Une mésaventure chez l’optométriste

Il m’est arrivé au cours des derniers mois une mésaventure à mon avis symptomatique du mauvais état de notre système de santé et de l’incompétence des nombreuses personnes qui y travaillent. Depuis déjà quelques décennies, j’évite autant que possible d’avoir affaire aux médecins, quelle que soit leur spécialité. Je n’arrive pas à compter toutes les fois, quand j’étais enfant ou adolescent, où ils ont fait des erreurs de diagnostic, où ils m’ont référé à des spécialistes pour vérifier si je n’avais pas tel syndrome et où ils m’ont prescrit des traitements médicamenteux superflus, inefficaces et dont les effets secondaires étaient pires que les maux qu’ils étaient censés atténuer ou soigner, par exemple un produit décongestionnant qui me faisait faire de l’insomnie, qui me mettait dans un tel état d’excitabilité qu’il m’était impossible de rester en place, et qui me rendait tellement irritable que j’en venais à chercher noise aux personnes que je fréquentais pour des peccadilles. À ce compte, vraiment, je préfère supporter mes allergies au pollen et à la poussière.

L’hiver dernier, j’ai dû mettre de côté mes principes et consulter une optométriste parce que je me suis retrouvé, du jour au lendemain, à avoir très mal de l’œil gauche et à avoir des douleurs dans cet œil, à un tel point qu’il m’était difficile de lire et d’écrire, et que j’avais de la difficulté à dormir. N’ayant pas de médecin de famille (je n’en veux pas) et peu chaud à l’idée d’aller passer un examen de la vue pour quelque chose qui me semblait temporaire, j’ai pris mon mal en patience. La douleur a disparu après quelques jours et ma vue est redevenue très bonne, comme elle l’avait toujours été jusque-là. Mais environ deux semaines plus tard, les symptômes ont recommencé avec une intensité variable selon les jours. Il m’arrivait parfois de voir en double, en triple et même quadruple, et je devais porter des lunettes fumées pour écrire les billets de ce blogue, alors que le Freedom Convoy était à Ottawa. Après quelques jours, je n’en pouvais plus et j’ai donc pris un rendez-vous pour aller passer un examen de la vue. C’était au plus fort de la folie covidiste et les optométristes passaient autant de temps à s’isoler préventivement parce qu’ils toussotaient et à désinfecter leurs instruments, les chaises et les poignées de porte, qu’à faire passer des examens de la vue. Pas moyen d’avoir un rendez-vous avant trois semaines. Chez d’autres optométristes, c’était encore pire : ils prenaient tellement de retard qu’il m’aurait fallu attendre au moins six semaines.

La première chose que la réceptionniste m’a demandé, après avoir inscrit mes coordonnées dans mon dossier, était la date de mon dernier examen de la vue. Je lui ai répondu franchement, ou naïvement, que je n’avais jamais passé un examen de la vue complet, chez l’optométriste, et que j’avais seulement passé des tests de la vue assez simples chez mon médecin de famille quand j’étais enfant et adolescent, et aussi avant mon examen pour obtenir mon permis de conduire. La femme, qui devait avoir approximativement le même âge que moi, et qui était muni de larges lunettes appuyées sur le haut de son masque chirurgical, me regarda de travers et me demanda de confirmer que j’avais 47 ans, après quoi elle me demanda de prendre place dans un fauteuil pour attendre que mon tour vienne.

Après avoir passé les tests préliminaires (photographie de la rétine, mesure du champ de vision et prise de la pression interne des yeux), j’entrai dans le bureau fraîchement désinfecté de l’optométriste, laquelle m’attendait de pied ferme. Elle me redemanda depuis combien de temps je n’avais pas passé d’examen de la vue et revérifia mon âge. Je crus deviner un rictus de désapprobation ou même d’indignation mal contenue sous son masque chirurgical. Elle me posa alors quelques questions sur mes problèmes de vue et écouta distraitement mes réponses, comme si elles ne faisaient que confirmer ce qu’elle savait déjà, et en ne semblant pas accorder la moindre importance au fait que mes problèmes de vision étaient récents, épisodiques et variables dans leur gravité.

