Sur les lieux et les activités pour lesquels le passeport vaccinal sera exigé

Comme annoncé, je fais quelques remarques sur la liste des lieux et des activités pour lesquels le gouvernement exigera l’utilisation du passeport vaccinal à compter du 1er septembre.

La formulation de cette phrase est intéressante en ce qu’elle ne rend pas compte de la situation. Tout l’été les personnes non « adéquatement » vaccinées et les personnes « adéquatement » vaccinées ont eu accès aux lieux et ont pu faire les activités pour lesquels on commencera bientôt à exiger le passeport vaccinal. Il n’est donc pas tout à fait juste de dire que le passeport vaccinal permettra à ces dernières personnes seulement d’avoir accès à ces lieux et de participer à ces activités, comme si elles ne pouvaient pas déjà le faire avant l’implantation du passeport vaccinal, comme si nous sortions d’une période de confinement. En fait, ce que fait l’implantation du passeport vaccinal, c’est d’interdire aux personnes non « adéquatement » vaccinées d’avoir accès à des lieux auxquels elles avaient accès et de participer à des activités auxquelles elles avaient le droit de participer juste avant. Contrairement à ce que laisse entendre cette phrase, le passeport vaccinal ne procure pas une nouvelle liberté aux personnes « adéquatement » vaccinées, mais privent les personnes non « adéquatement » vaccinées d’une liberté.

Si l’une des raisons d’être du passeport vaccinal est vraiment de protéger les personnes non « adéquatement » vaccinées pour les empêcher de tomber malades et d’engorger les hôpitaux ou encore de propager le virus, si la situation est assez critique pour qu’on décide d’imposer un passeport sanitaire, pourquoi faudrait-il faire une exception pour les personnes qui ont une contre-indication reconnue à la vaccination contre la COVID-19 ? Risquent-elles moins de tomber malades et de propager le virus parce qu’elles ne peuvent pas se faire vacciner, comparativement à des personnes qui ont pris la décision de ne pas se faire vacciner sans avoir de contre-indication ? En admettant de telles exceptions, on montre deux choses : que la situation sanitaire est beaucoup moins grave qu’on le dit ; et qu’on cherche par le passeport vaccinal à punir les personnes non vaccinées sans contre-indications, pour qu’elles consentent enfin à se faire vacciner. En outre, il se peut que la superstition explique en partie ce traitement différent : l’aggravation de la situation sanitaire ne serait pas tant causée par la non-vaccination, que par le refus volontaire de la vaccination. D’où les attaques médiatiques haineuses contre ceux qu’on nomme les antivax et qui seraient en quelque sorte des hérétiques dont le manque d’orthodoxie provoqueraient des maux incommensurables.

Quant au fait d’appliquer le passeport vaccinal aux adolescents, elle contribuera certainement à les habituer, alors qu’ils sont encore tout jeunes, à être soumis à des contrôles pour ceci ou cela. Ce qui arrange certainement nos autorités politiques et sanitaires et nos employeurs, qui préfèrent avoir affaire à des sujets ou à des serfs, et pas à des citoyens.

On énumère ensuite les grandes catégories d’activités et de lieux visés par ce dispositif de contrôle des mouvements de la population vaccinée et non vaccinée : événements et festivals, salles de spectacles, cinémas, salles où se produisent des événements sportifs ; bars et restaurants ; casinos et maisons de jeux ; arcades, salles de billard, salons de quilles, activités intérieures ou extérieures de sites thématiques, etc. ; croisières ; congrès ; sports et activités physiques.

