La prévention de la radicalisation

Après avoir lu un article de journal affirmant que le Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV) s’intéressait maintenant aux théories du complot liées au Virus pour prévenir la radicalisation des personnes qui adhèrent à ces théories, j’ai pu constater que cet organisme à but non lucratif, créé par la Ville de Montréal avec l’appui du gouvernement du Québec, offre des webinaires sur le sujet.

Ce qui a pour effet d’assimiler les idées qui s’éloignent du narratif officiel sur la « pandémie », véhiculé ad nauseam par nos autorités politiques et sanitaires et les médias traditionnels depuis environ un an, à une forme de désinformation dangereuse pour le vivre-ensemble, et de les associer avec des discours haineux, racistes et xénophobes susceptibles de mener à des actes de violence.

Bien que le CPRMV prétende refuser toute stigmatisation, le fait de se faire affubler du sobriquet de « complotistes » (on a eu la délicatesse de parler d'une « personne qui adhère aux théories du complot », mais ça revient au même puisque c’est précisément ce qu’on entend par « complotiste »), en tant que dissidents, constitue en quelque sorte une marque d’infamie, au même titre que des termes comme « pédales » pour parler des homosexuels, comme « dindes » pour parler des femmes, comme « sauvages » pour parler des Amérindiens, comme « frogs » pour parler des francophones, comme « têtes carrées » pour parler des anglophones, etc. Mais mon objectif n’est pas ici de nous faire jouer le rôle de victimes, mais seulement de montrer que le CPRMV ne respecte pas toujours la morale dont il prétend être le défenseur. Ses membres justifient probablement cet écart par le fait qu’en communiquant des informations fausses nous constituons un danger pour le vivre-ensemble, un peu comme les prêtres pouvaient voir dans les athées et les sceptiques des radicaux immoraux et criminels qui s’entêtaient à refuser la Vérité de la foi chrétienne et qui constituaient une menace pour la communauté des fidèles. Reconnaissons toutefois que les méthodes utilisées par le CPRMV ont pour objectif d’éviter la judiciarisation, alors que l’Église n’hésitait pas à faire appel aux tribunaux laïcs ou religieux pour défendre son emprise sur les esprits et les mœurs et punir sévèrement les délits d’opinion. Néanmoins les dissidents n’en sont pas moins considérés comme des délinquants potentiels et des « égarés » qu’il faut ramener sur le droit chemin, pour leur propre bien, celui de la société et même celui de l’humanité.

Ce qui frappe, en consultant le site du CPRMV, c’est la manière dont on conçoit et circonscrit la radicalisation menant à la violence. Mais rendons d’abord à César ce qui revient à César : le CPRMV admet que la radicalité des idées ne mène pas toujours à des actes violents et qu’elle peut même avoir des effets positifs dans certains cas.

« Il est important de distinguer la radicalisation violente de la radicalisation non violente. Parfois, l’enfermement d’un individu dans ses propres certitudes peut se traduire par un positionnement radical qui n’est pas nécessairement en contradiction avec les valeurs et les normes démocratiques : en ce sens, la radicalisation n’est pas considérée comme de la radicalisation violente.

D’ailleurs, les radicaux non violents peuvent jouer un rôle très positif – tant dans leur communauté que dans un contexte politique plus large. À preuve, la plupart des progrès des sociétés démocratiques sont le résultat d’une certaine forme de radicalisation : Martin Luther King, Gandhi, Mandela furent tous considérés, en leur temps, comme des radicaux. Ainsi, contester ce qui est fermement établi, c’est exposer une critique radicale d’un élément du système social, ce qui peut concourir à l’évolution positive de la société. » (Page sur la définition de la radicalisation.)

Mais le CPRMV semble exclure assez arbitrairement que les dissidents – qu’on considère comme des adhérents aux théories du complot – puissent critiquer fermement des éléments du nouveau système social qui s’est établi depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, et dont certains pourraient persister même s’ils ne sont pas compatibles avec les valeurs et les normes démocratiques. Une telle critique radicale ne pourrait-elle pas concourir à une évolution positive de la société, ou à tout le moins contribuer à éviter ou à atténuer une transformation négative de la société ?

