Incitation au suicide

Ceux de mes lecteurs qui seraient en mal de raisons de vitupérer contre le mouvement anti-cache-binette (je me qualifierais plutôt de sceptique anti-état d’urgence et anti-moraline), qui seraient tombés par hasard sur cette page, ou auxquels une de leurs connaissances auraient eu l’amabilité de leur en transmettre le lien, pousseront un soupir de déception. Non, je n’entends pas ici inciter mes concitoyens au suicide. Voilà ces lecteurs privés du plaisir d’amalgamer le mouvement anti-cache-binette à un quelconque mouvement pro-corde-au-cou, et de s’indigner en conséquence. Mais il n’y a rien de tel : j’aime la vie, et probablement plus que tous ceux qui acceptent presque sans broncher le sacrifice de presque tout ce qui rend la vie digne d’être vécue sur l’autel de la Santé publique.

Mais puisque ces lecteurs ont bien voulu me faire l’honneur d’une visite, je me montrerai bon hôte. Je leur servirai un plat qui convient à leur goût, car il y a bel et bien incitation au suicide. Seulement ,ce n’est pas moi le coupable : ce sont plutôt nos autorités politiques et sanitaires qui sont coupables. Si ces lecteurs sont des connaisseurs, le fumet de ce mets exquis chatouille leurs narines et leur met l’eau à la bouche, et avec raison ! Car que pourrait-il y avoir de plus scandaleux que ce tour de cochon ? Eh bien oui, je vous le dis, ces autorités, qui nous chantent le même refrain sur notre santé depuis bientôt un an, nous incitent au suicide de par les effets des mesures sanitaires qu’elles décrètent à outrance, pour nous montrer qu’elles ont un grand cœur. Car il est certainement possible de nous inciter au suicide autrement que par des paroles, c’est-à-dire en nous empoisonnant la vie.

Voilà de quoi se délecter ou étouffer d’indignation, si du moins on a un peu de jugeote, si du moins on ne pratique pas l’indignation sélective. Certes. Mais ce n’est pas aux personnes qui se vautrent dans l’indignation que je m’adresse principalement.

 

Le temps de faire le point

Je n’ai pas de tendances suicidaires. Par mon tempérament, je suis plus porté à la colère froide et à la moquerie (successivement ou simultanément) qu’à la déprime. Ce qui est un avantage considérable dans le contexte actuel : je peux m’efforcer d’être aussi lucide que possible sans tomber dans la déprime ; et je n’ai pas besoin de m’illusionner pour éviter la déprime.

Il n’empêche que, froidement, je me pose bien des questions sur ce qu’est devenue ma vie. Si j’applique rigoureusement toutes les obligations, les interdictions et les recommandations de nos autorités politiques et sanitaires, j’en suis presque réduit aux fonctions vitales ou du moins à ce qui est nécessaire à leur perpétuation. Je peux aller au supermarché pour m’acheter de quoi manger. Je peux travailler pour avoir l’argent nécessaire pour m’acheter de quoi manger et payer mon loyer. J’ai le droit de marcher dans les rues (de 5 heures à 20 heures seulement) pour maintenir mon organisme en état de marche et ne pas tomber malade. Car il faut bien être en assez bonne forme pour continuer d’aller travailler et gagner de quoi manger et me loger. Je peux parler à mes amis par vidéo-conférence, faute de les voir en personne. Car il ne faudrait pas que je retombe à l’état sauvage. J’ai la possibilité – et c’est même fortement recommandé – de m’informer dans les médias de masse pour suivre l’évolution de la situation, prendre connaissance des toutes dernières mesures sanitaires, et me faire bombarder de toutes les bonnes raisons imaginables de respecter ces mesures à la lettre, et même d’en faire plus. Je peux me divertir – ou m’assommer – en regardant des films ou des séries télévisées, ou en jouant à des jeux vidéos. Je peux noyer mon ennui dans l’alcool, ce qui finance – par les taxes sur l’alcool et les profits de la SAQ – l’appareil étatique qui élabore de nouvelles mesures sanitaires. Je peux m’évader dans la lecture, à condition de ne pas appliquer de manière critique ce que je lis à la situation actuelle, ou de garder mes réflexions immorales et absurdes pour moi.

