Causes et conséquences morales du maintien du port obligatoire du masque

C’est une farce. Tous les quinze jours, le directeur national de la santé publique nous annonce qu’il a recommandé au gouvernement québécois de prolonger l’obligation de porter un masque dans les lieux publics. Nous en avons au moins jusqu’à la mi-mai. Mais le Dr Boileau veut se montrer encourageant : le Québec ayant maintenu cette obligation contrairement à la plupart des autres provinces canadiennes, nous aurions de l’avance sur elles quant à la sixième « vague ». Ce qui voudrait dire que nous devrions en finir avec cette sixième « vague » (qui a commencé avant qu’on annonce la fin de la cinquième « vague ») avant les autres provinces, et peut-être entrer dans la septième « vague » (qui pourrait commencer avant qu’on annonce la fin de la sixième « vague ») avant les autres provinces. Et cette nouvelle vague pourrait servir de prétexte pour retarder encore une fois la fin de l’obligation de porter un masque, ou pour remettre en vigueur cette obligation si elle est suspendue d’ici-là. Il importe donc de nous demander quelles sont les causes et les conséquences morales du maintien de cette obligation qui pourrait devenir permanente ou saisonnière, à la fois pour les personnes qui croient que cette pratique est utile et pour celles qui croient qu’elle est inutile.


Certains d’entre nous disent que cette obligation, c’est bien peu chose à comparer des vies et des complications que ça permettrait de sauver. Ce serait seulement porter un bout de tissu sur le visage une fois de temps en temps, quand nous allons faire nos courses ou quand nous utilisons les transports en commun. Souvent les personnes qui pensent de cette manière n’ont pas eu à porter un masque pendant plusieurs heures par jour, cinq jours par semaine, depuis bientôt deux ans. Souvent elles ont passé plusieurs mois sans travail, en restant à la maison et en vivant de l’aide financière donné par le gouvernement. Souvent elles ont fait du télétravail. Souvent elles ne travaillent pas avec le public et elles disposent d’un bureau bien à eux, dans une pièce fermée ou à l’écart, où elles n’ont pas à porter un masque, ou où personne ne les surveille pour voir si elles le font. Ou encore elles ont pris leur retraite avant l’arrivée du virus, ou justement parce que le virus est arrivé, et elles ont passé tout ce temps dans le confort de leur foyer. Ces personnes ont donc beau jeu de faire la morale aux autres qui ne sont pas du même avis qu’elles, pour exiger d’eux quelque chose qu’elles n’ont pas à supporter. En plus des pressions morales exercées sur les autres, ce comportement inconséquent façonne les personnes qui l’adoptent : elles s’habituent à tolérer ou à réclamer l’imposition de contraintes qui les affectent assez peu, mais qui affectent beaucoup de leurs concitoyens. Faute d’imagination et de sympathie, elles s’accommodent fort bien de cette situation, qui comporte peu d’inconvénients pour elles, et qui leur permet de moraliser les personnes pour lesquelles il y a des inconvénients et de conserver le haut du pavé moral à peu de frais. Avec le consentement de ces personnes, les autorités politiques et sanitaires peuvent donc aller très loin dans le dressage de la population et la privation de ses libertés, et pas seulement avec les masques.

Mais ne généralisons pas : les fidèles du masque ne sont pas toujours dans cette position privilégiée. Certains doivent le porter quotidiennement. Et ils s’en font alors une fierté. Parfois ils en font même plus que ce qu’on leur demande en portant un masque dans des endroits et dans des circonstances où ce n’est pas nécessaire : quand ils sont assis à leur bureau, quand ils attendent l’autobus, quand ils marchent dans la rue, quand ils sont seuls en voiture, etc. Pour ces personnes, les effets véritables de ce qu’on leur demande, ou de ce qu’elles décident elles-mêmes de faire par zèle sanitaire, n’a que peu d’importance. L’important pour elles, c’est de montrer qu’elles comptent parmi les plus moraux. Le contentement que cela leur procure compense amplement l’inconfort du port du masque pendant une période prolongée. Il peut même que cet inconfort, qu’elles cherchent à accroître et qu’elles considèrent comme une sorte de sacrifice, alimente ce sentiment de contentement d’elles-mêmes qui leur est si cher. En raison de leur croyance superstitieuse en une sorte d’ordre moral inhérent à la constitution du monde, plus elles en font et plus elles croient que les effets bénéfiques pour leur santé et ceux de leurs congénères seront grands. Et cette attitude morale, entretenue par l’obligation de porter le masque, peut s’étendre à toutes sortes d’autres sacrifices contre lesquels elles croiront obtenir en échange des récompenses sous la forme de bons effets, en vertu de cet ordre moral. Quant à ceux qui rechignent ou qui refusent de faire ces sacrifices, ils attireraient des calamités sur eux-mêmes et sur les autres. Encore une fois, une telle attitude morale joue un rôle important dans le dressage de la population et dans la perte de ses libertés, qu’il s’agisse des personnes dont l’identité dépend de cette attitude et qui sont par conséquent attachées à ces occasions aussi faciles de se faire valoir, ou qu’il s’agisse plutôt de leurs congénères qui subissent cette attitude et qui prennent l’habitude de se dicter ce qu’ils doivent faire par ces intégristes moraux, qui sont forts de l’appui de nos gouvernements.