Je ne suis pas non plus d’accord avec le CPRMV quand il affirme, dans le premier paragraphe cité, que l’individu qui a des idées radicales est enfermé dans ses propres certitudes. Cela peut certainement arriver, je ne le nie pas. Mais des idées radicales peuvent aussi être le résultat d’un examen critique qui suppose ou exige une ouverture ou une exposition aux idées concurrentes et extérieures, contre lesquelles ces idées doivent se défendre, par lesquelles elles sont façonnées, quand elles ne se combinent pas avec elles. Et un sceptique, qui pratique le doute radical, peut très bien être considéré comme un radical dans la mesure où il refuse de croire à quoi que ce soit sans l’avoir examiné sous toutes ses coutures et en étant toujours prêt à reprendre l’exercice, si de nouvelles raisons de douter se présentent. On ne saurait donc dire qu’il est enfermé dans ses certitudes, même si les croyants de toutes espèces ne manqueront pas de le trouver entêté en raison de son refus d’adhérer à leurs croyances qui lui semblent irrationnelles, et en raison de l’examen critique radical auquel il les soumet. En fait, de tels croyants ont beaucoup plus de propension à devenir des radicaux bornés au mauvais sens du terme, susceptibles de commettre des actes violents, surtout quand ils appartiennent à une communauté majoritaire et quand les autorités politiques et religieuses sont de leur côté ou quand ils exercent eux-mêmes le pouvoir politique ou religieux.

Voilà où je veux en venir : pourquoi le CPRMV ne considère la radicalisation violente possible que pour des individus isolés ou des groupes extrémistes, en excluant d’emblée la possibilité d’une radicalisation de la majorité de la population, des autorités politiques et sanitaires québécoises et des médias traditionnels ? Même si les membres du CPRMV verront peut-être dans cette hypothèse un signe d’adhésion à des théories complotistes, le refus d’examiner cette possibilité témoignerait d’un enfermement dans leurs certitudes d’autant plus critiquable qu’ils reconnaissent eux-mêmes qu’il est possible de sombrer dans la radicalisation violente avec un profil psychologique normal et sans appartenir à un groupe fermé qui pourrait s’apparenter à une secte.

« La radicalisation menant à la violence ne doit pas être confondue avec une problématique de santé mentale ni y être substituée : en réalité, si la santé mentale s’avère parfois l’un des nombreux facteurs possibles de certains processus de radicalisation, les études actuelles démontrent abondamment la « normalité » psychologique des individus engagés dans des trajectoires de radicalisation. Similairement, il serait erroné de confondre « radicalisation menant à la violence » et « dérive sectaire » : en effet, s’il est possible de dégager plusieurs éléments apparentés ou communs aux deux conditions, tout phénomène de radicalisation ne renvoie pas automatiquement à une « emprise mentale » à laquelle l’individu serait assujetti et qui le priverait de son libre arbitre. » (Page sur la définition de la radicalisation.)

Ceci dit, la « normalité » psychologique n’est pas une garantie de santé mentale si la norme est simplement définie par les manières de sentir et de penser les plus répandues ou dominantes dans une société, à un moment donné. Car les foules peuvent certainement délirer et se radicaliser, de même que les personnes qui sont censées les informer et les gouverner. Qu’on pense par exemple à l’Allemagne nazie, où il était tout à fait normal, raisonnable et souhaitable d’adhérer à l’idéologie nazie, certainement folle, violente et radicale au mauvais sens du terme. En pareil cas, l’emprise mentale peut s’étendre à toute une société, à l’exception des résistants et des dissidents (de dangereux radicaux selon l’idéologie nazie) et des victimes de cette idéologie. Si bien qu’une dérive « sectaire » menant à la radicalisation violente est possible à grande échelle et ce, sans qu’on la reconnaisse pour ce qu’elle est, la secte n’étant plus un groupe minoritaire se distinguant du reste de la société par son idéologie religieuse ou politique, mais étant plutôt devenue presque toute la société et ne pouvant plus être qualifiée de secte pour cette raison, même si l’enfermement dans les mêmes certitudes demeure et s’aggrave même, ainsi que son emprise sur les esprits.

Je sais bien que la situation dans laquelle nous nous trouvons diffère grandement de celle de l’Allemagne nazie, par exemple sur la répression de la dissidence. D’ailleurs la comparaison ne porte pas tant sur la nature et les effets de la radicalisation généralisée, mais a pour objectif de montrer que cette radicalisation (sous une forme ou une autre) ne se produit pas seulement chez des individus isolés, dans des groupes extrémistes marginaux ou même dans des franges sociales plus larges, mais peut aussi être observée à l’échelle d’une société et au cœur même de l’État, qui commet alors des actes de violence au nom de l’idéologie dominante, lesquels peuvent être reconnus comme tels ou non, selon qu’ils sont explicites ou implicites, selon la crédibilité des prétextes invoqués pour justifier ou dissimuler ce que ces actes ont de violent. L’existence d’une idéologie d’État aussi ouvertement dogmatique et violente que l’Allemagne nazie montre que ce n’est pas de la folie de faire l’hypothèse que l’État et la société puissent se radicaliser, mais moins ouvertement, en n’allant pas aussi loin dans la répression et dans la violence physique.

