Le mythe de la science pure

Nous savons que les découvertes de la science moderne ne sont pas des révélations qui nous viennent du Ciel. Elles sont le résultat d’une démarche rationnelle qui se dégage des opinions communes et de l’illusion du savoir immédiat. Malgré tout, nous nous demandons rarement si les conditions nécessaires pour que la rupture scientifique ne soit pas un vain mot sont réalisées. Nous présumons alors que ce que nous appelons « science » est, du seul fait qu’on lui appose cette étiquette, répond aux exigences de la science et est vraiment ce qu’on croit qu’elle est. Puisqu’il en serait ainsi, nous supposons que les conditions nécessaires à une pratique rigoureuse de la science existent, car autrement il n’y aurait pas de science. Ce préjugé, qui nous fait penser à rebours, nous dispense donc de vérifier si ces conditions existent et aussi de les définir.

Malgré la formation très spécialisée qu’ils ont reçue, les scientifiques sont des êtres humains comme nous. Ce ne sont pas des esprits purs, désintéressés et désincarnés. Ils ont de l’attrait pour le confort et pour une certaine sécurité économique. Ils ont des dettes à rembourser à la fin de leurs études. Ils doivent payer l’hypothèque de leur maison ou de leur condominium, et peut-être aussi celle de leur chalet. Ils investissent tous les mois de l’argent dans leur RÉER dans l’espoir de pouvoir prendre leur retraite plus tôt, par exemple à 55 ans. Ils ont des enfants dont ils doivent assurer la subsistance et préparer l’avenir. Ils sont habitués à avoir un certain train de vie, qu’il s’agisse d’aller souvent manger au restaurant, de s’acheter une BMW ou de faire régulièrement des voyages à l’étranger. Même si les scientifiques gagnent généralement beaucoup plus d’argent que la plupart d’entre nous, leurs finances sont souvent serrées. En cela, ils se conforment aux mœurs de notre époque, qui veulent que nous dépensions au fur et à mesure tout l’argent que nous gagnons, et que nous nous endettions pour vivre au-dessus de nos moyens, même quand nous disposons d’une certaine richesse.

En raison de la situation économique dans laquelle ils se trouvent, les scientifiques ont intérêt à agir de manière à faire avancer leur carrière ou, s’ils ne sont pas particulièrement ambitieux, à conserver leurs acquis professionnels. En cela ils sont dans une situation analogue à celle des autres professionnels qui ont investi de l’argent et du temps pour acquérir une formation spécialisée, qui ont dû s’endetter pour étudier, qui s’attendent à un retour sur leur investissement et qui bénéficient de meilleures conditions de travail que les travailleurs moins qualifiés. Un fonctionnaire  à l’emploi d’un ministère ou d’un autre organisme public appliquera les procédures en vigueur sans les remettre en question et obéira à ses supérieurs immédiats ou aux hautes autorités, se conformera aux grandes orientations qui s’appliquent à son domaine d’emploi, et se gardera bien d’exprimer publiquement des critiques à leur sujet ou de communiquer aux citoyens des informations dont ils auraient intérêt à prendre connaissance ; sans quoi il serait rappelé à l’ordre, deviendrait la cible de pressions, obtiendrait de mauvaises évaluations, pourrait se faire refuser un avancement d’échelon salarial et pourrait même passer devant un comité de discipline et être suspendu ou congédié. Pour les mêmes raisons, un enseignant qui travaille dans une école primaire ou secondaire a intérêt à se conformer aux directives de la direction de l’établissement d’enseignement ou de la commission scolaire, à appliquer les programmes du ministère de l’Éducation, à ne pas aller à l’encontre des tendances pédagogiques du moment et à ne pas critiquer publiquement ces programmes de formation, ces tendances ou l’éducation qu’on dispense dans l’école où il travaille ou dans l’ensemble des écoles de la province ; sinon il pourrait avoir des ennuis semblables au fonctionnaire dont nous venons de parler. Les risques sont encore plus grands quand une soi-disant crise permet aux autorités petites ou grandes d’exercer un pouvoir arbitraire, encourage la surveillance et la dénonciation par les pairs et rend la moindre manifestation de non-conformisme passible de réprimandes, de sanctions ou de représailles. À moins de croire que les scientifiques soient des êtres humains moralement supérieurs, nous n’avons pas de raisons de supposer que ces personnes font preuve de plus d’indépendance et de courage que les autres professionnels, et qu’ils sont prêts à faire passer leur confort et leurs petits intérêts économiques après la pratique rigoureuse et intègre de leur discipline scientifique, la recherche de la vérité et l’utilité sociale quand il y a conflit entre eux.

