Lobbyisme des marchands de vaccins au Québec et au Canada

Ce n’est pas un secret que les activités de lobbyisme ont une influence considérable sur les politiques de nos gouvernements. Et le secteur de la santé ne fait pas exception. Où il y a beaucoup d’argent à faire, il y a forcément des lobbyistes.

Pour plus de transparence, les lobbyistes doivent s’inscrire aux registres fédéral et provincial quand ils prennent l’initiative de communiquer avec des décideurs publics pour influencer, en autres, les orientations ou obtenir des contrats. Mais avec la restriction suivante, au Québec, sans doute renforcée à la suite de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, qui excuse toutes sortes de pratiques qui seraient jugées illégales ou non conformes à l’éthique dans un autre contexte :

« Précisons d’entrée de jeu que le fait, pour un représentant d’entreprise ou d’organisation, de répondre à la demande d’un décideur public (élu, fonctionnaire ou personne nommée à un organisme du gouvernement au sens de la Loi sur le vérificateur général) n’est pas une activité de lobbyisme au sens de la Loi. Bref, lorsqu’un décideur public initie la communication, il ne s’agit pas de lobbyisme. Par exemple, dans le but d’assurer les services essentiels, les ministères et organismes sollicitent quotidiennement des interlocuteurs des organismes à but non lucratif ou des entreprises qui répondent à leurs demandes. Dans ces circonstances, la Loi ne trouve donc pas application. »
Communications avec les décideurs publics en lien avec la COVID-19 : quand la Loi s’applique-t-elle? », 24 mars 2020.)

Cela laisse donc une bonne marge de manœuvre aux décideurs publics et aux lobbyistes pour contourner la loi en toute légalité, ou à peu près. Les activités inscrites au registre ne représentent donc qu’une partie des activités de lobbyisme qui ont lieu.

Mais même quand on fait les choses dans les règles, en s’inscrivant au registre des lobbyistes, cela n’en pose pas moins problème, même s’il n’y a pas de corruption au sens strict du terme, c’est-à-dire avoir recours à des pots-de-vin pour obtenir en retour une faveur (ce que l’inscription au registre n’empêche pas et ne permet pas de vérifier). Malgré une description générale des mandats des lobbyistes, les citoyens ne savent pas exactement ce qui se trame derrière les portes closes et, à moins d’être des naïfs ou des cyniques (les extrêmes se rejoignent), se méfient de l’influence que peuvent exercer les lobbyistes sur les décideurs publics, souvent au détriment des intérêts des citoyens. Ce qui est à mon sens, en raison de l’encadrement fourni par la loi et le registre des lobbyistes, une institutionnalisation de la corruption, à laquelle on donne un vernis de transparence et d’éthique.

Cependant le Registre des lobbyistes du Québec permet aux citoyens de faire des recherches sur la nature des mandats de lobbyisme qui sont déclarés publiquement.

En date du 3 juin 2021 (dernière modification le 28 janvier 2021), on trouve huit mandats de lobbyisme pour Pfizer Canada. Quinze personnes sont identifiées comme lobbyistes. Après une vérification rapide, il s’agit essentiellement de personnes qui occupent des postes de direction.

Comme cette gigantesque société pharmaceutique met aussi sur le marché des produits qui n’ont rien à voir avec la « gestion de la crise sanitaire actuelle », il ne s’agit pas ici de couvrir l’ensemble des mandats de lobbyisme. Cela serait beaucoup trop long dans ce billet. Je dis seulement que les efforts de Pfizer ont souvent pour objectifs d’obtenir l’ajout ou le maintien de leurs produits (pour l’infectiologie, l’anaphylaxie, la pneumologie, la douleur, l’arthrite, l’urologie, la ménopause, la cardiologie, les neurosciences, la maladie de Gaucher, l’oncologie, la gastroentérologie, l’immunologie, la dermatologie, l’hématologie, les produits injectables, les maladies rares, les produits biosimilaires et l’hémophilie) sur la liste des médicaments remboursables dans le cadre du Régime d’Assurance médicaments, ce qui est une condition nécessaire pour faire de bonnes affaires au Québec.

Voyons le mandat qui concerne plus précisément le vaccin contre la COVID-19, en plus d’autres vaccins de Pfizer.