À sa demande, je pris place sur une sorte de fauteuil de dentiste et je commençai à répondre à ses questions en regardant dans l’optomètre. Je suffoquais de plus en plus sous le masque chirurgical qu’on m’obligeait à porter pour passer cet examen de la vue, conformément aux directives des hautes autorités sanitaires de la province, qui certainement voulaient mon bien et celui de mes concitoyens. Les lentilles de l’appareil s’embuaient et, pour mon mauvais œil comme pour mon bon œil, je me demandais dans quelle mesure la difficulté que j’avais à voir clairement les lettres était due à cette buée ou à un véritable problème de vision. Je descendis mon masque sous mon nez en déclarant qu’il n’était pas possible d’obtenir des résultats qui vaillent quelque chose autrement. L’optométriste déclara, d’une voix de bigote, qu’elle refusait de continuer l’examen de la vue si je ne remontais pas mon masque immédiatement. Pas moyen de la raisonner. Je me résignai à remonter mon masque et, pour donner l’impression qu’elle se souciait tout de même des résultats, elle me tendit un chiffon avec lequel je devais constamment essuyer les lentilles de l’optomètre afin de réduire mes chances d’être déclaré aveugle ou malvoyant.

S’appuyant sur les mauvais résultats ainsi obtenus, l’optométriste me déclara atteint d’astigmatisme et d’hypermétropie avancés, que ma vue à longue distance ou même à moyenne distance était très mauvaise pour mon œil gauche et aussi pour mes deux yeux à la fois, et était tout au plus correcte pour mon œil droit seul. Quant à ma vision de proche, elle était mauvaise, mais à un moindre degré. Je lui demandai si une telle dégradation de la vue à cause de l’hypermétropie pouvait se produire rapidement. Elle me répondit que cela pouvait arriver parfois, mais que généralement ça se développait au fil des années ou que c’était congénital. Puis elle grogna que, puisque je n’avais jamais passé un vrai un examen de la vue, je faisais peut-être de l’astigmatisme et de l’hypermétropie depuis que j’étais enfant et que cela n’avait jamais été détecté et s’était gravement empiré avec l’âge. Voilà ce qui arrive immanquablement quand on ne passe pas régulièrement des examens de la vue et qu’on se rend coupable de négligence ! Je protestai que j’étais certain que la dégradation de ma vision était récente puisque je m’en serais aperçu bien avant, à courte distance, en lisant, et à longue distance, en faisant des promenades. L’optométriste ne daigna pas me répondre. Elle déclara qu’elle allait me prescrire des lunettes dont les verres seraient très forts, et qu’il ne fallait pas m’attendre à ce que ça fasse des miracles. De proche, ça devrait aller, mais de loin, ma vue serait loin d’être bonne. À quoi elle ajouta qu’il me faudrait des mois pour m’habituer à mes lunettes, étant donné l’écart de force entre les deux verres. Je devais m’attendre à avoir mal à la tête et aux yeux pendant cette période d’adaptation, et à avoir aussi des étourdissements et des difficultés de coordination. Enfin elle allait me référer à un ophtalmologue pour passer des examens plus avancés et voir s’il était possible d’améliorer ma vue grâce à une opération. À cause de la « pandémie » et du retard accumulé, je ne devais pas m’attendre à obtenir un rendez-vous avant cinq ou six mois, ou davantage si la « pandémie » s’aggravait et se poursuivait. En attendant, je ne devais pas me bercer d’illusions : étant donné l’état lamentable de ma vision, il n’était pas certain qu’une opération allait donner de bons résultats. Il me faudrait vraisemblablement apprendre à vivre avec les conséquences de ma négligence et du peu de soin que j’avais pris de mes yeux.

La bigote ouvrit la porte de son bureau, pour montrer que l’audience qu’elle avait daigné m’accorder était terminée. Elle me confia à une opticienne qui devait me vendre une monture, non sans se plaindre amèrement à elle de ma négligence et de ma culpabilité, car avait-on idée, surtout à l’âge que j’avais (les deux femmes devaient avoir environ la moitié de mon âge), de ne pas faire surveiller régulièrement l’évolution de sa vue par des optométristes agréés !