La valeur symbolique du masque est très importante. De tout ce qu’on nous demande de faire pour lutter contre le méchant virus, c’est ce qui est le plus visible. En continuant de porter le masque l’hiver, le printemps, l’automne et même l’été, nous reconnaissons l’omniprésence du virus. Il serait partout. Il serait même là quand il ne semble pas être là.

Qu’importe que ce soit l’été, qu’il fasse 30 degrés Celsius, que les cas soient rares, que les hôpitaux soient presque vides et que les décès soient presque inexistants. Le virus serait là vous rester. Il circulerait même si nous ne le voyons pas. Il frapperait d’autant plus fort à l’automne, que nous négligerions de porter le masque quand il le faudrait. Ce serait un virus sournois. Caché dans l’ombre, il attendrait sa chance de nous poignarder.

Qu’importe qu’on ne puisse pas établir de rapport de causalité entre le fait d’avoir porté ou non le masque et l’arrivée et la prolongation d’une nouvelle « vague » faible ou forte, quelques semaines ou quelques mois plus tard. Nous saurions que si la « vague » est faible, c’est entre autres parce que nous aurions pratiqué correctement le port du masque, et que si la « vague » est plus fortee, c’est entre autres parce que nous nous serions montrés négligents quant au port du masque. La « vague » faible serait une récompense pour avoir fait la bonne action qui consiste à porter nos masques. La « vague » forte serait une punition pour avoir refusé inconsidérément, égoïstement et méchamment de porter nos masques. Et si la « vague » est forte même si nous avons agi moralement, on nous dit que la « vague » aurait été encore plus forte si nous n’avions pas agi moralement. Ce qui revient à substituer à l’observation des rapports causaux une conception moralisante et superstitieuse du monde.

Du même coup, en portant le masque, nous montrons notre allégeance au nouvel ordre social qui se met en place. C’est un signe d’orthodoxie. Nous montrons que nous adhérons aux mesures qu’on nous impose sous prétexte de nous protéger, c’est-à-dire que nous sommes vulnérables et avons besoin de nous protéger nous-mêmes, de protéger les autres, et d’être protégés par les autorités politiques et sanitaires. C’est une reconnaissance de notre faiblesse. C’est montrer ostensiblement que notre santé et notre sécurité sont la priorité, et qu’en leur nom nous sommes disposés à accepter la suspension ou la privation de certains de nos droits et de nos libertés, le contrôle et la surveillance de nos actions que cela implique, et aussi la destruction de notre économie, notre appauvrissement et l’endettement démesuré de l’État.

Faisons la différence entre ceux qui, en portant un masque, montrent vraiment leur fidélité au nouvel ordre politique et sanitaire, et ceux qui adoptent ainsi les apparences de l’orthodoxie pour éviter les ennuis, les amendes et les mesures disciplinaires.

Les fidèles, en continuant à porter un masque, maintiennent et renforcent leur orthodoxie. Le fait que les autres, y compris les dissidents et les sceptiques, portent leurs masques les confortent dans leur foi, en particulier à propos du port du masque, et en général à propos de l’ordre sécuritaire. Il en résulte qu’à leurs yeux, le port du masque et les autres mesures de surveillance et de contrôle s’imposent comme des évidences pour toutes les personnes sensées.