Il faut comprendre que pour tous ces lieux et pour toutes ces activités, il faudra des personnes pour vérifier le passeport vaccinal des participants. On peut donc s’attendre à voir des agents de sécurité de plus en plus souvent et en plus grand nombre, à des endroits où ils étaient rares ou absents avant. Ou ce sera de simples employés, des organisateurs, des surveillants ou des bénévoles qui joueront ce rôle, et qui prendront l’habitude de contrôler la circulation de leurs concitoyens et d’appliquer les décrets des autorités politiques et sanitaires, alors que les personnes soumises à ces contrôles s’habitueront en retour à subir des contrôles pas seulement par des policiers, pas seulement par des agents de sécurité, mais aussi par le premier venu qui décide ou dont on décide que c’est sa responsabilité de faire ces vérifications. De telles habitudes peuvent assurément renforcer les tendances policières du nouvel ordre social et politique qui est en train de se mettre en place.

Dans la section introductive de cette liste, on donne quelques précisions sur les sports et les activités sportives.

Au moins on n’a pas l’intention, pour l’instant, d’exiger l’embauche d’agents de sécurité ou de surveillants pour vérifier les passeports vaccinaux, et aussi les adresses des personnes affirmant habiter à la même adresse, à l’entrée des terrains de sport qui sont libres d’accès, pour l’instant. On y accepterait même la pratique de sports où il y aurait des contacts fréquents ou prolongés. Mais les exemples donnés entre parenthèses (tennis et patinage) n’ont pas été choisis en fonction de la dernière partie de la phrase, ou montre que l’on se fait une drôle d’idée des contacts fréquents ou prolongés.

Ce sommaire se termine par une drôle de phrase.

Ce qui revient à dire que le passeport vaccinal devra être utilisé dans des cas dont on ne parle pas dans ce document, le seul dont on dispose – moins de deux jours avant l’entrée en vigueur de ce dispositif de contrôle – pour savoir ce que l’on peut faire sans passeport vaccinal. À moins de précisions de dernière minute, je suppose qu’on s’en remettra au bon jugement de chaque policier pour juger s’il est permis d’entrer dans ces lieux non mentionnés et de participer à ces activités non mentionnées, ce qui revient à dire qu’on ouvre la porte à l’arbitraire, d’autant plus que les personnes non « adéquatement » vaccinées et les responsables des lieux et des activités ignorent exactement à quelle amende ou à quelle peine ils s’exposent en cas de non-application volontaire ou involontaire de l’exigence du passeport vaccinal. Car nul n’est censée ignorée la Loi, même quand elle est exprimée de manière vague et confuse. Dans le doute, il est craindre que ces responsables en fassent plus que moins.

Vient ensuite une liste de sports d’équipe, de combat ou impliquant des contacts rapprochés, qu’on interdit à l’intérieur comme à l’extérieur, avec les exceptions abordées plus haut.

Si bien qu’on n’aurait pas le droit de jouer au tennis en double à l’extérieur dans une école de tennis sans passeport vaccinal, mais qu’on devrait pouvoir le faire sur un terrain libre d’accès, probablement parce qu’il n’est pas possible, pour l’instant, de mettre des surveillants partout. Car on ne voit pas pourquoi le risque sanitaire ne serait pas élevé dans un cas, le serait dans l’autre.

Après quoi il y a une liste d’activités que la Santé publique juge moins dangereuses, et pour lesquelles le passeport vaccinal est requis seulement quand elles ont lieu à l’intérieur.

Même à l’intérieur, on voit mal comment le plongeon, la natation artistique individuelle ou le patinage artistique simple représenterait un risque sanitaire notable, plus grand par exemple que dans les milieux de travail, à moins qu’on suppose – au nom d’une morale austère et superstitieuse – que le risque est plus grand pour les activités non essentielles et amusantes que pour les activités essentielles et pénibles.

Enfin on a droit à une liste d’activités pour lesquelles le passeport vaccinal n’est pas exigé quand elles ont lieu à l’extérieur, ce qui laisse supposer qu’elles pourraient avoir lieu à l’intérieur, et qu’alors le passeport vaccinal serait exigé. Dans ce cas, pourquoi avoir fait une liste différente de la précédente ?