Autrement dit, n’importe quel animal qui vit en liberté a une vie plus intéressante que moi : un écureuil, un pigeon, un jaseur des cèdres, une mésange, une corneille, un rat, etc. Ma vie s’apparente plus à celle d’un animal domestique (un chat, un chien, un serin, un hamster, etc.), si l’on fait abstraction du devoir ou du droit de travailler, dont on les dispense ou prive. En effet, ces animaux doivent rester enfermés à l’intérieur ou même dans leur cage la plupart du temps. Ce sont leurs maîtres qui décident quand ils peuvent aller à l’extérieur et voir leurs congénères, presque toujours avec une laisse et un collier au coup ; ou quand ils peuvent voler ou se promener « librement » dans la maison.

Votre vie ressemble à la mienne, à quelques différences près, selon que vous faites du télétravail ou non, selon que vous avez encore un emploi ou non, selon vous habitez seuls ou non, selon que vous avez des enfants ou non, selon que vous avez un domicile spacieux ou non. À part ça, nos vies sont platement uniformes : elles ont été réduites au plus bas commun dénominateur. Nous pouvons donc nous poser les mêmes questions, et peut-être y répondre de manière semblable.

Je vous pose franchement ces questions, auxquelles je vous invite à répondre avec honnêteté :

  • Vous êtes-vous demandé et continuez-vous de vous demander si la nouvelle vie qu’on nous impose mérite d’être vécue ?

  • Vous êtes-vous déjà dit qu’il vaudrait mieux continuer de vivre librement en acceptant individuellement et collectivement la réalité de la mort, et ce, même si le Virus était beaucoup plus dangereux qu’on le dit, et pas seulement pour les personnes dites plus vulnérables ?

  • Vous êtes-vous déjà dit que, tant qu’à vivre indéfiniment comme un délinquant en liberté conditionnelle, il vaudrait peut-être aussi bien ne plus vivre du tout ?

  • Vous êtes-vous déjà imaginés, à cause de cette vie, en train de vous empoisonner, de sauter du haut d’un édifice ou d’un pont, de vous trancher les veines des poignets, de vous pendre ou de vous tirer une balle dans la tête ?

  • Aviez-vous aussi souvent ce genre d’idées avant que nos autorités politiques et sanitaires déclarent l’état d’urgence sanitaire, avec tout son lot de mesures rendant la vie de plus en plus morne et même invivable ?

Heureusement, si vous me lisez, c’est que vous n’êtes pas passés à l’acte, tout comme moi. Je m’en réjouis sincèrement. Cela aurait été hâtif. Mais d’autres sont peut-être déjà passés à l’acte. Je le déplore. Et je déplore encore plus que ces suicides et tentatives de suicides dont on ignore le nombre, et ces idées suicidaires dont on ignore la fréquence, soient généralement occultés par la lutte contre le Virus, ou mentionnés en vitesse comme un simple effet « collatéral » de la pandémie et des mesures nécessaires pour garder le contrôle, ou même attribués à l’angoisse suscitée par le Virus. Ce qui dispense nos autorités politiques et sanitaires d’assumer leurs responsabilités quant à l’instauration généralisée d’un climat social qui constitue une incitation massive au suicide.

Il est vrai que nos autorités financent des centres de prévention du suicide et des campagnes de sensibilisation contre le suicide, en plus rendre de l’aide disponible aux personnes qui souffriraient de détresse psychologique. Ce qui revient – non sans une certain dose de bêtise et d’hypocrisie – à incendier une maison pour ensuite prétendre éteindre l’incendie avec un vulgaire boyau d’arrosage.

 

Et pour la suite ?

Voyons maintenant ce que pourrait nous réserver l’avenir.