La période de ce mandat a commencé en 2016, mais celui-ci a été modifié en octobre 2020 afin d’y ajouter le vaccin contre la COVID-19.

Les institutions visées sont nombreuses et détiennent l’essentiel du pouvoir quant à la détermination des politiques de santé québécoises, de manière générale et plus particulièrement quant à la « gestion de la crise sanitaire actuelle ».

Si bien que les lobbyistes identifiés par Pfizer ont ou peuvent avoir des relations avec une foule de personnes puissantes ou influentes, qui font partie du gouvernement ou de la fonction publique. Le registre, par sa nature même, ne nous permet pas de savoir quelles sont exactement la nature, l’étendue et la fréquence de ces relations, et nous informe encore moins sur les actes de corruption plus directs que ces relations pourraient favoriser et qui n’existent certainement pas seulement dans les secteurs de la construction et des technologies de l’information, par exemple.

Tout ce que nous savons, c’est que Pfizer Canada dépense vraisemblablement beaucoup d’énergie pour faire avancer ses intérêts au Québec. La description de ce mandat – modifiée comme je l’ai dit pour ajouter le vaccin contre la COVID-19 en 2020 – peut néanmoins nous procurer quelques indices utiles pour nous faire une idée des manœuvres de cette société pharmaceutiques. Le libellé est resté exactement le même, à part l’ajout dudit vaccin, qui se retrouve à être assimilé aux vaccins utilisés dans des contextes plus normaux. D’un autre côté, c’est le seul vaccin qu’on s’est donné la peine de nommer, ce qui veut dire que malgré tout on tient à le distinguer des autres vaccins. C’est visiblement une priorité de Pfizer et on doit se dire que c’en est aussi une du gouvernement du Québec.

Pour comprendre ce qu’implique ce mandat ayant pour objectifs l’inscription de ce vaccin au programme d’immunisation et la gratuité de la vaccination (son remboursement), il faut prendre en considération ceci :

  • Même si la santé est une prérogative provinciale, c’est le gouvernement fédéral qui a conclu un contrat d’approvisionnement avec Pfizer et qui distribue les doses aux provinces, ce qui serait justifié par la « crise sanitaire ».

  • Le gouvernement du Québec pouvait difficilement organiser une campagne de vaccination massive de toute la population sans intégrer les vaccins à son programme d’immunisation et rendre la vaccination gratuite pour la population, malgré les dépenses importantes que cette campagne implique.

C’est pourquoi je n’arrive pas à voir en quoi ce mandat de lobbyisme sert les intérêts de Pfizer dans le contexte précis de l’actuelle campagne de vaccination massive de la population québécoise. Du seul fait de l’approvisionnement des provinces par le gouvernement fédéral et de l’organisation de cette campagne considérée comme la seule voie de salut, il en résulte que son vaccin contre la COVID-19 devait forcément être inscrit au Programme d’immunisation et que les frais d’organisation allaient être assumés par notre gouvernement ; et ce, sans l’intervention des administrateurs de Pfizer à titre de lobbyistes. Alors pourquoi avoir ajouté de manière aussi explicite le vaccin contre la COVID-19 à ce mandat de lobbyisme ?

Peut-être était-il malgré tout nécessaire pour Pfizer, à l’automne 2020, de communiquer avec le gouvernement québécois pour accélérer et faciliter l’inscription de son vaccin au Programme d’immunisation en vue de la campagne de vaccination qui devait commencer en décembre 2020. Peut-être y avait-il des formalités qu’il n’était pas possible d’accomplir par le truchement du gouvernement fédéral. Alors le gouvernement québécois aurait très pu prendre l’initiative de communiquer avec Pfizer, ce qui aurait placé ces communications hors du champ d’application de loi provinciale sur le lobbyisme. Sans compter que si le vaccin à ARN messager de Pfizer est bel et bien un vaccin, et non un produit de thérapie génique, le mandat de lobbyisme portant sur les vaccins en général et déjà inscrit au registre aurait dû permettre aux lobbyistes d’entrer en communication avec les décideurs publics en toute légalité.

