Pourquoi la classe politique voudrait-elle notre bien ?

Voici la question que je pose à ceux qui se demandent ou qui nous demandent pourquoi les politiciens nous voudraient du mal quand nous insistons sur tout le mal qu’ils nous ont fait, surtout depuis 2020. Car pourquoi supposer qu’il est tout naturel qu’ils nous veuillent du bien ?

Si, en essayant de répondre à cette question, nous trouvions que les membres de la classe politique n’ont pas de raisons de vouloir notre bien, ou qu’ils ont de puissantes raisons de ne pas vouloir notre bien, lesquelles éclipseraient les quelques raisons qu’ils pourraient avoir de vouloir notre bien, nous trouverions du même coup des raisons pour lesquelles ils pourraient nous vouloir du mal, ou à tout le moins ne pas se soucier du tort qu’ils nous font.

Les politiciens auraient des raisons de chercher notre bien s’ils avaient des comptes à nous rendre. Ou du moins ils auraient alors de bonnes raisons de ne pas nous nuire, car nous serions en position de leur rendre le mal pour le mal ou d’exiger d’eux qu’ils cessent sur-le-champ et qu’ils nous procurent une réparation pour les torts faits. Mais notre système politique est ainsi fait qu’une fois qu’ils ont été élus, les politiciens peuvent n’en faire qu’à leur tête et nous gouverner d’une main de fer. Il n’existe aucune procédure que peuvent entreprendre les citoyens pour démettre de leurs fonctions les membres d’un gouvernement. Les juges étant nommés par les gouvernements qui se succèdent, ils sont souvent accoquinés avec la classe politique et il est par conséquent rare que les poursuites visant des ministres aboutissent à une condamnation ou à une révocation des lois ou des décrets promulgués. Nos parlements, censés être composés de représentants des électeurs, sont en fait composés de représentants des partis politiques qui votent en suivant la ligne du parti gouvernemental ou du parti d’opposition auquel ils appartiennent, et qui peuvent être sanctionnés ou exclus par le parti en question en cas de désobéissance (même si c’est pour défendre les intérêts des électeurs), ce qui veut dire que les figures politiques plus puissantes n’ont généralement rien à craindre des députés qui ont des comptes à leur rendre s’ils veulent continuer leur carrière politique. Le seul moment où les membres d’un gouvernement et du parti gouvernemental ont des comptes à nous rendre, c’est quand il y a des élections. Mais il ne peut rien leur arriver d’autres que de ne pas être réélus, après avoir exercé le pouvoir de manière autoritaire durant quelques années. Les membres du gouvernement non réélus ne sont souvent pas à plaindre : ils retournent dans le milieu des affaires dont ils sont issus, ils se font proposer des emplois rémunérés par des entreprises dont ils ont servi les intérêts, ou ils continuent à vivre de leur fortune accumulée légalement ou illégalement. Bénéficiant de l’impunité, il serait étonnant qu’ils se soucient de nos intérêts et qu’ils s’efforcent de ne pas nous faire du tort, surtout quand cela leur est avantageux.

Il est vrai qu’une certaine forme de reddition de comptes pourraient avoir lieu sous la forme d’un tribunal de l’opinion. Malheureusement, les médias traditionnels, qui devraient y jouer un rôle important, reçoivent des subsides du gouvernement ou des grandes entreprises ou des fonds d’investissement dont ce dernier sert les intérêts, (notamment par ses politiques soi-disant sanitaires ou sa politique étrangère et économique), et deviennent donc des organes de propagande. Les fonctionnaires et les autres employés de l’État (par exemple les professionnels de la santé et les militaires) ont le devoir de garder le silence ou dire ce que leurs supérieurs et le gouvernement attendent d’eux, et s’exposent à de graves sanctions disciplinaires s’ils informent le public de pratiques et de politiques allant à l’encontre de son intérêt. Les électeurs ne pouvant pas être bien informés de ce qui se passe derrière les portes closes, comment pourraient-ils y avoir une telle reddition de comptes ? Étant donné qu’elle est protégée par une sorte de loi du silence et un puissant appareil de propagande, la classe politique se croit à l’abri d’un tel tribunal de l’opinion. Qu’a-t-elle donc à craindre de l’opinion des électeurs, qui est façonnée et manipulée conformément à ses intérêts ? Alors pourquoi se soucierait-elle de leur faire du tort quand les organes de censure et de propagande censure ces torts ou les font apparaître pour des biens ?

