Petite fiction sur une grande tempête de verglas

Imaginons qu’après le virage vert qui obsèdent nos gouvernements, qu’une nouvelle « crise du verglas » se produise, comme celle qu’a connu le Québec en janvier 1998, malgré l’amélioration du réseau électrique au cours de décennies qui se sont écoulées depuis. Au plus fort de l’hiver, quelques millions de foyers québécois sont privés d’électricité. Le chauffage au mazout et au gaz naturel n’existe plus, de même que le chauffage au bois. Tous les véhicules sont désormais électriques, aussi bien les voitures et les transports en commun, que les camions et la machinerie lourde. Même les véhicules utilisés par les secours et les militaires envoyés sur place pour réparer les lignes électriques et les pylônes, et pour aider la population,  fonctionnent à l’électricité. Comment ces véhicules peuvent-ils recharger leurs piles s’ils doivent être utilisés pendant au moins une douzaine d’heures par jour, pendant des semaines, dans des zones où il n’y a plus d’électricité, ou où l’approvisionnement électrique est instable ou insuffisant. Il n’est plus possible de faire le plein d’essence, dans un centre d’approvisionnement ou une station de service muni d’une génératrice, ou à l’aide de camions-citernes. Étant donné la situation, il est impossible ou du moins problématique de connecter tous ces véhicules à des bornes de recharge. Faut-il alors demander aux conducteurs de ces véhicules d’aller les recharger à l’extérieur de la grande zone frappée par la panne d’électricité, ce qui serait une perte à la fois d’énergie et de temps ? N’oublions pas que des millions de personnes, privées d’électricité, ne peuvent plus chauffer leurs domiciles et se réchauffer en mangeant de la nourriture chaude, et sont peut-être sur le point de manquer de nourriture et d’eau. N’oublions pas que, faute de systèmes de chauffage au gaz naturel et de génératrices au diesel ou au propane, même l’alimentation en électricité et le chauffage de centres d’hébergement temporaires pour ces personnes et aussi pour les secours ne seraient même pas assurés dans les zones les plus durement touchées. Par conséquent, le temps presse ! Ce n’est pas de la plaisanterie !

Ce n’est donc probablement pas une idée de réduire la diversité de nos sources d’énergie, et de faire dépendre presque entièrement ce qu’il nous faut pour vivre du réseau électrique. Cela ne vaut pas seulement pour les tempêtes de verglas, mais aussi pour les ouragans et les tremblements de terre, à quelques différences près.

Il se peut qu’on trouve des solutions aux difficultés présentées ci-dessus, et que certaines d’entre elles existent déjà. Tant mieux si c’est le cas. Mais il faudrait nous assurer qu’elles fonctionnent avant d’y aller à fond avec le virage énergétique vert. La prudence la plus élémentaire l’exige. Ne pas le faire, cela reviendrait à supposer bêtement que les événements météorologiques extrêmes, comme on les appelle, cesseraient de se produire simplement parce que nous croyons agir de manière respectueuse de l’environnement. Comme si la Nature était une sorte de divinité qui nous punit grâce à des catastrophes naturelles quand nous l’offensons, et qui nous récompense quand nous la vénérons !