Les dissidents et les sceptiques, en se conformant à l’obligation de porter un masque, s’habituent à penser quelque chose et à agir autrement. Non cela mine leur capacité de résistance, mais cela les pousse aussi à s’autocensurer sur la question des masques et sur les autres mesures de surveillance et de contrôle. Ils risquent même de voir leurs idées devenir de plus en plus orthodoxes. Cette autocensure est d’autant plus efficace que, pour les dissidents et les sceptiques qui sont largement minoritaires au Québec, le risque des conséquences de la désobéissance sont bien réels, qu’il s’agisse d’amendes, de sanctions disciplinaires, d’arrestations musclées ou de campagnes de diffamation.

Le port du masque, en tant qu’il continue d’être imposé aux fidèles et aux infidèles, est une manière pour l’orthodoxie sanitaire de se maintenir, de conserver son emprise sur les individus, et de continuer leur dressage.


Le port généralisé du masque dans les lieux publics ne sert pas seulement à rappeler à l’esprit l’omniprésence du virus et le danger qu’il représenterait pour nous. Le virus ayant besoin de vecteurs de contagion, le véritable danger, ce sont les autres. Le masque a pour fonction de rappeler que les autres pourraient nous transmettre le virus, et que nous pourrions le leur transmettre. Nous en venons donc à considérer les autres comme un danger pour nous, et à nous considérer nous-mêmes comme un danger pour les autres.

S’il peut y avoir des moments où ce danger est moins perceptible en raison des certains assouplissements et le ton moins alarmiste des autorités politiques et sanitaires et des journalistes, le maintien du port du masque dans les lieux publics et dans les milieux de travail sert à maintenir le degré de peur minimal nécessaire pour que l’orthodoxie sanitaire continue d’exister et ne se dissolve pas, et pour durcir plus tard les mesures dites sanitaires sans rencontrer une forte résistance. Ce n’est pas un hasard si le port du masque est la mesure de protection qu’on maintient alors qu’on lève ou suspend les autres mesures de surveillance et de contrôle. Sa visibilité contribue à faire perdurer la peur que beaucoup ont de leurs concitoyens, avec lesquels ils ont par conséquent des relations assez distantes, surtout si ce sont seulement des connaissances ou des inconnus.

Puis il y a la perte de convivialité dans les relations sociales, qui sont appauvries et rendues ternes par le port du masque. Elles peuvent même devenir déplaisantes et pénibles, même quand la peur n’intervient pas. On veut en finir au plus vite, puisqu’on éprouve assez peu de plaisir à parler à des personnes dont le visage est sanglé dans un masque, dont les expressions sont difficilement perceptibles, et dont la voix est assourdie – autrement dit, à des personnes qui sont dépersonnalisées et presque interchangeables. Sans compter qu’il faut faire un effort pour respirer correctement si on veut avoir une discussion un peu complexe, qui implique un enchaînement de phrases longues, et pas seulement des paroles rudimentaires et convenues, comme on en voit tant au travail et dans les commerces.

Enfin il y a la méfiance que nous avons les uns pour les autres. Plusieurs d’entre nous seraient peut-être prêts à laisser tomber ces masques et à parler à visage découvert. Mais comment les reconnaître ? En s’ouvrant sur la question, par exemple à un collègue, et aussi en passant de la parole aux actes, ne nous exposons-nous pas à être dénoncés et à être tenus responsables de l’infection et des complications de nos collègues, et peut-être même de la mort de l’un d’entre eux, même si on n’est pas en mesure de prouver que nous y sommes pour quelque chose ?

Le port obligatoire du masque entrave donc les relations sociales et, du même coup, contribue au relâchement du tissu social et à un repli des citoyens dans la sphère privée ou familiale. Voilà qui aide assurément les autorités politiques et sanitaires qui nous imposent toutes sortes de mesures de surveillance et de contrôle sous prétexte de nous protéger. Dans ces circonstances, on voit mal comment les citoyens pourraient faire corps pour s’opposer à ces autorités et lutter de manière organisée pour récupérer leurs droits et leurs libertés.


Le port du masque, même quand il fait l’objet d’exceptions et d’assouplissements, sert à nous dresser. En fait, ces exceptions et ces assouplissements sont des instruments de dressage. Car le dressage ne porte pas seulement sur nos actions, mais aussi sur nos idées et sur nos sentiments. Car le contrôle de nos maîtres sur nos actions est d’autant plus grand qu’ils contrôlent aussi nos idées et nos sentiments. Mais ils peuvent accroître le contrôle sur nos idées et nos sentiments obtenu grâce à la propagande à l’aide du contrôle qu’ils exercent sur nos actions, et plus précisément à l’aide d’exceptions et d’assouplissements. À moins bien sûr qu’on considère que ce contrôle sur nos actions, qui ne se fait généralement pas par la force ou par les sanctions, fait partie de la propagande. Alors la propagande ne devrait plus être considérée comme une pratique strictement discursive ou médiatique.