Ce sont là des possibilités que le CPRMV semble exclure d’entrée de jeu, en s’enfermant dans des présupposés qui passent pour autant de certitudes. Si bien que, si une société et ses chefs adhéraient à une telle idéologie radicale et violente, le CPRMV serait probablement incapable de la reconnaître pour ce qu’elle est (sauf si elle discrimine des communautés ethniques ou culturelles, les femmes, les homosexuels et les transgenres), ce qui veut dire qu’il pourrait même adhérer à cette idéologie et collaborer avec elle sous prétexte de prévenir la radicalisation des dissidents qui pourraient en venir à commettre des actes violents. Quoi que puissent en penser ses membres, le CPRMV n’est pas au-dessus de la mêlée et pourrait jouer à son insu un rôle dans l’expansion et la consolidation d’une idéologie d’État radicale, répressive et violente à sa manière, ce qui peut se produire aussi bien maintenant que dans le passé, et aussi bien au Québec, au Canada ou en Occident qu’en Chine ou en Russie, par exemple.


Voyons maintenant si ce que le CPRMV considère comme des signes et des mécanismes de radicalisation pouvant mener à des actes violents peut s’appliquer à l’idéologie sanitaire qui contamine notre société depuis un an, tout en nous gardant la possibilité de faire des correctifs pour tenir compte des présupposés abordés plus haut.

Pour ce faire, j’utiliserai le baromètre des comportements du CPRMV, une espèce de code de couleurs pour distinguer les comportements acceptables des comportements qui le sont moins.

Je ne m’attarde pas aux comportements non significatifs, sauf pour dire que les dissidents qui critiquent les mesures sanitaires que nous subissons tous au nom du narratif officiel sur la « crise sanitaire » pourraient très bien voir plusieurs de leurs comportements classés dans cette catégorie (argumenter avec ferveur pour défendre ses convictions auprès de ses proches ; montrer une présence active sur les réseaux sociaux ; prendre position et militer pacifiquement afin de défendre une cause liée à une communauté, à un groupe ou à un individu ; afficher un intérêt marqué pour l’actualité nationale et internationale ; exprimer une volonté d’approfondir un engagement politique ; adopter de nouvelles opinions politiques ; manifester un désir de corriger des injustices sociales), si on n’avait pas décidé d’emblée de les qualifier de complotistes.

Comportements PRÉOCCUPANTS

  • Nos autorités politiques et sanitaires, les journalistes et ceux de nos concitoyens qui s’abreuvent à ces sources expriment certainement un discours polarisant de vérité absolue. En effet, ils refusent souvent d’examiner ce qui ne correspond pas à ce discours, en l’écartant du revers de la main et en qualifiant ces points de vue de complotistes, quand ils ne vont pas jusqu’à les qualifier de criminels. Le fait qu’il s’agit parfois de déclarations de médecins reconnus pour leur compétence ou de scientifiques de renommée internationale ne change rien à l’affaire.

  • Ces mêmes personnes, du haut de leurs tribunes, dans les milieux de travail ou dans leur entourage, font du prosélytisme idéologique avec insistance auprès des autres individus, à savoir toute la population du Québec, à laquelle on inflige quotidiennement des discours moralisateurs simplistes, aucunement fondées sur une analyse des effets, alors qu’il s’agit d’une question scientifique et politique qui, pour être bien traitée, exige des points de vue raisonnés et multiples, et pas des slogans qui changent au gré des décisions autoritaires, opaques et arbitraires prises par les autorités.

  • Il va sans dire que les tenants l’idéologie sanitaire ont de la difficulté à remettre leurs idées en question et à reconnaître la valeur d’autres points de vue. La chose est simple : il n’y a pas d’autres points de vue admissibles que le leur.

  • Nos autorités politiques et sanitaires ont changé subitement leurs habitudes depuis la déclaration de l’état d’urgence sanitaire. Du jour au lendemain, elles se sont mises à réorganiser de manière autoritaire la société et notre vie personnelle, ce qui revient à exercer un contrôle sur nous, sur nos actions, voire sur ce que nous pouvons penser et dire. Le fait qu’elles croient ou prétendent agir dans l’intérêt public ne suffit pas à les justifier, les idéologies fournissant toujours de telles excuses à leurs adhérents.