Admettons que les mesures sanitaires adoptées par les autorités continuent d’être inefficaces, et que la « pandémie » et le narratif officiel qui l’accompagne durent encore des années. Dans l’éventualité d’une répétition cyclique (au fil des saisons) de ce que nous avons vécu en 2020, je pose cette question : voulons-nous vivre dans cette nouvelle normalité où les règles d’exception sont devenues permanentes, où la tristesse l’emporte haut la main sur la joie de vivre, et où nos libertés les plus élémentaires sont restreintes ou abolies par des mesures sanitaires qui ne semblent jamais devoir nous faire sortir de la situation exceptionnelle qui les justifierait ? Et si ces mesures sont resserrées, radicalisées et appliquées avec plus de rigueur en 2021, en 2022 et même au cours des années suivantes, sous prétexte qu’elles devraient alors produire les effets qu’elles n’ont pas produits quand on les a appliquées avec modération et même mollesse ? Voudra-t-on même nous déconfiner les printemps et les étés prochains, comme on nous a déconfinés à la même période en 2020 ? Nos autorités refuseront-elles en affirmant que c’est à cause du déconfinement qu’il y a eu une « deuxième vague d’une ampleur imprévue » ? Quelles nouvelles mesures prendront-elles sous prétexte d’empêcher ou d’atténuer une troisième, une quatrième ou une cinquième vague ? Quels moyens prendront-elles pour surveiller et contrôler nos déplacements et nos actes, et pour nous châtier en cas de désobéissance ? Et si jamais nos autorités finissent par venir à bout du virus, qu’est-ce qui nous dit qu’on ne nous annoncera pas que d’autres virus comparables ou pires attendent leur tour pour nous faire un sale coup, et qu’il faut faire avec ces autres virus exceptionnels la même chose qu’on a faite pour se protéger du virus actuel ?

Voilà qui donne à penser. C’est pourquoi je vous invite à répondre avec honnêteté aux questions suivantes :

  • Advenant que ce que ce que je viens de décrire se produise, en viendrez-vous à vous demander de plus en plus souvent si une telle vie mérite d’être vécue ?

  • Vous demanderez-vous de plus en plus fréquemment s’il ne vaudrait pas mieux être mort que de vivre cette vie qui, d’ailleurs, n’est plus une vie à proprement parler, mais une incarcération à grande échelle ?

  • Aurez-vous de plus en plus souvent des idées suicidaires ?

  • Est-il même à exclure, s’il n’y a pas une lueur d’espoir et si nos autorités semblent vouloir nous maintenir indéfiniment dans cette situation jusqu’à l’anéantissement définitif du Virus (et peut-être de tous les virus), que vous décidiez de passer à l’acte ?

  • Commencez-vous même à réfléchir à un moyen expéditif d’en finir, question de l’avoir à portée de la main quand vous en aurez vraiment marre ?

On dira qu’il ne faut pas avoir de pareilles idées, et encore moins les suggérer aux autres. Je réponds que ce sont là des vœux pieux. Nous aurons forcément ce genre d’idées compte tenu du climat social instauré par nos autorités, et qu’elles semblent avoir pour projet de faire durer, sous prétexte de protéger la santé de tous ou celle des personnes les plus vulnérables.

 

Encore pire

Ne présumons pas que le confinement qu’on nous impose peut se poursuivre longtemps sans qu’il n’y ait de graves conséquences pour nos sociétés. Il a déjà trop durer pour ne pas avoir de telles conséquences, d’ailleurs assez difficiles à prévoir avec exactitude.

Admettons que l’ordre social que nous connaissons se décompose progressivement ou brusquement. Les institutions politiques et publiques s’effritent et deviennent de plus en plus impuissantes. La situation économique devient telle que presque personne n’est à l’abri de la pauvreté et de la misère. De nombreuses entreprises font faillite, les emplois disparaissent par millions, les travailleurs n’ont plus de quoi payer leurs comptes et rembourser leurs dettes, le taux d’inflation ne cesse d’augmenter, l’État croule sous les dettes et ses créanciers exigent l’adoption de mesures d’austérité radicales qui aggraveront la situation économique. Beaucoup se retrouvent à la rue, à crever de faim. Les vols et les crimes violents augmentent en conséquence. Les rues ne sont même plus sûres le jour, et l’on n’est même pas en sécurité chez soi. Les forces policières ne disposent pas de l’argent et des effectifs nécessaires pour faire respecter la Loi, et souvent elles se financent en acceptant des pots-de-vin de la part des bandes de criminels qui réussissent le mieux et qui en viennent à contrôler des quartiers ou des arrondissements, pour y faire régner leur loi, parfois en étant parrainées par quelques multimilliardaires qui auraient su profiter de la situation pour accroître leur richesse et leur puissance.

Et ce n’est là qu’un scénario possible, parmi plusieurs autres.

Dans ce nouvel état de barbarie, ne serait-il pas légitime de nous poser ces questions ? :

  • Pour éviter la misère la plus crasse, le suicide est-il une option raisonnable ?