Peut-être ne s’agit-il pas, dans ce mandat de lobbyisme, de l’actuelle campagne de vaccination. J’insiste sur le fait qu’il n’est pas seulement question, pour Pfizer, d’intégrer le vaccin contre la COVID-19 dans le Programme d’immunisation du Québec pour le rendre remboursable, mais aussi de travailler à ce que cette intégration audit programme soit éventuellement maintenue, comme pour d’autres vaccins. Rappelons qu’à l’automne les experts et les représentants des sociétés pharmaceutiques disaient déjà que la vaccination de toute la population n’allait pas avoir des effets miraculeux et n’impliquait pas nécessairement la fin de la « pandémie » et la victoire définitive sur le coronavirus, en invoquant les incertitudes entourant la durée de l’immunité et l’efficacité des vaccins contre les nouveaux variants. Ce n’est donc pas du complotisme que de supposer que Pfizer, qui sait certainement veiller à ses intérêts économiques, fasse des démarches auprès des autorités politiques et sanitaires des provinces en prévision du moment où l’on jugera que la phase critique de la pandémie est terminée (après l’injection de deux doses de vaccin à au moins 75 % de la population, ou après l’injection des doses de rappel prévue à l’hiver 2022 par le gouvernement fédéral, ou plus tard encore), et où les gouvernements provinciaux devraient prendre le relais du gouvernement fédéral en matière d’approvisionnement en vaccins, qu’il s’agisse de vacciner toute la population ou seulement les personnes jugées plus à risque.

Si ces conjectures sont fondées, le gouvernement provincial deviendra – après le gouvernement fédéral – la vache à lait de Pfizer, et aussi d’autres sociétés pharmaceutiques, par exemple AstraZeneca, qui a aussi inscrit au registre des activités de lobbyisme à propos de son vaccin contre la COVID-19.

Ce qui est intéressant, dans le cas d’AstraZeneca, c’est l’existence de deux mandats :

  • un mandat qui semble concerner seulement le maintien de l’utilisation du vaccin dans l’actuelle campagne de vaccination massive, qui doit avoir pour origine la décision de suspendre et de restreindre l’utilisation de ce vaccin en mars 2021, et qui se terminera à la fin de l’année 2021, s’il n’est pas renouvelé ;

  • un autre mandat qui semble concerner ce qui vient après la campagne de vaccination massive en cours et qui est formulé exactement de la même manière (au nom près de la compagnie) que le mandat de Pfizer analysé plus haut.

Il est donc plausible que l’industrie pharmaceutique s’efforce, par des activités de lobbyisme, d’influencer les autorités politiques et sanitaires québécoises afin de pérenniser la vaccination contre la COVID-19, qu’il s’agisse de campagnes massives ou de campagnes ciblées, dont le but pourrait être de maintenir pendant des années l’immunité prétendument procurée par les vaccins ou de procurer une immunité contre de nouveaux variants.

Allons maintenant voir ce qu’il en est du lobbyisme auprès du gouvernement fédéral, actuellement responsable de l’approvisionnement des vaccins pour toutes les provinces et tous les territoires canadiens. Voici ce que l’on obtient quand on fait une recherche pour Pfizer dans le registre fédéral des lobbyistes :

Libres à vous d’établir ou non une relation entre, d’un côté, les efforts faits par Pfizer pour maintenir et augmenter le financement de la stratégie nationale d’immunisation et discuter de la fourniture de vaccins (deuxième point de forme) et, de l’autre,  l’approvisionnement futur en vaccins auprès de Pfizer, après 2021.

Moderna et AstraZeneca, même si elles font elles aussi du lobbyisme auprès du gouvernement canadien, semblent avoir été exclues de ces contrats par leur compétiteur plus féroce.

Ainsi la question se pose de savoir si nos autorités politiques et sanitaires fédérales sont corrompues au point de vouloir tous nous vacciner encore deux ou trois fois contre la COVID-19 et les futurs variants pour enrichir les sociétés pharmaceutiques et consolider les pouvoirs exceptionnels dont elles disposent aussi longtemps que dure la « pandémie » ; ou si elles sont tout simplement stupides ou folles. En ce qui concerne notre cher premier ministre du Canada, voici une vidéo pour vous aider à vous faire une idée. Que d’enthousiasme dans ce boniment pour la vaccination !