Quand nous allons au restaurant, nous sommes autorisés à nous asseoir à la même table que plusieurs personnes avec lesquelles nous n’habitons pas, et à être assis à proximité d’elles pendant quelques heures, sans masques, pour manger et discuter. Mais pour nous rendre à notre place quand nous entrons dans le restaurant, et pour sortir du restaurant quand nous avons fini, nous devons mettre nos masques. Comme si le risque d’attraper le virus quand nous sommes debout et en mouvement, pendant moins d’une minute, était plus élevé que celui de l’attraper en passant quelques heures tout près des autres convives.

Quand nous sommes au travail, nous avons le droit d’enlever notre masque quand nous sommes assis à notre bureau ou quand nous sommes à l’intérieur des limites qui constituent notre cubicule. Les paravents sont considérés comme des barrières efficaces pour arrêter la propagation du virus. Ainsi pouvons-nous avoir des « conversations de paravent » avec nos voisins de bureau en étant tout à fait dans les règles. Et le fait que les cubicules nous arrêtent à la poitrine, et ne peuvent donc pas empêcher nos postillons possiblement porteurs du virus d’atterrir dans la narine, la bouche ou les yeux de nos interlocuteurs, ne change rien à l’affaire. Mais si nous nous levons et faisons seulement quelques pas en dehors de notre cubicule, quand il n’y a personne en vue ou en gardant une distance plus grande avec les autres que pendant nos « conversations de paravent », il est impératif que nous portions un masque pour protéger notre santé et celle des autres.

Enfin, alors que les patrons et les employés tiennent à ce que nous respections rigoureusement l’obligation du masque au travail afin d’éviter que nous nous infections les uns les autres et provoquions une éclosion, ils ne voient pas de problème à former un groupe constitué des mêmes personnes pour aller dîner au restaurant, conformément à ce qui est autorisé par nos autorités politiques et sanitaires.

Il n’y a donc pas de cohérence dans le choix des circonstances dans lesquelles nous avons l’obligation de porter un masque. Ce n’est pas exagéré que de dire que tout ça est absurde. Et ces incohérences et ces absurdités contribuent à notre dressage, c’est-à-dire au contrôle que nos maîtres exercent sur nos idées et nos sentiments, et donc aussi sur nos actions. En effet, nous nous habituons à obéir malgré les incohérences et les absurdités des ordres qu’on nous donne et, ce faisant, nous nous habituons à ces incohérences et ces absurdités. Pour ceux d’entre nous qui remarquent à peine ces incohérences et ces absurdités, ou qui décident ne pas en faire un cas, ils s’immunisent aux incohérences et aux absurdités, ils les tolèrent très bien, ce qui ne manquera pas de s’appliquer de manière générale à l’exercice du pouvoir arbitraire par nos autorités politiques et sanitaires, et plus en particulier aux autres ordres incohérents et absurdes qu’elles ne se gêneront pour nous donner, en profitant de ces dispositions à l’obéissance aveugle. Quant à ceux d’entre nous qui remarquent ces incohérences et ces absurdités, et qui les critiquent dans leur for intérieur ou en privé, le fait d’être contraints de se conformer à ces ordres affaiblit leurs exigences intellectuelles et morales, et les habituent à se résigner à agir de manière incohérente et absurde. Peu à peu ils en viennent à ressembler à ceux qui ont pris depuis longtemps le parti d’obéir aveuglément, sans questionner les ordres incohérents et absurdes qu’on leur donne.

Nous sommes dans une situation analogue à celle de nouveaux conscrits qu’on soumet à une discipline militaire à la fois stricte et capricieuse, pour obtenir d’eux l’obéissance aveugle attendue de soldats. « Garde à vous ! Repos ! Gauche, droite, gauche, droite, gauche, droite ! Demi-tour à gauche ! Gauche, droite, gauche, droite, gauche droite ! Demi-tour à droite ! Gauche, droite, gauche, droite, gauche, droite ! Arrêt ! Garde à vous ! Repos ! » Autant d’ordres qui ont pour but d’étouffer l’autonomie des bons petits soldats et de les rendre capables d’une obéissance aveugle.

