Levée de « l’essentiel » des mesures sanitaires d’ici la mi-mars et retour à la « vie normale »

Le premier ministre du Québec a fait cette annonce aujourd’hui :

« Le 14 mars, l’essentiel des mesures sera levé », s’est réjoui M. Legault alors que les Québécois pourront se rapprocher de la « vie normale ». »

(La Presse, 8 février 2022)

Ce qui veut dire :

  • qu’il n’y aura plus d’interdiction quant à la limite d’invités qu’on peut recevoir chez soi, même si la Santé publique recommande de s’en tenir à dix personnes ou aux résidents de trois foyers ;

  • qu’il sera permis dans les restaurants d’être dix personnes ou trois foyers assis à une même table ;

  • que la limite de spectateurs pour des événements qui se déroulent à l’extérieur sera portée à 5000 ;

  • que les commerces pourront rouvrir à 100 %;

  • que la capacité des salles de spectacles et des lieux de culte sera augmentée à 50 %, puis à 100 %;

  • que les activités sportives reprendront progressivement ;

  • que le télétravail cessera d’être obligatoire et sera seulement recommandé ;

  • que les bars pourront rouvrir leurs portes, et que la danse et le karaoké seront autorisés un peu plus tard ;

  • et que les restaurants pourront rouvrir complètement leur salle à manger.

Dans ce plan de déconfinement, il n’y a pourtant rien qui concerne le port obligatoire du masque dans les lieux publics fermés et dans les milieux de travail. On évoque tout au plus des assouplissements dans les écoles. Quant au passeport vaccinal, il est là pour rester, nous dit le ministre de la Santé et des Services sociaux. Même après la fin de l’urgence sanitaire :

« La fin de l’urgence sanitaire viendra quant à elle après l’adoption d’un projet de loi qui précisera les mesures exceptionnelles à conserver, comme le passeport vaccinal et les primes dans le secteur de la santé. Le texte législatif sera déposé en mars et son adoption pourrait venir ce printemps. »

Il est clair que notre gouvernement essaie de se payer notre tête. La « vie normale » dont il s’agit, c’est celle de l’automne dernier, avant qu’on nous impose de nouvelles restrictions en décembre. Notre premier ministre croit-il que nous avons une mémoire de poisson rouge et que nous ne nous rappelons pas de la vie avant la déclaration de l’état d’urgence, où nous n’avions pas à porter un masque dans les lieux publics fermés et au travail, et où nous n’avions pas à divulguer des informations médicales et à présenter une preuve d’identité pour entrer dans les restaurants, dans les cafés, dans les bars, dans les gyms, dans les salles de spectacle, dans certains commerces ? Le seul gain par rapport à l’automne dernier, c’est que ce qui était une obligation quant à la limite de personnes autorisées dans les rassemblements privés deviendra bientôt une recommandation. Allons-nous nous contenter de ces broutilles ?

Bien drôle de vie normale, pour les personnes vaccinées et non vaccinées, que de devoir continuer à porter un masque dans les lieux publics indéfiniment ! Bien drôle de vie normale, pour les personnes non vaccinées, que d’être tenus à l’écart de nombreux lieux publics et de nombreuses activités sociales ! Bien drôle de vie normale, pour les personnes vaccinées, que d’avoir à présenter leur passeport vaccinal et à rester à jour dans leur vaccination pour avoir le droit d’entrer dans ces lieux et de participer à ces activités ! Bien drôle de retour à la vie normale qui implique l’adoption d’un projet de loi pour conserver le passeport vaccinal ! Bien drôle de fin de l’état d’urgence sanitaire auquel survivront certaines des mesures exceptionnelles décrétées justement en raison de l’urgence sanitaire ! Et on a le culot de nous dire que c’est l’essentiel des mesures sanitaires qui sera levé !

Prenons au mot notre gouvernement, qui prétend être honnête avec nous. Interprétons l’affirmation selon laquelle l’essentiel des mesures sanitaires est levé de sorte qu’elle devienne vraie. Que conclure d’autre, de la levée de l’essentiel des mesures sanitaires, que les mesures sanitaires maintenues sont justement inessentielles ? Ou bien faut-il en conclure simplement que ces mesures, si elles sont bien essentielles, ne sont pas sanitaires et sont motivées par des raisons qui n’ont rien à voir avec notre santé ? Par exemple punir les non-vaccinés qui ont osé ne pas obéir au gouvernement et qui n’auraient pas faire leur part. Par exemple mettre en place de manière durable un dispositif de contrôle de nos déplacements et de nos actions, qui pourrait être appliqué plus tard à toutes sortes de choses, selon le bon plaisir du gouvernement caquiste et des gouvernements qui lui succéderont.

Il faudra faire bien attention à ce que notre gouvernement essaiera de mettre dans ce projet de loi, et ne pas céder à son chantage : « Pas de fin de l’état d’urgence sanitaire aussi longtemps que le projet de loi n’est pas adopté. » Rappelons que s’il s’entête et ne veut rien entendre, les élections provinciales approchent. N’oublions pas que la pérennisation de certaines restrictions et obligations, même si elle permettait dans l’immédiat de mettre fin à l’état d’urgence sanitaire et de retirer au gouvernement certains des pouvoirs exceptionnels dont il dispose, pourrait avoir des effets néfastes et rendre permanents certains de ces pouvoirs.


Pendant ce temps en Saskatchewan, le premier ministre reconnaît qu’avec Omicron, les inconvénients de l’obligation vaccinale et du passeport vaccinal dépassent leurs avantages, et dit vouloir respecter le choix des citoyens de sa province et mettre fin à la division de la société en deux classes de citoyens dont les droits diffèrent en fonction du statut vaccinal. Et en plus il mettra fin bientôt à l’obligation de porter un masque à l’intérieur. Curieusement, apprendre à vivre avec le virus ne veut pas dire la même chose en Saskatchewan et au Québec.