Même quand certains de ceux qui occupent les échelons supérieurs de la classe politique croient travailler à notre salut, ils se retrouvent souvent à nous faire du tort. Ces grandes figures politiques provenant de milieux sociaux très différents de ceux dont nous venons, ils ont une idée vague de nos conditions d’existence concrètes et de nos aspirations. Ce qui ne les empêche pas de croire, tant ils sont imbus de leurs petites personnes, de savoir mieux que nous ce qui est bon pour nous, et de prendre les moyens pour nous l’imposer, de force ou par la manipulation. Nos gouvernements nous ont-ils consultés quand ils ont décidé que la priorité absolue devait être, pour nous tous, notre santé, c’est-à-dire la lutte à mort contre le méchant virus ? Nous ont-ils consultés quand ils ont décidé qu’il était dans l’intérêt de l’Occident d’infliger des sanctions économiques contre la Russie ? Nous ont-ils consultés quand ils ont adopté des politiques énergétiques irréalistes et désastreuses, sous prétexte de lutter contre les prétendus changements climatiques causés par l’extraction et consommation d’hydrocarbures ? Peuvent-ils même concevoir qu’ils nous ont empêché de vivre pour faire la guerre au virus, et qu’ils sont en train de nous appauvrir dramatiquement et de détruire notre avenir pour faire la guerre à la Russie et aux changements climatiques ? De quel droit décident-ils ce qui est bon pour nous, et nous l’imposent-ils individuellement et collectivement, alors qu’eux, qui sont souvent beaucoup plus riches que nous, ne sont pas affectés de la même manière par les confinements et les mesures soi-disant sanitaires et se ménagent des exceptions pour se rencontrer et voyager librement (des privilèges de classe) et pourront continuer à payer leurs comptes et même à s’enrichir malgré l’inflation et la crise économique qui s’aggravent ? Peuvent-ils même concevoir ce que c’est que d’être dans la situation dans laquelle nous nous trouvons ? Ont-ils même intérêt à faire cet effort d’imagination, lequel détruirait l’image qu’ils aiment avoir d’eux-mêmes (celle de parents protecteurs de la population et de sauveurs) ? La dégradation de la situation économique, ainsi que la pauvreté croissante et même la misère qui frapperont beaucoup d’entre nous, ne leur fournissent-elles pas des occasions supplémentaires de s’ingérer dans notre vie et dans tous les aspects de la société, sous prétexte de nous venir en aide et même de nous sauver des maux qu’ils ont causés sous prétexte de nous protéger contre le méchant virus, les méchants russes et les méchants changements climatiques ? Ne devient-il pas de plus en plus difficile de nous soustraire à leurs bonnes intentions et à leurs politiques salvatrices, ceux qui osent mettre en évidence les maux qui en résultent et agir en conséquence étant de plus en plus considérés comme des traîtres et des ennemis publics ? Comment ne pas voir que les politiciens qui nous veulent du bien de cette manière peuvent nous faire autant de tort que les politiciens qui cherchent à nous nuire ou qui ne se soucient pas du tort qu’ils nous font quand cela sert leurs intérêts et n’a pas de conséquences néfastes pour eux ?


Tous nos problèmes ne seront pas résolus simplement parce que nous votons pour un autre parti politique, car ils persisteront tant que nos institutions politiques ne seront pas transformées en profondeur, et tant qu’une classe politique de plus en plus séparée de nous – avec des conditions de vie, des moyens financiers et des intérêts de plus en plus en plus différents des nôtres – continuera d’exister, n’aura pas intérêt à ne pas nous nuire et nous nuira souvent même quand elle croit nous sauver d’effroyables maux.

Ce constat n’est toutefois pas une raison pour ne pas aller voter. Nous pouvons voter en étant conscients de tous les défauts de nos institutions politiques et de la pourriture de la classe politique, pour choisir le moindre de mal et obtenir des conditions politiques un peu moins défavorables à des transformations d’envergure.