Voilà qui rappelle aussi la manière dont certaines personnes traitent leur chien : « Assis ! Coucher ! Debout ! On donne la patte ! Et maintenant on marche ! Au pied ! Bon pitou ! On continue ! »


Quand on dresse des animaux ou des êtres humains, on se sert couramment d’accessoires.

La cravache et le fouet servent à donner des ordres à son cheval, à le stimuler et à se faire obéir de lui. Le mors et la bride permettent de l’arrêter s’il s’emballe. Les œillères réduisent son champ de vision et l’empêchent de voir des objets qui pourraient l’inciter à se comporter de manière inadéquate, d’après les critères du cavalier ou charretier. Le collier-étrangleur permet au maître de contrôler les mouvements de son chien en l’empêchant de respirer. Le collier anti-aboiement vaporise un jet de citronnelle sous la mâchoire du chien quand il jappe, pour lui rappeler gentiment qu’il est temps de se taire. Le collier anti-fugue donne une légère décharge électrique quand le chien quitte les limites du terrain où il a le droit de se promener. Le masque permet à nos maîtres d’exercer un contrôle sur notre manière de respirer, qui n’est plus libre. Pas question de prendre d’amples respirations, qui font que nous avons l’impression d’étouffer, et qui embuent nos lunettes. Il nous faut respirer de manière contrainte : une petite inspiration, une petite expiration, une petite inspiration, une petite expiration, etc.

En réglementant indirectement notre manière de respirer grâce à l’obligation de porter un masque dans toutes sortes de circonstances, nos maîtres contrôlent l’une de nos fonctions vitales. Ils nous habituent à ce que nous acceptions un pouvoir qui s’étend même à nos fonctions vitales les plus élémentaires, qu’on cherche à réduire à l’essentiel, en en purgeant le superflu. En contrôlant notre manière de respirer, ils tolèrent tout au plus que nous nous oxygénions. Ils étendent donc leur emprise sur notre corps, qui n’est pas quelque chose de distinct de nous, mais qui nous constitue, en ce que nous sommes des êtres biologiques.

À partir du moment où nous nous habituons à être contrôlés jusque dans cette fonction biologique essentielle, il va de soi que nous sommes tout disposés à être contrôlés quant à nos autres fonctions vitales, comme le fait de nous déplacer et de manger, ainsi que dans d’autres activités qui sont moins élémentaires. Autrement dit, qui se résigne à être contrôlé jusque dans sa manière de respirer est susceptible d’accepter d’être emprisonné à la maison, de se voir interdire l’accès à des lieux publics ou la participation à certaines activités sociales, d’être privé de ses droits et de ses libertés, et de n’être qu’un serf assujetti à des autorités tyranniques, malveillantes, capricieuses et folles, et qu’un rat de laboratoire pour les sociétés pharmaceutiques.


Concluons. L’obligation de porter un masque dans les lieux publics et dans les milieux de travail est une manière de nous façonner moralement, et de nous disposer à consentir ou à réclamer d’autres formes de surveillance et de contrôle, qu’il s’agisse de ralentir la propagation du virus actuel ou d’un autre virus à venir, d’empêcher le financement et l’organisation de mouvements d’opposition contre le gouvernement québécois ou canadien, de censurer les informations et les analyses qui ne sont pas en accord avec la position des pays occidentaux contre la Russie, ou de s’assurer que nous acceptons paisiblement la pauvreté croissante qui résulte des sanctions prises contre nous, sous prétexte de lutter contre le virus ou de punir la Russie. Et même si l’obligation de porter un masque était suspendue ou atténuée prochainement, elle nous a déjà fait des dégâts moraux considérables, individuellement et collectivement, lesquels il ne serait pas facile de réparer, et dont nos gouvernements pourraient continuer à tirer profit, tellement ils nous ont rendu capables d’obéissance aveugle et ont miné nos capacités de résistance.

Il n’en demeure pas moins vrai que plus cette obligation sera levée ou suspendue rapidement, plus nous aurons le temps de nous réhabituer au fait de pouvoir respirer librement, au sens propre et au sens figuré. Et ce serait encore mieux si nous ne nous contentions pas d’attendre que notre gouvernement consente à nous rendre cette liberté.