casseur » qui aurait ou pourrait vouloir commettre des actes illégaux comme ceux qui ont permis de déclarer illégale la manifestation. Ce qui permettrait aux policiers d’identifier et d’attraper les « casseurs », qui avant se perdaient dans la foule des manifestants, souvent trop nombreuse pour être arrêtée au complet. Même les personnes qui passent seulement par là, parce qu’elles habitent ou travaillent à proximité, peuvent être soumises à des contrôles et avoir des ennuis, selon leur réaction et le zèle des policiers auxquels elles ont affaire.

Enfin il y a l’omniprésence des caméras de surveillance : dans les commerces, dans les lieux de travail, dans les institutions publiques, dans les rues et même dans les immeubles à logement. Pas même moyen d’aller faire sa lessive à la buanderie commune sans être surveillé. Tout ça sous prétexte de prévenir le vol, le vandalisme ou quelque autre acte non conforme à la loi et à un règlement en vigueur dans les lieux en question, et de faciliter l’application des lois et des règlements qui autrement est irrégulière et arbitraire.

Dans tous ces cas, on nous soumet arbitrairement à une surveillance carcérale – comme si nous nous étions déjà rendus coupables des crimes, des délits ou des infractions dont on nous soupçonne –, justement pour nous empêcher de les commettre, ou nous dissuader de les commettre. Ce serait donc inadéquat de nous dire coupables. Nous sommes tous traités comme des délinquants en puissance. Sous surveillance continue, on nous dissuade aussi de choses qui ne sont pourtant pas illégales et on modifie ainsi ce que nous faisons.

Même si ces pratiques ne sont pas en tous points semblables à celles que nous pouvons observer depuis le début de l’état d’urgence sanitaire, il y a certainement une continuité entre elles. Ce qui montre qu’un simple retour à la normalité ne saurait suffire, et que la « normalité d’avant » pourrait assez facilement mener une autre fois à un état d’exception, qui au fond n’est pas si exceptionnel qu’on le pense généralement.

 

Application du principe de réciprocité à nos autorités

Si nos autorités jugent que ces manières de gouverner sont bonnes pour nous, pourquoi ne le seraient-elles pas aussi quand il s’agit d’elles ? Cela serait d’autant plus important qu’elles exercent un pouvoir considérable, surtout depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire.

Il est bien connu que les politiciens sont souvent menteurs et corrompus, et que beaucoup ne se soucient pas vraiment du bien public. C’est une vraie plaie : il y a une véritable épidémie de mensonge et de corruption dans la classe politique. On le voit bien à la manière dont sont conduites les affaires publiques depuis des décennies. Ça va de pire en pire. Il faut faire quelque chose pour endiguer ce fléau !

Il est vrai que tous les politiciens ne sont pas menteurs et corrompus, et que certains se soucient peut-être vraiment du bien public. Mais allez savoir lesquels ! Il s’avère si difficile de les départager. Par conséquent, présumons que tous les politiciens sont menteurs et corrompus, et qu’ils ne servent pas l’intérêt public. Toutes les décisions qu’ils prennent – surtout celles qui ont des effets nuisibles sur nos droits, nos libertés et la prospérité collective – doivent être considérées comme contraires à nos intérêts individuels et collectifs. D’ailleurs, ne faut-il pas être un tordu ou un pourri de première pour faire son chemin dans le milieu politique et gravir les échelons au sein d’un parti politique ?

Par conséquent, il faut soumettre nos politiciens à une surveillance constante et à des contrôles réguliers, car il en va du salut public et de notre bien à tous. S’ils n’ont rien à cacher, ils devraient non seulement accepter cette surveillance constante, mais même la demander. S’ils font quelque chose qui semble nous nuire, ils doivent être considérés comme coupables jusqu’à preuve du contraire. C’est eux qui ont le fardeau de la preuve et qui doivent se justifier adéquatement vis-à-vis de nous. S’ils sont incapables de le faire, ils doivent être démis de leurs fonctions, condamnés à des amendes proportionnelles à leurs revenus, ou emprisonnés pendant des années, ou pire encore, pour crime de haute trahison. Cela devrait faire peur à ceux de nos politiciens qui ne sont pas encore fait prendre, et à ceux qui, sans avoir encore rien fait de répréhensibles, pourraient avoir envie de s’éloigner du droit chemin.

Peu importe si les actes reprochés ont été commis ou auraient pu l’être. Car il s’agit justement d’empêcher qu’on les commette. La gravité de la situation est telle qu’il faut prendre les moyens qui s’imposent. Et tant pis si les politiciens intègres se retrouvent à payer pour la corruption des autres. S’ils ne veulent pas d’ennuis, ils n’ont qu’à se tenir tranquilles et à se taire. Ainsi éviteront-ils d’attirer sur eux notre regard inquisiteur. À moins que l’omission de faire quelque chose puisse aussi être un crime contre l’intérêt public…

Nos politiciens, si jamais ils me lisaient, trouveraient que j’y vais fort. Je suis d’accord. Ils doivent être présumés innocents jusqu’à preuve du contraire ; ce sont leurs accusateurs qui doivent avoir le fardeau de la preuve. Et on ne saurait les soumettre à une surveillance constante sous prétexte qu’on les présume coupables ou capables de crimes avant même de les avoir jugés, et sous prétexte d’empêcher ces crimes. Ce serait alors leur imposer un traitement injuste et arbitraire. Comme j’ai dit, j’en conviens. Que nos politiciens veuillent bien être conséquents et nous rendre la pareille !