  • Les adhérents de cette idéologie sanitaire d’État ont eux aussi changé leurs habitudes du jour au lendemain, en obéissant aux autorités politiques et sanitaires, et en prêtant créance aux affirmations répétitives des journalistes. À l’inverse, le comportement des « récalcitrants » et des « complotistes » est justement caractérisé par le refus de changer leur manière de vivre pour se conformer à l’idéologie sanitaire.

  • À la fois chez les autorités, les journalistes et la population, on peut observer un rejet massif des règles et des codes de vie des milieux de vie au nom de l’idéologie sanitaire en vigueur jusqu’à la déclaration de l’état d’urgence sanitaire. Ces règles et ces codes ont été remplacés subitement par la distanciation sociale et l’étiquette respiratoire.

  • Enfin l’isolement de son entourage – voulu par les adhérents de cette idéologie, bien qu’imposé par les autorités – a pour effet une déconnexion de la réalité et un confinement intellectuel et moral dans des certitudes difficilement discutables.

Comportements INQUIÉTANTS

  • Les adhérents de l’idéologie sanitaire sont certainement obsédés par les discours apocalyptiques des autorités politiques et sanitaires et des journalistes (les décès qui ne cessent d’augmenter et leur nombre exploserait s’il y avait relâchement des mesures sanitaires) et par leurs discours messianiques (les « vaccins » représentés comme les sauveurs que nous attendons). Les autorités politiques et sanitaires et les journalistes partagent cette obsession apolyptico-messianique dans la mesure où ils croient aux discours dont ils nous abreuvent inlassablement, et où ils ne nous mènent pas plutôt en bateau.

  • Il n’est pas rare de voir, sur les réseaux sociaux ou sur des forums, des extrémistes de l’idéologie sanitaire adopter un discours haineux à l’égard des « récalcitrants » et des « complotistes », par exemple en appelant sur leur tête la vengeance du Virus, ou en proposant de les exiler dans le Grand Nord ou de les priver de l’accès aux soins de santé (sauf s’ils les paient de leur poche), ou en réclamant qu’on vaccine les « covidiots » de force pour que la prophétie messianique puisse enfin se réaliser.

  • Les autorités politiques et sanitaires, les journalistes et les adhérents légitiment l’emploi de la violence pour défendre et imposer l’idéologie sanitaire, puisque la violence ne se réduit pas à l’agression physique. C’est un acte de violence à part entière que d’imposer aux dissidents les mêmes contraintes qu’aux adhérents consentants, par exemple en les privant de certains de leurs droits et de leurs libertés, en leur interdisant de circuler librement et en les séquestrant à domicile pendant le couvre-feu. Quant à l’insistance avec laquelle on cherche à mobiliser toute la population dans la guerre contre l’ennemi invisible qu’est le Virus, ainsi qu’à neutraliser ou à anéantir l’esprit critique, elle constitue un acte de violence sur l’esprit des citoyens, qu’on confine intellectuellement et moralement, en plus de physiquement.

Quant aux Comportements ALARMANTS, ils ne s’affichent pas en raison d’une erreur dans la page web. Ainsi nous voilà frustrés du droit de vérifier si les partisans de l’idéologie sanitaire en vogue sont des extrémistes purs et durs ! Dommage…


Qu’on n’aille surtout pas penser que je remets en question l’intégrité de l’équipe du CPRMV. Si ses membres n’ont jamais envisagé que l’idéologie sanitaire puisse être à l’origine de la radicalisation des autorités, des journalistes et de la majorité de la population, c’est qu’ils sont eux aussi des victimes de cette idéologie, comme nous tous, d’une manière ou d’une autre. Ainsi il ne faut pas voir en eux des adversaires, mais des alliés potentiels auxquels il faudrait essayer d’ouvrir les yeux, pour qu’ils nous aident à prévenir la radicalisation violente ou, compte tenu du l’état d’avancement de la radicalisation, à la déradicaliser le Québec.

J’invite donc les lecteurs de ce billet à adresser une demande formelle au CPRMV (info@info-radical.org) pour qu’il organise un Webinaire sur la menace que représente pour le vivre-ensemble la radicalisation sanitaire du Québec, en joignant à leur message le lien de la présente page à titre de pièce justificative. Les membres de cet organisme, assurément rigoureux et intègres, n’hésiteront pas à réexaminer leurs positions et à apporter les correctifs qui s’imposent pour être à la hauteur de la mission qui leur a été confiée et pour lutter contre l’idéologie sanitaire d’État, foncièrement incompatible avec les valeurs et les institutions démocratiques.