  • Ne vaut-il pas mieux mourir de notre propre main et rapidement, qu’à petit feu, dans de longues souffrances et de manière tout à fait indigne, par exemple en mourant de faim ?

  • N’est-il pas préférable de se donner la mort, que d’avoir à se transformer en bête sauvage pour survivre parmi les bêtes sauvages que sont devenus nos concitoyens ?

  • Puisqu’une société où il fait bon vivre serait très difficile à construire dans ces conditions, le suicide ne serait-il pas le moyen le plus sûr de se sortir de cette situation ?

Pourquoi penser à tout ça maintenant, dira-t-on ? Nous n’en sommes pas encore là. – Parce que si nous ne pensons pas à tout ça maintenant et ne commençons pas rapidement à agir en conséquence, nous finirons peut-être par en arriver là. Alors cette situation – qui sera un effet des mesures sanitaires actuellement en vigueur – produira dans l’esprit de beaucoup des idées suicidaires, et imposera à une partie importante d’entre eux le suicide aussi comme la seule solution possible. Et ceux qui choisiront de continuer à vivre coûte que coûte seront peut-être plus à plaindre que les suicidés. La responsabilité de nos autorités serait donc accablante, aussi bien à l’égard des suicidés qu’à l’égard de ceux qui s’acharnent à vivre dans ces conditions lamentables.

 

Suicide collectif

Jusqu’à maintenant nous avons envisagé le problème du suicide comme quelque chose d’individuel. Mais le suicide peut aussi être collectif. C’est ce que montrent bien les suicides collectifs de sectaires illuminés sous l’emprise de gourous fous. Nous sommes dans une situation analogue, mais à beaucoup plus grande échelle, les adeptes se comptant par milliards de personnes.

Précisons que si nos autorités politiques et sanitaires exigent que nous consentions à un suicide collectif, et même que nous le réclamions, ce suicide n’implique pas la mort de tous les membres de nos sociétés. S’il est vrai qu’une société ne saurait survivre à la mort de toutes ou de presque toutes les personnes qui la composent, elle peut néanmoins mourir ou se donner la mort alors que les personnes qui la composent continuent presque toutes à vivre, d’une manière ou d’une autre. C’est l’ordre social qui est alors détruit.

Nos gourous sanitaires – soit bêtise, soit malveillance, soit folie – profitent du fait qu’un tel suicide collectif est inconcevable pour leurs fidèles. Sous prétexte de protéger la santé et la vie d’une minorité de personnes plus vulnérables, et de travailler à l’avènement d’un monde chimérique où la mort des vieillards serait indéfiniment différée, ils ont réussi à obtenir que leurs fidèles consentent et participent à l’asphyxie de notre société, sans qu’ils ne conçoivent combien cela mine sa santé, à un tel point cela pourrait se solder par sa mort.

La responsabilité de nos autorités politiques et sanitaires, et aussi de nos médias de masse, est donc accablante.

 

Que faire ?

Assurément notre suicide individuel ne servirait à rien actuellement. Il serait même nuisible en ce que la proportion de fidèles aveuglés augmenterait en conséquence. Ne faisons pas un aussi beau cadeau aux gourous sanitaires, qui pourraient conduire leur grand troupeau au suicide collectif d’autant plus facilement qu’ils ne seraient pas entravés par nous dans leurs efforts. La lutte continue. Mais il faudrait qu’elle commence pour de bon, et que nous nous organisions, au lieu d’agir individuellement et dans l’ombre, comme je le fais moi-même présentement, je m’en aperçois bien.

Et si le grand suicide collectif se réalise malgré nos efforts pour l’empêcher, il sera toujours temps de nous suicider individuellement, si la situation devient insupportable et désespérée. À condition d’avoir en notre possession de quoi nous expédier efficacement, quand nous aurons pris cette décision après mûre réflexion.

Faisons de la possibilité du suicide non pas quelque chose qui nous prive de tout courage et qui nous rend inaptes à l’action, mais plutôt quelque chose qui nous donne du courage et qui nous rend aptes à l’action. Faisons d’elle non pas quelque chose qui pourrait simplement mettre fin à la vie, mais plutôt quelque chose qui nous permet de lutter pour la vie et contre les tendances morbides dont elle est infestée. Faisons d’elle non pas une manifestation de désespoir, mais plutôt ce qui nous permet de ne pas baisser les armes avant que la guerre ne soit irrémédiablement perdue.