Après cette petite scène et le départ de l’optométriste, l’opticienne m’apprit que j’avais le droit d’enlever mon masque pour essayer les différents modèles de monture, car acheter des lunettes, surtout quand ce sont les premières, devrait être une fête. Il était nécessaire qu’elles conviennent à mon visage. Curieusement, il en allait autrement quand il s’agissait d’enlever mon masque pendant l’examen de la vue pour que les verres conviennent à l’état de ma vision. Mais tout s’explique : on me fit payer un supplément pour amincir les verres épais nécessaires pour la piètre vision dont j’avais fait preuve lors dudit examen, et pour ne pas avoir l’air d’un monstre d’aquarium.

Quelques semaines passèrent. Ma vue de proche s’améliora de manière significative, ce qui me permit de lire et d’écrire à peu près comme avant. Toutefois il m’arrivait souvent d’avoir mal aux yeux et ma vue de loin, surtout avec mon œil gauche, n’était pas meilleure avec mes lunettes. Elle était même peu à peu devenue meilleure sans mes lunettes qu’avec mes lunettes. Après quelques mois, alors que je croyais m’être enfin habitué à mes lunettes et que ma vue de loin avec mes lunettes s’était améliorée, les douleurs s’amplifièrent, ma vue de loin et de proche se dégrada à nouveau, et mon bon œil devint parfois mon mauvais œil et vice versa.

Pour mettre toutes les chances de mon côté, je décidai d’attendre la fin de l’obligation de porter un masque dans les commerces et je pris rendez-vous à la même lunetterie, mais avec un autre optométriste. Après seulement quelques minutes, celui-ci en vint à la conclusion que les problèmes de vision qu’on avait dépistés lors du premier examen étaient en grande partie dus à une cause temporaire, à son avis un œdème qui avait guéri depuis et qui était lié à son avis à des déformations mineures de la cornée. J’informai cet optométriste que j’avais pourtant dit à sa collègue que mes problèmes de vision étaient apparus soudainement et qu’ils étaient inconstants, et donc qu’elle s’était trompée dans son diagnostic et m’avait prescrit des verres beaucoup trop forts. Malgré quelques tentatives de ma part, l’optométriste se garda bien de confirmer cette erreur, mais me félicita pour l’amélioration de ma vue et me dit que j’avais besoin de nouveaux verres : celui de mon œil gauche beaucoup moins fort, et celui de mon œil droit un peu plus fort, puisque mon œil droit avait dû travailler plus fort pour compenser pour mon autre œil quand il était enflé (et pas pour compenser aussi pour cet œil à cause du verre trop fort qu’on m’avait prescrit, bien sûr). Ne disposant pas d’une copie de mon dossier qui était enregistré sur les serveurs de la lunetterie, je n’insistai pas. Après m’avoir conseillé de faire confirmer son diagnostic par l’ophtalmologue quand je finirais par obtenir un rendez-vous, l’optométriste sortit quelques minutes pour parler à l’opticienne avec laquelle je devais discuter du changement des verres de mes lunettes. Celle-ci m’offrit un rabais significatif, toujours sans reconnaître qu’il y a eu une erreur de diagnostic, en disant simplement que c’était ma deuxième paire de lunettes en moins d’une année et qu’on comprenait que ça coûtait cher. Sachant qu’on pourrait très bien modifier mon dossier avant de m’en donner une copie, et préférant ne pas perdre encore plus de temps avec cette histoire alors qu’il y a des choses bien plus graves que mes problèmes de vision qui sont en train d’arriver, j’ai conclu la transaction.


Mon but, dans ce billet, n’est évidemment pas de vous raconter une « tranche de vie », ou encore d’étaler mes problèmes de santé sur la place publique dans l’espoir d’obtenir la pitié de mes lecteurs pour la pauvre victime que je serais. Cela ne me servirait à rien, et ne vous servirait à rien non plus, d’autant plus que je m’en suis tiré assez bien, à moins que le deuxième optométriste ait lui aussi fait une erreur de diagnostic, et qu’en réalité je sois atteint d’une maladie oculaire peut-être grave qu’il n’a pas détectée et dont les symptômes pourraient s’aggraver, faute d’un traitement adéquat.