Outre le fait que le risque de contamination en faisant du tir à l’arc même à l’intérieur serait très faible – c’est un sport individuel, et il est convenu de ne pas se placer juste devant ou à côté de quelqu’un qui tire à l’arc –, on voit mal comment on pourrait jouer au golf à l’intérieur (le mini-putt n’étant pas vraiment du golf), y faire de l’équitation (et alors le risque de contaminer les autres cavaliers et les chevaux serait alors négligeable, si c’était possible), ou y faire du ski alpin, du ski de fond, du ski nautique, du surf des neiges et du télémark, ou encore de la planche à voile. Le pouvoir réglementaire a tellement monté à la tête de nos autorités politiques et sanitaires qu’elles sont venues à fantasmer la réglementation d’activités toujours ou presque toujours extérieures quand elles auraient lieu à l’intérieur. C’est comme si elles ne voulaient pas nous dire franchement que le golf, l’équitation, le ski et la planche à voile sont simplement autorisés, par crainte que nous abusions de cette liberté sans condition, par crainte que nous nous sentions trop libres, par crainte que nous tombions dans une licence incontrôlable, alors que les méchants variants se feraient de plus en plus menaçants et gagneraient en contagiosité et en virulence en raison de notre manque de discipline.

Après quoi il y a une longue liste de presque tous les lieux de convivialité, de divertissement, d’amusement et de culture où le passeport vaccinal est exigé, à l’exception des bibliothèques et des musées, pour l’instant. Je ne la reproduis pas dans ce billet. Je me contente seulement de dire qu’on voit ici à l’œuvre la morale austère, et aussi superstitieuse dans une certaine mesure, mise de l’avant par nos autorités politiques et sanitaires, qui entendent garder la « pandémie » sous contrôle et gérer les variants en privant les personnes non « adéquatement » vaccinées de ce qui est considéré comme agréable et superflu (à leurs yeux, c’est tout un quand il s’agit des non-vaccinés).

Finalement quelques brèves remarques sur la section « Autres » qui termine ce florilège d’interdictions.

Comme si nos autorités pouvaient raisonnablement espérer – dans l’état actuel des choses, à tout le moins – exiger le passeport vaccinal pour les rassemblements privés et les activités de chasse et pêche, qui ont souvent généralement lieu dans les bois ! Il ne s’agit donc pas de dire que le passeport vaccinal n’est pas requis dans ces cas, mais de dire qu’il ne peut pas être requis, ou du moins qu’il peut difficilement l’être, à moins de mettre place un système de surveillance perpétuelle sur l’ensemble du territoire du Québec.

On peut aussi se demander pourquoi les spas et les saunas représentent un risque sanitaire moins grand que la natation, le plongeon ou la fréquentation d’un jardin zoologique, d’un aquarium, d’un biodôme, d’un planétarium, d’un insectarium et d’un jardin botanique ou d’une exposition, choses toutes interdites sans passeport vaccinal. Même chose pour la fréquentation d’un lieu de culte, quand on le compare au fait d’assister à un spectacle ou d’aller au cinéma, sauf si on a un préjugé favorable à la pratique de la religion et défavorable aux amusements. Et on ne voit vraiment pas pourquoi les cours de dressage canin seraient plus essentiels et moins dangereux que de l’escalade en salle ou la gymnastique. Cela rappelle l’exemption de respecter le couvre-feu pour les propriétaires d’un chien. On dirait que nos autorités préfèrent les chiens aux êtres humains, surtout quand ils sont bien dressés et obéissants. Voilà qui pourrait expliquer en partie la politique de domestication qu’on nous inflige depuis mars 2020.

En guise de conclusion, je crois pouvoir dire sans me tromper que les prochaines moutures de cette liste d’interdictions contiendront encore plus d’incohérences et d’éléments arbitraires, et que nous risquons d’être submergés par une vague de règlements qu’on ne daignera peut-être pas mettre par écrit et exprimer de manière claire et concise. Quand on se met à réglementer la pratique de la pétanque intérieure et celle de la pétanque extérieure sous prétexte de gérer la propagation d’un virus, il peut difficilement arriver autrement chose qu’un déferlement réglementaire et arbitraire.