Mettons-nous dans la peau d’un jeune chercheur en science. Il fait une maîtrise ou un doctorat dans une discipline scientifique donnée, par exemple en microbiologie ou en épidémiologie, ou encore en climatologie. Pour faire sa place et réussir sa carrière de chercheur, il choisit un sujet de recherche à la mode, pour lequel des équipes de chercheurs universitaires obtiennent du financement privé ou public, ce qui lui permet de se joindre à un tel équipe et d’obtenir une bourse de recherche ou des contrats en tant qu’étudiant-chercheur. Il est entendu que les recherches de cet étudiant et les résultats de celles-ci doivent être compatibles avec les recherches de l’équipe en question et les résultats qui sont visées. Cela fait partie des règles du jeu, surtout pour un étudiant-chercheur qui débute. Il comprend qu’il est dans son intérêt d’abonder dans le même sens que les professeurs-chercheurs qui dirigent ses recherches et avec lesquels il collabore, sinon il pourrait être exclu de l’équipe de recherche. En fait, une partie importante de son apprentissage consiste justement à faire sa part des recherches communes, conformément aux engagements pris vis-à-vis des bailleurs de fonds publics ou privés. Il serait mal venu, pour un novice, de remettre en question les protocoles de recherche utilisés et d’en arriver à des conclusions qui sont incompatibles avec les conclusions obtenues ou désirées du reste de l’équipe de recherche. Un étudiant-chercheur en microbiologie comprend que c’est son travail de contribuer à montrer l’efficacité et l’innocuité d’une nouvelle plate-forme pour des vaccins s’il fait partie d’une équipe dont les chercheurs ont investi plusieurs années dans ces recherches et sont généreusement financés par l’industrie pharmaceutique. En fait, cela s’applique aussi aux chercheurs aguerris, qui comprennent que certains résultats de recherche sont plus compatibles que d’autres avec les intérêts des compagnies pharmaceutiques qui les financent et avec leurs intérêts. Des remarques similaires pourraient être faites à propos de chercheurs en épidémiologie dont les conclusions remettraient en question l’efficacité de plusieurs mesures sanitaires, et qui ont obtenu une subvention de recherche publique ; ou à propos de chercheurs en climatologie qui, tout en étant financés par l’UNESCO, par un gouvernement qui s’apprête à effectuer une transition énergétique verte ou par des compagnies œuvrant dans le domaine de l’énergie solaire et éolienne, auraient la drôle d’idée d’adopter une attitude sceptique à l’égard des changements climatiques et du rôle joué par les gaz à effet de serre. Et il est évident que les scientifiques qui travaillent directement pour des organismes publics, pour des organismes supranationaux comme l’UNESCO ou l’Organisation mondiale de la santé, ou encore pour l’industrie pharmaceutique ou l’industrie de l’énergie renouvelable, disposent d’une indépendance et d’une liberté encore plus réduites, et qu’il est dans leur intérêt de servir les intérêts de ces organisations, quitte à leur sacrifier leur intégrité scientifique, la vérité et les intérêts des individus, de la société et de l’humanité, qui ne sont d’ailleurs pas des choses distinctes. La situation est encore pire quand ces sujets de recherche font l’objet d’une couverture médiatique incessante et partiale, qui prétend dire ce qu’est la vérité et relayer un consensus scientifique, et qui dit assez clairement que les voix dissidentes représentent un danger pour la société et l’humanité.

Qu’on me comprenne bien : il ne s’agit de sermonner les scientifiques, en espérant ainsi obtenir de beaucoup d’entre eux qu’ils sacrifient leurs intérêts individuels à la science et au bien public. Outre que cela ne serait pas réaliste, les scientifiques qui manifesteraient un certain esprit d’indépendance et une certaine capacité d’opposition seraient souvent repoussés dans les marges de la communauté scientifique ou en seraient exclus, et du même coup ils seraient privés des fonds et de l’équipement qui est nécessaire pour faire de la science. Nous n’en serions pas plus avancés. Ce qui ne veut pas dire non plus qu’ils ne sont pas corrompus par les conditions qu’on impose actuellement à la pratique de la science, et que les plus dociles ou pourris d’entre eux ne sont pas les plus avantagés. C’est justement parce qu’il en est ainsi que je ne crois pas que nous pouvons raisonnablement espérer que beaucoup d’entre eux se réveillent et arrêtent de collaborer avec la classe politique et l’élite globaliste qui sont en train de nous asservir, de nous appauvrir et de détruire notre santé physique et mentale.

C’est donc une politique scientifique qu’il nous faut, laquelle aurait pour effet qu’il serait dans l’intérêt des scientifiques de faire preuve plus d’indépendance, ou du moins que cela n’irait pas à l’encontre de leurs intérêts. Ce n’est certainement pas la classe politique qui nous la donnera, puisqu’elle est de toute évidence encore plus corrompue intellectuellement et moralement que les scientifiques. Quant à l’élite globaliste, n’en parlons même pas : la science n’est pour elle qu’un costume qu’il faut donner à l’obscurantisme et à la superstition qu’elle veut nous imposer directement ou par l’intermédiaire de nos gouvernements. Nous pouvons donc seulement compter sur nous-mêmes et, à la rigueur, sur nos concitoyens pour obtenir et même élaborer cette politique scientifique, avec l’aide des quelques scientifiques qui ont une colonne vertébrale et qui se soucient encore de la vérité et de l’utilité de la science pour la majorité des êtres humains. Il est vrai que beaucoup d’entre nous sont aussi dociles et corrompus moralement et intellectuellement que les scientifiques. Mais il y a une différence importante entre nous et eux : si le scientisme actuel profite pour l’instant à beaucoup de scientifiques, il nous est de plus en plus difficile d’endurer avec patience la dégradation morale, sociale, politique et économique qui résultent de sa montée en puissance, qu’il soit question de la « pandémie » actuelle et des « pandémies » à venir, ou des prétendus changements climatiques supposément causés par les émissions des gaz à effet de serre d’origine humaine. Toutefois, gardons-nous bien, en réaction au délire scientiste, de nous laisser entraîner dans un autre délire superstitieux, cette fois-ci anti-scientifique. Nous n’en serions pas plus avancés.