Ce qui m’intéresse, ce sont les raisons pour lesquelles cette erreur de diagnostic et de prescription semble s’être produite et les efforts faits pour la dissimuler. Car il se pourrait que les mêmes causes soient à l’origine d’autres erreurs de la même espèce, de manière générale, et plus particulièrement en lien avec la fameuse « pandémie » et les fameux « vaccins ».

Analysons d’abord la manière dont cette erreur s’est produite. Ma réponse à la première question de l’optométriste a orienté le reste de l’examen de la vue qu’elle m’a fait passer. Les observations faites et les informations obtenues ont été interprétées, prises en considération ou écartées en fonction du fait que je ne me suis pas soumis à une surveillance régulière de ma vue (avec la circonstance aggravante de mon âge), alors que c’était mon devoir de la faire. Elle déduisit alors de ce grave manquement à la morale sanitaire de graves problèmes de vision permanents, et exclut d’entrée de jeu une affection temporaire capable de dégrader ma vue. Trop occupée à me gronder comme un enfant et à me sermonner comme un pécheur, les tests qu’elle me faisait passer et les questions qu’elle me posait avaient pour principale fonction de confirmer ce qu’elle croyait déjà savoir en vertu de cette morale profondément enracinée dans son esprit et dans son cœur, et aussi, à son avis, dans l’ordre causal du monde. Il est impardonnable d’essayer de se soustraire ainsi à la surveillance optométrique et de ne pas prendre soin de santé oculaire ! On ne saurait impunément agir ainsi. Tôt ou tard, on finit par être dûment châtié. L’important pour les personnes comme elle, c’est alors de nous faire sentir que nous sommes punis, quitte à faire passer des tests qui ne sont que de simples formalités devant montrer ce qu’elles sont censées montrer.

Cette morale superstitieuse est comme des lunettes aux verres déformants et embués qui permettent aux optométristes bigotes de voir seulement ce qu’elles désirent voir, comme des œillères qui réduisent leur champ de vision et qui les rendent aveugles à ce qu’elles ne veulent pas voir, et qui peuvent nous rendre aveugles aussi, au sens propre et au sens figuré, si nous prêtons foi à ce qu’elles disent et nous en remettons aveuglément aux diagnostics qu’elles font et aux traitements qu’elles choisissent.

Heureusement, tous les optométristes ne sont pas ainsi. Plusieurs sont certainement compétents et ne sont pas superstitieux et moralisateurs. Le deuxième optométriste que j’ai consulté le montre bien. Cependant, il a refusé de reconnaître ouvertement l’erreur de diagnostic et de traitement commise par sa collègue. C’est que les membres de la corporation des optométristes se protègent les uns les autres, surtout quand ils travaillent pour la même lunetterie ou pour la même chaîne de lunetteries, pour ne pas nuire à leur réputation commune et à celle de leur employeur. Il est facile de dissimuler ces erreurs et de sauver les apparences grâce au contrôle qu’exercent les optométristes sur les dossiers de leurs patients.

Demandons-nous maintenant dans quelle mesure sont fréquents ce mélange de médecine et superstition et cette confusion entre la médecine et la superstition, ainsi que les erreurs médicales qui découlent souvent d’eux ? Car les optométristes ne sont certainement pas les seuls professionnels de la santé à être atteints de ces maladies et ne sont probablement pas ceux qui sont les plus gravement atteints. Les nombreux médecins généralistes et spécialistes qui, depuis plus de deux ans, font des déclarations publiques pour nous moraliser, nous menacer individuellement et collectivement de graves problèmes de santé si nous nous n’obéissons pas aux consignes de la santé publique, et pour expliquer les hausses réelles ou imaginaires des « cas » de COVID et des hospitalisations et des décès liés à la COVID, par le manque d’adhésion au lavage des mains, à la distanciation sociale, au dépistage, au traçage des contacts, à l’isolement préventif et à la vaccination récurrente, ces médecins, dis-je, le montrent très clairement.

Nombreux sont les cas où, à la suite d’une éclosion réelle ou fantasmée, les professionnels de la santé et les autorités sanitaires se sont mis à supposer l’existence de coupables, et à chercher et à trouver ces coupables, qui par exemple avaient tenu des propos sacrilèges sur les mesures soi-disant sanitaires, ne les respectaient pas toujours et auraient essayé de soustraire activement à la surveillance et au contrôle sanitaire. À l’inverse, combien de soignants et de malades non « vaccinés » ont-ils été soumis et continuent-ils d’être soumis à un dépistage systématique ou récurrent dans les milieux hospitaliers, même quand ils n’ont pas symptômes, parce que les autorités sanitaires et une partie de personnel médical sont convaincus qu’ils doivent attraper la COVID parce qu’ils n’ont pas voulu se protéger et protéger les autres en se faisant administrer quelques doses de merveilleux sérum, ou hésitent à recevoir les doses de rappel ? Pour les mêmes raisons, dans combien de cas leur a-t-on fait passer seulement des tests de dépistage de la COVID, et pas d’autres maladies respiratoires d’origine infectieuse ? Non seulement les personnes qui négligent de se protéger et de protéger les autres seraient plus disposés à attraper la COVID et à la transmettre aux autres, et à tomber malades et à rendre malades, mais cela devrait aussi arriver en vertu de l’ordre moral immanent qui réglerait l’enchaînement des causes et des effets. À cause de cette manière de penser des autorités sanitaires et des professionnels de la santé, les personnes bien-portantes, malades ou mortes et diagnostiquées à tort et à travers de la COVID doivent être nombreuses. C’est le contraire qui serait étonnant.

À l’inverse, combien de personnes ont vraisemblablement souffert d’effets secondaires des vaccins, par exemple d’une myocardite, et ont vu les médecins généralistes, les urgentistes et les cardiologues qu’ils ont consulté exclure d’emblée cette possibilité au nom de la même morale superstitieuse ? Comment se pourrait-il que les bonnes personnes qui ont fait leur part en se faisant injecter quelques doses de merveilleux sérum soient récompensées de leurs bonnes actions par de tels effets secondaires ? Ça ne serait pas juste ! Ces problèmes cardiaques devraient certainement être dus à autre chose, et ce serait seulement l’imagination des personnes influençables qui leur ferait croire que c’est une myocardite causée par la « vaccination ». À la rigueur, certains d’entre eux s’imagineraient qu’ils ont des douleurs cardiaques à la suite d’une exposition aux théories complotistes et à la propagande « antivax ».

Une telle confusion entre la morale, d’un côté, et la médecine et la science, de l’autre, ne peut qu’être mauvaise pour notre santé et la vérité. Et comment tirer les choses au clair quand ce sont précisément les médecins et les scientifiques qui souffrent de cette confusion qui contrôlent nos dossiers médicaux et les données collectées dans le cadre des études dont nous sommes l’objet, du seul fait d’utiliser le réseau public de santé ?

Mais ça ne s’arrête pas là. Étant donné les sanctions politiques et économiques qu’on nous impose, de manière globale ou ciblée, à cause de cette confusion ou en tirant profit de cette confusion, ce sont nos droits et nos libertés, nos institutions politiques, nos conditions de vie et notre avenir en tant que société et civilisation qui sont menacés. C’est donc à tort que certains reprochent aux médecins et aux scientifiques de manquer de moralité et expliquent par ce manque de moralité la situation dans laquelle nous nous trouvons. Si les médecins et les scientifiques passaient moins de temps à nous moraliser, si la médecine et la science n’étaient pas souvent réduites à des instruments utilisés dans cette grande campagne de moralisation, nous n’en serions pas là aujourd’hui. Mais on aurait tort d’en conclure que ce que nous devons réclamer des médecins est simplement une absence de morale. En fait, c’est une autre morale qu’il faut attendre d’eux. La rigueur intellectuelle et l’aversion pour les présupposés moraux et la superstition qui l’accompagne souvent font certainement partie d’une morale que les médecins et les scientifiques devraient adopter, et dont la valeur et l’utilité de leur discipline dépendent grandement. Et on pourrait en dire autant des intellectuels, qu’ils pratiquent la sociologie, l’anthropologie, la philosophie, la science politique ou l’histoire, par exemple. Sinon tout ce beau monde se comportera comme des mamans et des papas, des bigots et des curés inférieurs moralement et aussi intellectuellement au peuple qu’ils affectent de mépriser et auquel s’adressent leurs sermons, mais qui en fait est assez souvent plus réaliste qu’eux et voit plus clair qu’eux.